Le cœur et la raison
Bruno Gilles est de retour, après une longue convalescence. Son cœur bat à nouveau très vite. Notamment pour Marseille. Le sénateur LR souhaite du coup que du sang neuf vienne alimenter l’organe municipal, la mairie. Et d’appeler sans détour excessif, Jean-Claude Gaudin à confirmer, au pire au mois de septembre, quel successeur il désigne ou pour le moins celui qui a sa préférence. Gilles avait cru comprendre, il est vrai, il y a un peu plus d’un an, qu’il était l’héritier possible. Las, alors qu’il passait sur le billard pour une douloureuse transplantation, il apprenait par ses amis que l’ancien vice-président du Sénat se faisait prier pour confirmer l’onguent qu’il avait semblé répandre sur son front. Pourquoi aujourd’hui Gilles veut accélérer le processus ? Pour couper l’herbe sous les pieds de nombreux prétendants, pour éviter de se laisser piéger par Wauquiez qui s’éloigne du centre et croit pouvoir siphonner l’extrême droite, pour ne pas attendre le verdict des européennes, élection incertaine pour les Républicains. Gilles sait tout cela et surtout que les élections municipales dans les grandes villes se jouent en partie sur la conjoncture. Quelle sera-t-elle en 2020 ? Audacieux celui qui en a la certitude. La raison veut que l’ancien maire du 3e secteur de Marseille ne s’assied pas au bord du Vieux-Port, pour attendre de voir passer le cadavre de ses ennemis. Il est prêt ici et maintenant à s’embarquer sur le ferry-boat. Destination : mairie de Marseille.
Fusion et confusion
La fièvre s’est emparée de tous les corps de municipaux. La Provence titre même à la Une que cette partie non négligeable de la population locale (12 000 titulaires) est « en fusion ». Ce n’est pas encore l’Etna ni le Vésuve, mais ça sent fort le soufre. Des cantines aux bibliothèques, des policiers aux plantons, des communicants aux chauffeurs, chacun y va de ses trémolos, ses craintes, ses hantises. Au commencement, dit-on ici et là, il y a ces foutues 40 heures travaillées en moins pour les Marseillais, par rapport aux municipaux de France et de Navarre. Mais on serait bien naïf de désigner cette exception marseillaise comme la seule source de l’atmosphère anxiogène détectée par les observateurs. Confusément, ou avec réalisme, nombre d’employés de la mairie de Marseille savent que les temps ont changé. Qu’il y a comme quelque chose d’obsolète dans le système sur lequel ils ont prospéré. Que Force Ouvrière qui régnait en second maître sur ce navire, aura du mal à confisquer la barre au-delà des élections professionnelles de septembre. Que le paternalisme qui faisait loi depuis plusieurs décennies touche à sa fin faute de financements miraculeux. Il va y avoir des lendemains qui déchantent même si quelques-uns menacent encore de faire grève. Pas sûr qu’ils soient accueillis avec des lauriers.
Festival du rire au Vélodrome
Il y a plus que de l’ironie dans la programmation cinématographique que nous propose le stade vélodrome les 11, 12 et 13 juillet prochains. Jugez plutôt. On donnera en plein air pour 2 500 spectateurs et sur écran géant : « Les dents de la mer », « Fast and furious » et enfin « Jurassic World ». Pour le premier on voit bien l’allusion aux requins, et Dieu sait qu’ils sont nombreux à vouloir préempter notre littoral, nos anciennes bastides ou encore des pitons imprenables avec vue sur la Méditerranée. Pour le deuxième, l’actualité récente nous indique qu’ils sont pléthores ici les fous de la gâchette ou les dingues du volant. Pour le troisième enfin, on va penser aux dinosaures qui squattent encore les palais de la République et que seules une comète pourra déloger ou atteindre. Mais enfin comme on le dit à la fin des génériques : toute ressemblance avec des personnages existants ou ayant existé ne peut qu’être fortuite.
80 oui mais en ville
Le Premier ministre a pris la tête d’une nouvelle croisade, contre la vitesse mortifère qui accroît chaque année la liste des morts et des éclopés de la route. Ce 80 kilomètres heure à ne pas dépasser, n’empêche pas les démagogues de droite et de gauche de franchir la ligne jaune, pour juger cette nouvelle mesure liberticide. A regarder de près les tracés visés et à les comparer avec les bilans chiffrés, on se rend compte que ce sont les départements les plus ruraux et les moins habités qui payent un très lourd tribut, dans cette France accidentogène. Pour les villes on sait que les plus avisées ont décidé de faire de même en faisant tomber la vitesse de 50 à 30 km/h. On en est encore loin à Marseille, malgré la présence d’écoles, de stades, de passages pour piétons… la ville porte un bonnet d’âne en termes de pistes cyclables et les piétons doivent quasiment présenter des excuses, lorsqu’ils s’engagent, au vert, sur un passage qui leur est réservé. En ce mois de juin, une partie du Vieux-Port aura été interdit un soir à la circulation. C’était ce dernier vendredi pour la Formule 1. Un signe !
Un barreau à 42 millions
Dans sa dernière livraison le magazine du Conseil départemental, Accents de Provence, nous donne à voir sur une très belle double page une photo aérienne. Elle nous montre de manière spectaculaire le « barreau » autoroutier qu’il manquait, pour qu’Aix et Vitrolles soient à quelques dix minutes l’une de l’autre. Ce sont 40 000 véhicules, nous dit la légende de ce document, qui utilisent quotidiennement cet axe. Il relie l’A51 à l’A7 et la gare TGV à l’aéroport. Le département aura injecté 42 millions pour ce chantier qu’il décrit comme colossal. Il est vrai que tout a été fait pour préserver intelligemment l’environnement, la faune et la flore du plateau de l’Arbois, que la saignée ferroviaire a marqué durablement. Ce que dit aussi la photo, c’est qu’il y avait là des résidences cossues, toutes ou presque, dotées de piscine. Ce que ne dit pas la légende, c’est que se trouvaient aussi là les plus pugnaces opposants à ce tracé. Ils ont retardé de longues années durant la réalisation de cet outil indispensable car la route départementale était une des plus accidentogènes du 13. Evidemment tout ça c’était avant.
C’est un trou de verdure…
En cette fin d’année scolaire, il y a des moments qui valent toute la fraîcheur des sources. Les enfants mettent leurs plus beaux tee-shirts blancs et se réunissent en chorales. Comme celle que nous avons pu entendre dans une jolie école proche de Luminy (Valmont-Redon). Et parce qu’il y a des professeurs talentueux, ils chantent des paroles qu’il faut entendre. On y parle d’amour, de fraternité, d’écologie, tout ce qui manque cruellement en ces temps difficiles à une partie du monde. Et alors que M. Trump, Donald de son prénom, joue les méchants canards noirs là-bas dans ce pays dit de liberté, des petits Marseillais ont entonné « Diego » de Michel Berger. Les enfants, sous la baguette d’une maîtresse, ont entonné cette chanson comme une savoureuse gourmandise. Nous on pensait à ces gamins privés de leurs parents, parce qu’un président décoloré veut caresser dans le sens du poil les pires de ses électeurs. L’institutrice marseillaise s’appelle Stéphanie et elle a présidé ce moment rare où des enfants portent les plus beaux des messages.