Les directeurs financiers se préparent à la nouvelle directive européenne Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) qui demande à la fois expertise et impulsion. En partenariat avec Deloitte, l’association DFCG (directeurs financiers et du contrôle de gestion) Provence a réuni ses membres, les directeurs financiers régionaux, le 21 septembre au 29e étage de la tour La Marseillaise sur le thème : « CSRD, taxonomie : réussir le reporting ESG de demain ! CFO : votre plan d’actions. »
Devant des professionnels de la finance responsables et engagés, rassemblés par Marie-Hélène Pebayle, la présidente DFCG Provence, Marie-Pierre Lafon secrétaire générale DFCG Provence et Nicole Pelouzet (DNCG région) pour s’informer avec acuité et partager leur expérience, les spécialistes “sustainability” de Deloitte ont décortiqué les nouveaux enjeux environnementaux qui redessinent le pilotage des entreprises, la fonction financière et le rôle des directeurs financiers en entreprise.
La directive CSRD de l’Union européenne, votée en décembre 2022, entrera en application en France dès la fin de cette année, à commencer pour les grands groupes qui remplissent au moins deux des trois conditions suivantes : plus de 500 salariés, plus de 400 M€ de CA et plus de 20 M€ de total de bilan. Dès le 1er janvier 2025, ces grandes entreprises devront présenter un bilan circonstancié, appelé par la suite à fixer des objectifs de plus grande sobriété. En 2026, ce sera au tour des entreprises de plus de 250 salariés à devoir se mettre en conformité avec la loi. En 2029, ce sera au tour des entreprises de plus de 10 employés…
CSRD : Gaz à effet de serre, énergie, biodiversité, économie circulaire…
L’enjeu consiste à collecter et à maîtriser l’ensemble de leurs données environnementales. La directive CSRD repose sur un objectif de diminution des émissions, par les entreprises, des gaz à effet de serre (GES). Elle oblige notamment les entreprises à détailler les procédés industriels qui sont les leurs. Elle vise encore les déplacements des salariés, les transports des marchandises (en amont et en aval), la gestion des déchets, l’achat des matières premières, des services ou des produits. Sur l’ensemble de ces données (et plus encore, cette liste n’étant pas exhaustive), il s’agit pour chaque organisation d’être en mesure d’identifier la data, de la faire remonter, de la traiter et d’en présenter des bilans à travers des indicateurs.
Ce bilan des émissions de gaz à effet de serre n’est pas le seul concerné par la directive CSRD. D’autres données environnementales seront prochainement demandées aux entreprises françaises : celles liées à l’énergie (intensité énergétique des activités notamment) ; celles liées à la biodiversité (part de la surface réservée à la nature, part du chiffre d’affaires dans des activités ayant un impact négatif sur la biodiversité des zones sensibles) ; celles liées à l’économie circulaire, à la gestion de la consommation d’eau, à l’efficacité des déplacements des salariés de l’entreprise…
Cette somme considérable de travail a donc été analysée lors la réunion de la DFCG, la première du genre réunissant la commission RSE. Tour à tour, le contexte (1), la réglementation (2), le rôle du DAF (3) et la construction d’une stratégie (4) ont été abordés en détails avec les spécialistes de Deloitte dont le département dédié à ces questions comprend 200 experts dont plusieurs basés dans la région Méditerranée. Les interventions étaient assurées par Sophie Blond-Devernay, directrice Deloitte Sustainability France, Pablo-Alain Serey, expert RSE et Développement durable (Deloitte Sustainability France), Elizabeth Maunier-Linssen, associée Audit Méditerranée (Deloitte & Associés) et Clement Limare (Energie et climat senior consultant chez Deloitte)
Mieux vaut agir dès à présent pour limiter les risques
(1) Le contexte ESG. La performance sociale est globale. Elle est liée à la performance financière. A noter que toutes les entreprises notées “aaa” au CDP (anciennement Carbon Disclosure Project) sont en surperformance de 17% par rapport aux entreprises moins bien notées. La décarbonation est plus facile à réaliser aujourd’hui, compte tenu de l’impact du climat sur le monde agricole et d’autres secteurs et entreprises. Des perturbations de plus en plus fortes sont attendues sur les chaines d’approvisionnement, sur les transports. Les risques physiques vont s’accumuler entrainant des hausses de cours et des coûts d’assurance. Il y aura en outre une pression accrue des parties prenantes imposant par tous canaux des critères RSE de plus en plus drastiques. La prise de conscience doit être globale, mobilisant les investisseurs, les assureurs, les employés, les assureurs les partenaires économiques et la jeunesse. Une étude du World economic forum indique que les dirigeants d’entreprises placent le climat dans les risques les plus hauts.
