Marseille scène électro ! Après Marsatac et le Delta Festival, voici Marseille Music Experience (MMX), le nouveau-né de l’alliance entre les équipes d’Acontraluz et WeArt. Cette union offrira dix jours de musique, de fêtes dans plus de quarante lieux de la ville pour un finish qui s’annonce grandiose.
La 6e édition de We Are Together devait être la dernière, « nous étions arrivés à la fin de notre concept et de nos possibilités » selon Jonathan du collectif marseillais. Et pourtant quelques mois après la fin de l’aventure, les voici de retour derrière la table des organisateurs à défaut de celle de mixage, en compagnie de Dominique Lena et Marc Crousillat.
Après un coup de foudre artistique, et humain, les deux équipes se sont associées afin de faire naître un tout nouveau style de festival en France, mais inspiré de ce qu’il se faisait déjà aux Pays-Bas avec Dance Event où ce sont plus de 150 lieux et 350 000 personnes qui investissent la ville batave. Même si ces chiffres font rêver les équipes, Jonathan recentre le débat « WeArt s’est arrêté, car on ne voulait plus faire la course au nombre de billets vendus, on souhaite mettre en place un développement transversal, car la musique n’est pas que des concerts, c’est aussi des rencontres » des conférences et des master class.
Donner de l’impulsion à une culture électro encore plus vive
Car, outre investir différents lieux de la ville, la collaboration souhaite donner l’impulsion à une culture électro encore plus vive et installer un « mieux-vivre ensemble » de la musique dans le sud. Et pour ça, la villa Gaby deviendra un grand workshop où les artistes pourront rencontrer des labels, mais surtout la ville entière pourra vibrer au son des basses au cours des cinquante événements prévus du 7 au 17 septembre 2017.
Doté d’un budget de 900 000 euros dont la quasi-totalité servira à l’organisation des deux soirées clôturant le festival, Marseille Music Experience souhaite faire vivre un moment unique à ses participants, car un tel événement n’est plus jugé seulement sur les lieux ou à la taille du mur d’enceinte, « nous voulons que les festivaliers utilisent leurs cinq sens, nous allons mettre en place différentes surprises à l’aide de start-up locales. »
30 000 festivaliers espérés
Mais l’expérience réside aussi dans la programmation. Si les premiers noms seront divulgués le 10 juin, une chose est certaine : le 15 septembre revêtira des accents hip-hop, quand le samedi 16 septembre s’articulera autour de l’électro et de la techno. Avec pour objectif de rassembler entre 7 et 10 000 personnes à chacune de ces deux soirées, sans oublier la dizaine de milliers de participants tout au long des dix jours. Le cumul espéré, autour des 30 000 festivaliers, ferait entrer le festival parmi les plus importants de la scène électronique française, mais cette première ne cherchera pas à battre des records puisque la volonté reste de s’inscrire dans la durée et Marc Crousillat de conclure : « Pour construire des choses stables, il faut du temps ».
Marc Crouillat : « Nous avons de nombreux autres projets avec WeArt ! »
Interview de Marc Crousillat et Dominique Lena, autour du prochain Marseille Music Experience et sur leur collaboration avec le collectif marseillais.
Gomet’ : Bâtir un tel projet n’est-il pas difficile ?
Marc Crousillat : On s’aperçoit que plus on rencontre de gens, plus on discute et plus il y a de choses à faire. Il faut simplement qu’elles se fassent, et laisser le temps de monter les événements. Puis il y a toujours un petit problème de confiance, qui fait que les gens attendent de voir. On se rend compte que le potentiel est énorme, je ne sais pas si c’est notre âge, mais on a compris qu’il y fallait un volet économique conséquent. Sans ça, le MMX resterait un papillon de nuit.
Quel est ce volet économique ?
M. C. : Cela viendra, tout d’abord de commerçants qui travaillent bien dans toute la ville, puis du tourisme. Je suis spécialiste depuis de nombreuses années dans les congrès médicaux, j’ai aussi longtemps organisé le World Series 13 de beach-volley donc je connais le tourisme d’affaires mais aussi sportif. Chacun de ces secteurs génèrent des flux de vacanciers. Actuellement toutes les mairies se battent pour attirer les congrès médicaux car un congressiste dépense entre 200 et 250 euros par jour dans une ville, alors multiplié par mille ça fait 250 000 euros en une seule journée. Maintenant, ce réflèxe de batailler pour attirer un nouveau genre de tourisme commence à arriver pour la musique aussi. Faire venir des touristes est clairement notre objectif, car il y a ici de multiples propositions de sorties à des prix raisonnables, tout en étant extraordinaire. La jeunesse actuelle n’a plus forcément les mêmes aspirations que l’ancienne, elle ne veut plus dépenser 500 euros dans la soirée en allant à Saint-Tropez. Nous cherchons un tourisme un peu plus authentique, sans critiquer ce qui se fait ailleurs.
