Qui est la muse des temps modernes ? Inspiratrice, fatale, irréelle ou simple modèle ? La nouvelle exposition du musée Regards de Provence – Sa Muse – pose la question à travers une belle galerie de portraits, féminins comme masculins, à découvrir jusqu’au 26 août 2018.
Déesses de l’Olympe, filles de Zeus nées de neuf nuits d’amour successives, les Muses sont, dans la mythologie grecque, protectrices des arts, des lettres et des sciences. Par le suite, chez les mortels, nous autres les humains, on accorda ce titre suprême à celle chez qui l’artiste puisait sa force créatrice, qu’elle soit célèbre ou anonyme. Pour n’en citer que quelques-unes qui ont marqué l’histoire contemporaine de l’art : Lydia et Matisse, Gala et Dali, Marthe et Bonnard, sans oublier Renée, la muse trahie qui se suicida, Picasso et la plupart de ses femmes… Qu’en est-il aujourd’hui ? Qui sont ces femmes, égéries, modèles, divas… qui inspirent peintres, photographes et sculpteurs contemporains ? Sont-elles d’ailleurs exclusivement féminines ? Des réponses à glaner au fil d’un parcours agréable qui mériterait bien plus qu’un étage pour approfondir un sujet si vaste et ambitieux, et dont les rapprochements peuvent dérouter parfois le visiteur.
Les femmes s’en mêlent
« Est ce que les femmes doivent être nues pour entrer au Metropolitan Museum ? Moins de 4% des artistes exposés sont des femmes mais 76% des nus sont féminins » C’est avec cette revendication militante des Guerrilla Girls, affichée entre un portait de Vénus du XIXe siècle et celui d’Orlan à la manière de la Grande Odalisque d’Ingres, qu’est accueilli le visiteur. Si de façon conventionnelle, la muse et le nu n’ont fait qu’un pendant des siècles, lorsque que l’artiste est une femme, que revendique-t-elle ? Que choisit-elle ? Le nu masculin à l’instar de Marie Ducaté qui représente son compagnon, Nu dans un cercle, dansant devant une version de l’Odalisque blonde de Boucher et dans un cadre composé d’objets de récupération divers et variés ? Ou comme Susanne Strassmann qui fait se côtoyer sur la toile deux femmes à l’attitude étrangement similaire, la travailleuse engagée de l’ex-URSS et la Femen russe actuelle.
Katia Bourdarel, dont La Promesse de l’horizon 1 a fourni l’affiche de l’exposition, a longtemps choisi sa fille comme modèle, un alter ego, jusqu’à ce que cette dernière décide d’arrêter. Deux tableaux sont présentés ici, volontairement sans visage laissant le public libre d’imaginer.
Et l’artiste s’amuse, entre réalité et fiction
De la différenciation sexuelle avec, notamment, le portrait de Michèle Sylvander – Tant pis pour nous – au corps à corps troublant de Nicole Tea Ba Vang, en passant par les peintures numériques À fleurs de peau de Marc Chostakoff, ou l’extraordinaire travail de Sabine Pigalle qui revisite les œuvres des maîtres du Quatrocento, plusieurs artistes se servent du corps de l’autre pour jouer entre réalité et fiction. Jusqu’à la vie sublimée de Van Gogh par Jean-Jacques Ceccarelli, aux autoportraits d’Olivier Rebufa en compagnie des Barbie blanches ou noires, aux icônes et divas baroques de Claire et Philippe Ordioni ou comment attirer de façon excentrique le regard du public. Et c’est peut être là que se trouve le véritable fil rouge de cette exposition : celui qui a fait dire à Adeline Granereau, directrice du musée, et au commissaire de l’exposition, Bernard Muntaner, lors de la présentation à la presse « Nous nous sommes bien amusés ».
Mais parmi la cinquantaine d’œuvres du début du XXe siècle à nos jours réunies pour l’exposition, d’autres illustrent plus simplement et plus largement le thème du portrait, réel ou fictif, comme celui sur fond monochrome de Djamel Tatah, ou de l’apparition de l’autre, suggérée par le vide chez Aki Kuroda, et quasi fantomatique pour Hervé Saint-Helier.
Au final, plus d’une dizaine d’artistes féminines sont entrées ainsi au musée Regards de Provence, de quoi satisfaire les Guerrilla Girls et le public en général. Quant au musée, il retrouve ainsi son sens étymologique : un temple, sur la colline de l’hélicon à Athènes, dédié aux Muses…
Informations pratiques :
> Exposition du 10 février au 26 août 2018, du mardi au dimanche de 10h à 18h
> Tarif de 6,50 € à 2 €À l’occasion de l’inauguration de MP2018 mercredi 14 février
> Tarif d’entrée unique à 3€
> Atelier de “Pop-up Sa Muse…” de 13h30 à 14h45, animé par Arno Célérier
> Atelier créatif avec Patrick Moquet de 15h à 16h
Ateliers gratuits, inscription obligatoire au 04 96 17 40 40 ou info@museeregardsdeprovence.com
> Cours de pâtisserie Cœur-Cake de 16h à 17h30 – PAF 5 € par enfant. Inscription sur réservation au 04 96174045 ou resa@museeregardsdeprovence.com