C’est dans l’antre du Dernier Cri, maison d’édition d’art installée dans La Friche Belle de mai, que Frédéric Clavère et Sylvie Reno exposent quelques travaux récents : grands formats, petite série et installations sous le titre Bourreaux des cœurs. Jusqu’au 15 mars 2018.
Avec un tel titre – Bourreaux des cœurs -, on pourrait y voir un pied-de-nez à l’événement MP2018 Quel Amour ! « Pas du tout, je n’étais même pas au courant… » s’étonne Frédéric Clavère. Hasard anecdotique du calendrier. En tout cas, si la déclaration d’amour de Frédéric Clavère à l’art a pu parfois surprendre, elle est toujours aussi entière, faite de recherches approfondies et méticuleuses qui vont bien au-delà des références aux comics que l’on voit au premier regard dans certaines de ses œuvres exposées ici.
Il faut, pour cela, regarder son œuvre depuis les années 80. L’artiste maîtrise les techniques picturales mais également les codes iconographiques à travers l’histoire de l’art pour exprimer l’un des sujets les plus récurrents dans l’art, religieux comme profane, depuis le Moyen-âge : la violence. Celle qui règne en maître chez l’humain depuis la nuit des temps, celle qui pousse à la torture des corps, à l’extermination, à la guerre, aux châtiments, celle qui se donne des airs de justice, d’instinct de survie pour écrire les pages les plus sanglantes de l’humanité. Celle qui, telle une demoiselle d’honneur, sert si bien la mort. De ce travail croisé entre l’histoire de l’art et l’histoire tout court, Frédéric Clavère fabrique des images, des mises en scènes. « Avant, c’était moi, je jouais comme un rôle, volontairement grotesque parfois. Maintenant, c’est ce squelette que j’ai dans mon atelier », entouré d’horloges à coucou, de serpents à sonnette ou autres objets de passion, telle une vanité.
L’artiste nous offre un univers mental dans lequel le corps est mis dans tous ses états. Collectionneur passionné d’ouvrages sur les langues, ce n’est pas un hasard s’il introduit désormais des lettres, des mots, des écritures. Et qu’importe si vous ne saisissez pas tout le sens de ce qu’il veut partager avec le public-spectateur-voyeur, l’essentiel est d’embarquer dans cette narration surréaliste et d’en apprécier les détails. Comme devant cette superbe réappropriation de la Mort du Centaure, une miniature réalisée par Robinet Testard pour le Livre d’Heures de Charles d’Angoulême, qui mesure là 1,75 mètre par 1,20 mètre.
Sylvie Réno, elle, est sculptrice et son matériau de prédilection est le carton. Beige, à l’état brut, elle y découpe au scalpel de chirurgien les éléments symboliques des sujets qu’elle affectionne, ou dénonce, comme le pouvoir de l’argent, les agents de la dépression… En petit et grand format. Là, sa série de cœurs cendriers côtoie deux pièces magistrales : une chaise électrique et une guillotine.
Tous, bourreaux des cœurs.
Informations pratiques
> Bourreaux des cœurs – jusqu’au 15 mars 2018 – Entrée libre
> Le Dernier Cri – Friche Belle de mai – 41, rue Jobin, Marseille 2e
> du lundi au vendredi de 10h à 12h et de 14h à 18h, samedi et dimanche de 13h à 17h
> Site internet : www.lederniercri.org