Le 14 février 1976, sur la colline de Bouffan à Aix-en-Provence, le Premier ministre Jacques Chirac inaugure le centre architectonique imaginé par le pape de l’op art. Toute en cercles et carrés, blancs et noirs, visible de loin, cette construction est signée Victor Vasarely, qui fêtera quelques semaines plus tard son 70ème anniversaire.
Ce bâtiment-écrin, classé depuis 2013 “monument historique” reste une remarquable synthèse entre art optique et architecture alvéolaire. Ses découpages modulaires firent fureur dans la plupart des regards des décennies soixante et septante. Époque dite glorieuse pour l’industrie, la modernité et la croissance sans limite.
Venu à Paris, sans le sou , en 1930, de sa Hongrie natale, l’artiste racontera, quarante ans plus tard, à Gordes, son itinéraire plastique peu banal. S’appuyant sur un langage simple et coloré, issu de la publicité, il tentera de créer un vocabulaire universel, souple et ludique. Des abstractions géométriques indéfiniment répétables, permettant de constituer un “folklore planétaire”. Dans cette logique du trompe-l’œil, chevalet, peinture et paysage n’ont plus de place. Ces assemblages cubiques multicolores paveraient la voie vers le bonheur d’une cité polychrome, où les variations formelles seraient aussi accessibles à chacun que sa propre hygiène.
Roi de l’illusion
C’est aussi l’époque où l’américain Warhol se plaît à multiplier à l’infini les figures iconiques de Marilyn et de Mao. Ou le profil des boîtes de soupe.
Roi de l’illusion, Vasarely s’éteint en 1997. Le musée de Francfort vient lui consacrer une exposition et, à Paris, le centre Pompidou a pris la relève (jusqu’au 6 mai), avec trois cents originaux. Producteur en masse, l’inventeur à grosses lunettes déclarait: « Je ne suis pas pour la propriété privée des créations. Que mon œuvre soit reproduite sur des kilomètres de torchon m’est égal ! »
Aix ne pouvait rester à l’écart de ces hommages. Au récit illustré de la genèse de l’édifice-manifeste, – qui a failli, voici un demi-siècle, s’installer à Luminy ou Avignon – les héritiers ajoutent quelques axes d’une nécessaire restauration (jusqu’au 31 mars).
Impossibles à démonter, les façades ont été nettoyées sur place. Des filtres protègent les verrières originales, et il reste à traiter d’immenses panneaux intérieurs et les abords du parc environnant.
Petit-fils du maître, et légataire universel, Pierre Vasarely prévoit pour 2020 une extension souterraine d’un millier de mètres carrés, afin de pouvoir accueillir des expositions d’envergure. Ces deux phases de travaux coûtent plus de onze millions d’euros . La facture de 1976 s’élevait à 15 millions de francs. Autant dire que la “vasarelyte”, épidémie globale d’engouement pour le trouble visuel face aux formes basiques et colorées, n’est pas vraiment éteinte.
Liens utiles :
> “Une œuvre manifeste restaurée 1973-2018”, tous les jours, de 10 à 18h, 5 à 12€ l’entrée , jusqu’au 31 mars 2019. www.fondationvasarely.org
> Nos précédentes infos sur la Fondation Vasarely.