Le quartier du Mistral, son bar, ses accents, ses senteurs, ses couleurs… et ses habitants qui font figure d’irrésistibles provinciaux résistant depuis dix ans à la domination parisienne. C’est à cela aussi que pourrait faire écho le succès de Plus belle la vie. Car si l’Île de France concentre 90 % des activités françaises liées à la production audiovisuelle et cinématographique, c’est bien à Marseille, dans les 6 000 m² de studios du Pôle Média de la Belle de Mai, que sont tournées les scènes qui réunissent quotidiennement sur France 3 cinq à six millions de téléspectateurs. Et c’est toujours dans la cité phocéenne, sur l’esplanade du J4 cette fois-ci, que seront célébrés, mardi 9 septembre 2014, les dix ans du soap opera marseillais, en présence notamment de Rémy Pflimlin, président de France Télévisions (diffuseur), Christophe Nobileau, président de Telfrance (producteur), Jean-Claude Gaudin, maire de Marseille, et des comédiens.
PBLV : pas d’équivalent en France
Quelle autre série française enracinée en province peut ainsi se targuer d’avoir réuni de tels invités à sa fête d’anniversaire ? À en croire Manuel Raynaud, créateur du site Spin Off et tenancier du blog Dimensions Séries pour Arte, « Plus belle la vie n’a en France pas d’équivalent, aussi parce qu’elle est la seule à jouer dans la catégorie des soap », c’est-à-dire de ces feuilletons constitués d’épisodes courts diffusés quotidiennement, souvent centrés autour d’un quartier ou de familles. L’histoire des soap montre, en effet, que le public national n’est jusqu’alors que peu réceptif à la fiction télévisuelle française : Châteauvallon (Antenne 2), Riviera (TF1), Cap des pins (France 2), Seconde Chance (TF1) ou encore Cinq sœurs (France 2), aucune de ces séries, qu’elles précèdent ou tentent d’imiter le succès marseillais, n’a vraiment rencontré l’adhésion du public. Et Sous le soleil, alors ? « Rien de comparable : il s’agit d’une hebdomadaire pour laquelle le processus de production reste profondément différent. » Or, les choix de fabrication des épisodes expliquent largement la réussite de ce programme. À l’échelle nationale, principalement.
Car si la série commence à éveiller les curiosités, en Europe et en Amérique du sud, elle apparaît comme une petite jeunette face aux productions anglo-saxonnes. Elle ne peut en aucun cas rivaliser avec les séries qui ont inspiré en 2004 sa création, à savoir, Coronation Street et EastEnders, deux soap opera britanniques créés dans les années 1960 et depuis diffusés sur les chaînes de nos voisins. Moins encore avec les succès américains. Les soap y ont été inventés, presque avec l’avènement de la télévision. Et le développement d’Internet et des supports mobiles leur a donné un nouveau souffle : il est vrai que la réactivité nécessaire à l’écriture des épisodes de ces feuilletons quotidiens, au fil aussi de l’actualité et des faits sociétaux, rencontre idéalement celle recherchée sur le web.
Sur ce point-là, Plus belle la vie semble n’avoir rien à envier à ses grandes sœurs américaines : la série s’appuie sur un site officiel, par ailleurs relayé par un site amateur, alimenté par des passionnés. Sa page Facebook compte plus d’1,4 million de mentions « j’aime » et presque 119 000 followers suivent son compte Twitter. Une réalité transmédia qui explique peut-être les options culturelles récemment prises par la Ville de Marseille.
Une vitrine pour Marseille
Mise en place du Bureau du cinéma en 1996, inauguration en juin 2004 du Pôle Média de la Belle de Mai, création de la Mission Cinéma le 1er juillet 2009 ou encore, organisation depuis 2011 du Marseille Web Fest, festival international de la web-série unique en Europe : la municipalité entend faire de Marseille une terre d’accueil des tournages de séries et de films. Et Plus belle la vie, comme nous le précise Charlène Grimaud, attachée de presse à la Direction de la communication et des relations publiques de la ville, est devenue la vitrine flamboyante de cette politique :
« La série illustre de manière très visible ces retombées économiques et en termes d’image que nous pouvons espérer grâce à notre engagement auprès des acteurs de l’audiovisuel et du cinéma. Nous accompagnons ainsi depuis une quinzaine d’années les productions sur un plan principalement logistique : repérage et prêt des sites de tournage, démarches administratives, mise en relation avec les professionnels locaux. »
Les séries Caïn et Crossing lines, entre autres exemples, ont également profité de ce dispositif. Afin d’enrichir ce dernier, de nouveaux projets devraient d’ailleurs être annoncés dès mardi 9 septembre 2014, toujours dans le sens d’un positionnement transmédia, parmi lesquels un Pôle Média II et des infrastructures consacrées au Motion Capture.
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(Crédit photo : Facebook/cc/PlusBelleLaVie Officiel)