« La culture est un temps de pause où l’on peut réfléchir », d’où l’importance qu’il donne à l’accès au théâtre pour tous. Lui, c’est Richard Martin (à droite sur notre illustration, Roland Gori à gauche), directeur du théâtre Toursky, situé dans le 2e arrondissement de Marseille. Il était invité par le collectif Roosevelt qui organisait le 17 juin à la Maison de la Région, un débat sur le thème : « Le gouvernement néolibéral : normes, performances, soumission ». Avec le psychanalyste et professeur à Aix-Marseille Université, Roland Gori, ils sont revenus sur les aspects de ce système économique, devant un public soucieux de ses conséquences sur la vie de tous les jours.
« C’est vraiment une vision du monde. Rien ne saurait échapper à une grille économique » déplore Roland Gori. Lui et Richard Martin dénoncent cette promotion de l’économie de marché dans tous les domaines, imposée par les logiques néolibérales. Le metteur en scène ajoute : « Dans la culture, sous prétexte qu’on vous donne de l’argent, nous devons remplir des tas de cases, donner des chiffres. Si je les écoute, je ne diffuse dans mon théâtre que ce qui est rentable et je laisse de côté certaines oeuvres ». Richard Martin voit sa mission ailleurs. On se souvient, quand, en 2009, il avait fait une grève de la faim lorsque la Drac (Direction régionale des affaires sociales) a décidé de supprimer la subvention, qui lui permettait de proposer des tarifs réduits aux habitants des quartiers Nord de Marseille.
Les deux intervenants sont d’accord pour dire qu’à terme, ces méthodes menacent la démocratie. Des personnes du public soulignent d’ailleurs les exemples actuels de la Grèce qui fait face à la Troïka (l’alliance de la Banque centrale européenne, de la Commission européenne et du Fonds monétaire international pour gérer les crises des États européens) et du parti politique citoyen qui émerge en Espagne, Podemos. « Les méthodes d’austérité en Grèce ne sont que des moyens de coloniser les esprits en terme de compétitivité », renchérit le psychanalyste. À quoi, l’homme de théâtre répond de manière enflammée, « Résistons !».
Des universités populaires au théâtre Toursky
Pour résister, il résiste, Richard Martin. Pour lui, c’est par ce genre de moments que les choses avancent. Il dit vouloir prendre le temps d’échanger avec le public, car c’est avec les citoyens que le changement peut venir et non des politiques dont il n’attend rien.
Il organise à son niveau, des universités populaires au sein de son théâtre. Toujours dans cette démarche de transmettre à tous des savoirs, qu’ils soient théoriques ou pratiques, il invite tous les Marseillais à venir y assister. Elles abordent différentes thématiques, comme la guerre, la liberté, la poésie, ou encore la politique. Tout le programme et les dates sont à découvrir sur le site du théâtre Toursky.
Lors de cet échange il a été également question de perte de valeur au profit du «New Public Management», aujourd’hui de plus en plus au cœur du pouvoir. Les deux hommes dénoncent le fait que l’État soit devenu un « entrepreneur à part entière, qui développe des valeurs d’entreprise à tous les niveaux ». Le pouvoir politique aurait laissé de côté la promotion de la culture et des valeurs en faveur d’une logique toujours plus libérale. « Un désenchantement au milieu duquel les groupes terroristes arrivent à tirer parti de la situation », conclut Roland Gori.