Le chef de file du PS aux élections régionales de décembre 2015, Christophe Castaner, ne cesse de prôner l’union la plus large à gauche dès l’avant-premier tour. Dans son viseur, Europe Ecologie les Verts, à qui il a envoyé une lettre le 11 juin dernier. Dans ce courrier que nous nous sommes procurés (lire l’intégralité ci-dessous), l’élu alpin juge « nécessaire d’établir ensemble [avec les Verts] des convergences solides […] afin de trouver un accord d’avant premier-tour ». Cette lettre s’adresse officiellement à Guy Bennaroche, secrétaire régional du parti écologiste, mais l’expression “sois assurée” trahit peut-être le destinataire féminin de cette missive : Sophie Camard, la tête de liste EELV pour les élections régionales.
Pour rallier à tout prix les Verts derrière sa candidature, Christophe Castaner évoque ses réalisations en tant que maire de Forcalquier en matière d’écologie. Il n’hésite pas non plus à mettre en avant le bilan de la majorité de gauche plurielle à l’échelle régionale sous les mandatures de Michel Vauzelle. Le candidat PS va jusqu’à brandir la nécessité « de faire barrage à la droite-extrême et à l’extrême droite » pour convaincre les Verts de le rejoindre avant le premier tour. Usant tour à tour de l’incitation, de la démonstration de force et de la menace, le leader socialiste montre sa volonté d’arracher à tout prix un accord d’avant-premier tour avec les Verts, rassemblement qui semble crucial pour sa candidature et sa crédibilité. Mais, EELV ne l’entend pas de cette oreille. Après une assemblée régionale d’Europe Ecologie les Verts le 20 juin dernier, les militants se sont prononcés à une très large majorité pour des accords de premier tour avec un parti plus à gauche que le PS, comprendre le Front de Gauche.
Mais EELV affirme son indépendance
Car bientôt deux mois après l’envoi de cette lettre, aucun rassemblement PS-EELV n’a été amorcé. Bien au contraire. Lundi 27 juillet, Europe Ecologie a envoyé à tous les partis de gauche à l’exception du Parti Socialiste un projet régional, destiné à servir de socle à une union dès le premier tour autour du principal parti écologiste. Contacté par GoMet’, Dorian Hispa (responsable EELV Pays d’Aix et quatrième de la liste EELV dans les Bouches-du-Rhône) estime que « le PS13 n’est toujours pas sorti de l’ère Guérini », ce qui réduirait selon lui les chances d’un accord EELV-PS dès le premier tour surtout que « la tête de liste départementale [Jean-David Ciot] est l’image d’un PS recroquevillé sur lui-même qui n’est pas capable de rassembler les autres forces de gauche ». D’autre part, un accord entre EELV et le Front de Gauche d’avant premier-tour est en bonne voie d’aboutir. Dans un tel contexte, le député Castaner apparaît de plus en plus isolé sur l’échiquier politique, puisque selon nos informations, il n’aurait pour l’instant, outre celui du PS, le soutien effectif de Génération Ecologie et du Front Démocrate. Selon un sondage paru début juillet, en l’état, le retard de la liste socialiste face à celles de Marion Maréchal Le Pen (FN) et Christian Estrosi (LR) est très important. Pire, le premier des socialistes , qui a été au cours des derniers mois de tous les déplacements de François Hollande ou Manuel Valls dans la région (sur notre photo à gauche avec François Hollande lors de Medcop21, © JY Delattre), semble avoir des difficultés à mettre de l’ordre dans son camp.
Tourmente dans les Bouches-du-Rhône
Les Bouches-du-Rhône, département qui fournit à lui seul 50 des 129 conseillers régionaux, constitue pour l’instant le maillon faible de Christophe Castaner. Son appel au retrait de Jean-David Ciot comme tête de liste départementale a installé un climat d’animosité entre les deux élus et plus largement entre Christophe Castaner et l’ensemble de la fédération socialiste des Bouches-du-Rhône. Le maire de Forcalquier doit désormais faire le grand écart : car si d’un côté, il se doit d’installer une personnalité forte et irréprochable pour mener la campagne dans les Bouches-du-Rhône, il doit également faire attention à garder le soutien de cette fédération qui garde sa capacité de nuisance, à défaut de sa puissance d’antan. Elle peut ainsi choisir de ne pas mener campagne, ce qui précipiterait l’échec de l’élu alpin.
Quelle solution pour Christophe Castaner si EELV maintient sa ligne jusqu’au premier tour fin novembre ? Plusieurs noms circulent au sein du PS, comme potentiels têtes de la liste dans les Bouches-du-Rhône si Jean-David Ciot se désiste. Ainsi, Christophe Castaner en personne a été envisagé mais il rechigne. «Qu’est-ce que je viendrai faire là ?» nous confiait-il en attendant le président mexicain à la Villa Méditerranée à Marseille le 15 juillet dernier. La piste d’Emmanuel Macron, le ministre de l’Economie, parachuté à Marseille, a elle aussi été avancée, puis visiblement écartée (Castaner a été le porte-parole de la loi Macron à l’Assemblée). Eugène Caselli et quelques autres essaient aussi de tirer leur épingle du jeu, dans ce méli-mélo socialiste. Jean-David Ciot, malgré le procès en appel dans l’affaire de son licenciement du conseil général des Bouches-du-Rhône, n’a pas dit son dernier mot. Selon certains militants ou élus, il resterait encore la candidature la plus crédible pour rassembler le PS13. Au point de convaincre Christophe Castaner pour qui le rassemblement est si cher ?
Document : La lettre de Christophe Castaner aux dirigeants d’EELV