(2) La réglementation. Bien plus que l’IFRS et les normes américaines, le Pacte vert – Green deal européen s’impose avec deux normes phares : un, la CSRD en 2024, deux, la taxonomie depuis deux ans. Cette dernière vise la transparence et gestion des risques pour canaliser les investissements vers la transition durable. Le champ est large. Déjà des normes sectorielles, parallèles à la finance existent, dans le bâtiment et les transports. Une taxonomie verte 2021 dresse une liste d’activités concernées. Les entreprises doivent y décliner leur chiffre d’affaires, leurs dépenses d’exploitation (opex) et leurs investissements (capex) et étudier leurs paramètres. Pas si simple dans la définition, surtout en amont de la chaine de valeur, selon les usages aval. La CSRD a pour ambition de normer et fiabiliser les informations autant que les états financiers. C’est une première dans le monde. L’Efrag (European Financial Reporting Advisory Group, groupe consultatif) a été missionné pour définir les normes avec un principe de double matérialité et un alignement avec l’Accord de Paris. La CSRD fait suite à la DPEF actuelle (déclaration de performance extra financière, sans chiffres et déclarative). Le périmètre des entreprises soumises est étendu et la mise en place rapide.
Les directeurs financiers : reporting et stratégie
(3) Le rôle des DAF. Les directeurs financiers seront très impliqués dans ce qui est une véritable révolution ! Le gros travail est global avec des enjeux RSE imbriqués et une influence indéniable sur les business models. Il y a des besoins de compétences, de process, de contrôle avec différentes unités à suivre. C’est une stratégie plus qu’un reporting qui doit être mis en place en priorisant. Le directeur financier sait déjà piloter les données. La CSRD va ajouter d’autres dimensions. Les contrôleurs de gestion sont appelés en renfort, eux qui ont déjà l’habitude de travailler les datas avec tous les services. Il s’agit de chiffrer les actions, les leviers et les gains.
(4) La stratégie climat. Elle nécessite de s’investir : former les équipes (cf Fresque pour le climat.), engager le top management (objectifs de climat et d’émission sur l’intéressement du management) et toute la gouvernance. La stratégie se décline en quatre étapes : 1. Poser les bases avec le bilan carbone avec les scopes 1 et 2 (émissions directes) et aussi 3 (émissions indirectes, dominantes dans la masse, 11 fois en moyenne ! ) 2. Construire un Plan de décarbonation. 3. Le mettre en œuvre, collecter la donnée. 4. Le suivre dans le temps.
L’Ademe peut évaluer le bilan carbone des entreprises. Réduire de minimum 90 % les emissions de GES d’ici 2050. avec des jalons à court terme (par la sobriéte, l’efficacité énergétique, transition écologique. Les 10% résiduels seront à séquestrer avec un traitement technologique. Pour faire les choix d’investissements. Il s’agit de faire des budgets carbone par activités ou filiales ou investissements. La taxation va s’étendre et les écoscores se développer. Les appels d’offres publics ou privés discriminants seront discriminants avec sélection des fournisseurs grâce à des outils comme le SBTI (Science Based Targets), l’organisme de certification de la décarbonation qui vises l’alignement avec l’accord de Paris sur le réchauffement climatique adopté en 2015.
Toutes ces questions seront au coeur des débats lors des premières Rencontres de la finance verte organisées par Gomet’ le 24 novembre prochain. Inscrivez-vous !
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