« Non au carnage patrimonial ! » Dans une lettre ouverte adressée à Françoise Nyssen, la ministre de la Culture, et publiée dans Libération vendredi 11 août, un collectif composé de plusieurs élus, associatifs, personnalités du monde de la culture et des sciences (liste complète ci-dessous) appelle les autorités à la création d’un jardin des vestiges et la reconnaissance du site de la Corderie comme un « bien commun ».
« Madame la Ministre, Vous connaissez sûrement cette célèbre citation de Winston Churchill : ” Un peuple qui oublie son passé se condamne à le revivre.” Nous connaissons votre attachement à l’histoire, à la culture et à la valorisation du patrimoine culturel. Aussi, nous souhaitons revenir sur la découverte à Marseille d’un site archéologique exceptionnel (reconnu comme tel par beaucoup d’archéologues professionnels), boulevard de la Corderie. Il s’agit d’une carrière et d’une cité antique datant du V° siècle avant J.C. Nous vous sommes reconnaissant d’avoir décidé de classer Monument Historique une partie de ce site le 21 juillet. » Mais pour les signataires, parmi lesquels les députés européens Europe Ecologie Les Verts Michèle Rivasi et José Bové, le député des Bouches du Rhône Said Ahamada (La République en marche) ou l’astrophysicien Jacques Boulesteix, ce premier geste des autorités n’est pas suffisant.
« Ne laissons pas enfouir sous le béton, une partie de notre mémoire collective. »
« Toutefois, nous souhaitons par cette lettre vous demander le classement au titre de monument historique de la totalité des 4 000 m² mis au jour par les fouilles archéologiques, après toutefois avoir procédé à des sondages archéologiques destinés à délimiter scientifiquement le périmètre de la zone à préserver » soutiennent les signataires qui rappellent qu’André Malraux « il y a 50 ans avait permis de sauver la découverte du port antique de Marseille à la Bourse et avait empêché la réalisation d’un parking de 2000 places permettant la réalisation du jardin des vestiges derrière le Vieux-Port. »
La lettre ouverte se poursuit en citant d’autres références historiques : « Nous exigeons par conséquent le retrait définitif du permis de construire d’un immeuble de standing par le promoteur Vinci sur ce site archéologique. Il doit rester le témoin pour tous les Marseillais et ses visiteurs des origines de la cité phocéenne. Mahatma Gandhi disait : ” Il faut être fier d’avoir hérité de tout ce que le passé avait de meilleur et de plus noble. Il ne faut pas souiller son patrimoine en multipliant les erreurs passées. Soyons à la hauteur de nos responsabilités. Ne laissons pas enfouir sous le béton, une partie de notre mémoire collective. Œuvrons pour la réalisation d’un jardin des vestiges digne de ce nom, ouvert à tous les citoyens. »
Réunion en préfecture à la demande de la députée Claire Pitollat
Une réunion est annoncée en préfecture des Bouches-du-Rhône le 31 août pour faire point sur le dossier. Cette réunion, qui se tient à la demande de Claire Pitollat, députée (LREM) de la 2ᵉ circonscription des Bouches-du-Rhône, rassemblera la Ville de Marseille, les élus concernés, la direction régionale des affaires culturelles (Drac), le constructeur et les comités d’intérêt de quartier. Elle aura pour but d’expliquer le dispositif de conservation élaboré par le service régional de l’archéologie de la Drac et de permettre le démarrage des travaux en toute connaissance de cause. Dans cette attente, Vinci Immobilier et Adim Provence ont décidé d’interrompre les travaux sur le site.
Les signataires :
Olivier Agullo (enseignant chercheur), Saïd Ahamada (député de Marseille, LREM), Ariane Ascaride (comédienne), Sébastien Barles (collectif citoyen Marseille en commun), Félix Blanc (enseignant chercheur à Marseille, militant associatif), Jean-Marcel Bouguereau (journaliste, ex-rédacteur en chef de Libération, de l’Evénement du jeudi et du Nouvel Obs), Jacques Boulesteix (astrophysicien, ancien élu de Marseille), José Bové (député européen, écologiste), Jean Canton (architecte, urbaniste, ex-président d’Un centre ville pour tous), Madeleine Chiche (danseuse, chorégraphe, groupe Dunes), Hubert Colas (auteur de théâtre, metteur en scène et scénographe), Jean-Marc Coppola (conseiller municipal de Marseille, président du groupe Front de gauche), Emmanuel Delanoy (directeur de l’Institut Inspire), Nouriati Djambae (conseillère métropolitaine Aix Marseille Provence), Olivier Dubuquoy (géographe, documentariste, lanceur d’alerte sur les boues rouges), Jacqueline Durando (ex-élue chevènementiste de Marseille), Florence Ernst (comédienne, metteuse en scène), Philippe Foulquié (fondateur de la Friche la Belle de Mai), Vincent Geisser (sociologue et politologue, chercheur au CNRS et à l’Institut de recherches et d’études sur le monde arabe et musulman), Robert Guédigian (cinéaste), Nassurdine Haidari (ex-élu socialiste de la ville de Marseille, président du Cran Paca), Pascal Hennequin (Fokus 21), Samy Joshua (militant associatif et politique), Christine Juste (porte parole EELV Paca), Raphaël Liogier (sociologue et philosophe, professeur à l’IEP d’Aix en Provence), Chantal Marcel (association Fare-Sud), Cesare Mattina (sociologue, maître de conférence à l’Université Aix-Marseille), Zoubida Meguenni (militante associative, co-fondatrice du collectif des quartiers populaires, spécialiste de la politique de la ville), Bernard Misrachi (chorégraphe, groupe Dunes), Laurent Mucchielli (sociologue, directeur de recherche au CNRS), Alain Nicolas (anthropologue et préhistorien, ancien conservateur en chef des musées de France), François Pecqueur (président de l’ONG Nation Ocean, animateur du collectif La Belle Démocratie), Christian Pellicani (conseiller du premier secteur de Marseille et conseiller métropolitain, Front de gauche), Gérard Perrier (militant associatif, ex professeur au Lycée du Rempart), Philippe Pujol (journaliste, écrivain, lauréat du Prix Albert Londres 2014), Michèle Rivasi (députée européenne du grand sud est, écologiste), Marianne Ruelle (Marseille autrement), Régis Sauder (cinéaste, documentariste), Kevin Vacher (doctorant en sociologie, militant La France insoumise), Marie-Christine Vergiat (députée européenne, Front de gauche)