Quel profil de touristes visez-vous ?
M. C. : Déjà, il est nettement moins identifiable que celui des congrès médicaux. On va sans doute s’adresser à des personnes âgées entre 20 et 35 ans. Après cela dépend beaucoup de la programmation. Puis c’est une première expérience, en fonction de ce qui a fonctionné cette année, on fera des ajustements. Aujourd’hui, à ce niveau, on ne sait pas trop où on va, mais cet aspect économique reste quelque chose d’important.
Comment s’est passé la rencontre avec le collectif WeArt ? Et la collaboration ?
M. C. : Il y a eu des échanges, il y a quelques mois. La première fois, on a appris à se connaître, puis la deuxième rencontre a permis de casser les barrières. Ce n’est pas parce que j’ai un costume qu’il m’est impossible de parler de musique, et ce n’est pas parce que tu as un tee-shirt que tu ne peux pas parler de business. Puis la troisième fois, on est reparti à minuit avec une bouteille sous le bras, et on s’est dit qu’on voulait faire quelque chose ensemble. Ce n’était pas gagné, car on n’a pas toujours envie de monter un événement avec tel ou tel groupe, mais il y a eu un bon feeling, puis chacun apporte à l’autre. Ils nous apportent une culture musicale acquise sur vingt ans, puis en raison de nos âges et notre expérience, nous leur apportons des choses qu’ils n’ont pas comme par exemple rendre n’importe quel lieu propice à accueillir du public. Nous avons eu l’expérience de la fan zone de Marseille. Mais nous n’allons pas nous arrêter à ce festival, nous souhaitons poursuivre ce travail sur d’autres projets.
Quels sont justement ces autres projets ?
Dominique Lena : Il n’y a plusieurs dans les cartons, pas dans le même esprit, mais on veut vraiment continuer cette collaboration. On a vraiment matché avec eux, on a vraiment accroché, on réalise un travail très complémentaire. On organisera d’autres soirées, pas sur le thème MMX. Par exemple, ça peut être l’organisation d’un pique-nique électronique dans un parc. On a des lieux magnifiques à Marseille, donc autant en profiter. On aimerait investir des lieux totalement inexploités et atypiques pour que WeArt y amène sa communauté. Voilà ce qu’on va mettre en place.
Comment se compose votre budget (900 000 euros) ?
M.C. : On a environ 18% d’aides publiques, on a bien évidemment des partenaires privés et on continue d’en chercher car il est terminé le temps où les pouvoirs publics apportaient 50% de l’enveloppe finale. La billetterie représente un peu moins de la moitié, autour des 40% du budget final. Cette année, on va aussi mettre l’accent sur le packaging autour de l’événement. En résumé, quand un spectateur achète un billet pour la soirée de clôture, il faut lui vendre des cocktails, mais aussi des produits autour du festival.
Combien de personnes travaillent sur l’organisation du MMX ?
D. L. : Entre nos salariés et ceux de WeArt, il y a une petite dizaine de personnes mobilisées sur le projet. Pour atteindre 250 à 300 salariés, lors de l’événement. Il n’y aura quasiment pas de bénévolat, pas plus de dix personnes. On n’est pas dans cette démarche, car pour avoir un travail professionnel et de qualité, il faut rémunérer les gens. Le bénévolat a ses limites. Et même si on prend un grand risque, car on avance tous les ans de l’argent sur l’organisation, nous relevons le défi.
Quels sont les montants des cachets versés ?
M. C. : Il n’y a aucune règle quant à la rémunération des artistes. Pour vous donner un ordre d’idée, on a offert plus de 150 000 euros à Justice, ils ne nous ont même pas répondu… Certains ne vont faire que dix dates par an et ils exigent des sommes très importantes. Puis il y a des artistes à 20 000 euros, ou même entre 8 et 12 000 euros, qui font de superbes prestations, tels qu’Amine Edge and Dance ou Kenny Dope. Il ne faut pas oublier les têtes d’affiche qui font vendre des billets, et surtout composer entre ceux qui montent et les valeurs sûres, tout ça est compliqué. C’est pour ça qu’il faut des professionnels, d’où la présence du programmateur, c’est un vrai métier.
La scène marseillaise sera présente ?
D. L. : Il y en a toujours eu avec Acontraluz, donc aucune raison que cela change. Il y en aura chaque soir du festival. La scène locale est de très bonne qualité, qu’elle soit électro ou non. Les festivals comme le nôtre permettent de pousser les jeunes groupes, grâce au début de soirée. Ils prennent ainsi de l’expérience et un peu de lumière. Puis après quelques années, ils reviendront chez nous après avoir fait leur apprentissage, pour enflammer le public.