La démocratie à l’épreuve
Mad Mars, et les vingt collectifs marseillais qui aspirent à un changement radical de politique à Marseille, ont été rassurés par l’audience recueillie par ce mouvement encore en gestation. Des députés LREM, des socialistes, des écologistes, des communistes sont venus lors d’un rassemblement aux Docks dans des locaux qui se sont avérés trop étroits tant l’enthousiasme était patent. L’antienne de ce puzzle associatif, outre la volonté d’en finir avec le clientélisme, un pouvoir clanique et l’apartheid qui caractérise une partie de la gestion de la ville, c’est de redonner vie à la démocratie participative. Sophie Camard la députée suppléante de Jean-Luc Mélenchon était là et elle n’a pas découragé cette généreuse aspiration. Le leader de la France Insoumise était lui à Bruxelles pour réunir son petit groupe au parlement européen. Selon une indiscrétion publiée par le Canard Enchaîné il aurait fait une mise au point devant les Manon Aubry et autre Clémentine Autain : « Ceux qui veulent la démocratie dans le mouvement, ce sera sans moi ! ». Conclusion sans risquer le syllogisme : vu la vague associative qui pousse à Marseille vers ces rives démocratiques, les prochaines élections municipales marseillaises, ce sera donc sans lui.
Un hommage à RP
Jean-Claude Gaudin n’a jamais caché ses convictions religieuses. Pour lui un révérent père a toujours été plus précieux que tout autre mentor. Mais c’est un autre RP qui l’a fait trépigner d’impatience quelque huit ans durant à la porte du petit palais-mairie. Sans doute son pire ennemi : Robert P. Vigouroux. C’est vrai qu’en 1987 lorsqu’il succède à Gaston Defferre, Robert P. (ainsi affichait-il ses prénoms) semblait sorti de nulle part. Certains disaient même alors, à commencer par ses adversaires du PS, Michel Pezet et consorts, qu’il était une créature de François Mitterrand. La vérité est sans doute plus complexe et des fidèles comme Pierre Rastoin, l’un de ses plus efficaces adjoints sont là pour en témoigner. Neuro chirurgien de réputation internationale Robert P. Vigouroux était aussi un militant de longue date. Pezet qui avait combattu avec pugnacité Defferre alors ministre d’Etat ne pouvait que se heurter au président. On raconte que ce dernier l’avait alors prié d’attendre son tour ce que refusa l’avocat. Du coup il le vit passer. Pendant ce temps Vigouroux, aidé par sa très médiatique épouse Maryline, les communicants de l’Elysée, Pierre Berger et son éphémère magazine Globe fila bon train jusqu’à réaliser le Grand Chelem en 1989 (huit secteurs sur huit). Il fut dès lors un maire taiseux et bâtisseur. On lui doit le programme Euroméditerranée que Gaudin et ses amis ont prolongé sans barguigner. Le 19 juin on baptisera un amphithéâtre du nom de Robert P. Vigouroux. Outre la médecine et la politique il était un auteur heureux de roman policier et un peintre amateur jouissif. Jean-Claude Gaudin sera là et sans doute un peu las qu’on parle encore de son pire ennemi.
Les ampoules grillées
La lumière viendra-t-elle d’un leader politique pour le prochain scrutin municipal ? Rien n’est moins sûr. A gauche comme à droite tous les militants un peu avisés pointent la rangée de casseroles qui s’affiche dans les diverses cuisines électorales. On rappelle ici le passé guériniste de celui-là. On décline là le pédigrée gaudiniste de celle-là. On se souvient ici et là que celui-ci ou celle-là ont brillé des années ou des décennies durant par leur absence de vision, leurs tripatouillages comptables au sortir des urnes, leur parfaite ignorance (ou leur désintérêt) pour une partie de la réalité marseillaise. Du coup les lumières n’étant pas de ce siècle, on se tourne vers des éclairages encore tamisés mais qui pourraient se révéler vifs. On évoque ainsi la possibilité de voir émerger un médecin dans une ville où cette discipline est reine et où quelques praticiens se sont illustrés (Maurice Toga et Robert P. Vigouroux). Yvon Berland, président de l’Université d’Aix-Marseille aurait le profil. Il a réussi, ce qui n’était pas donné d’avance, à réunir les Universités (Provence, Cézanne et Méditerranée), achevant son mandat il est écouté en hauts lieux, à commencer par les patrons de La République en Marche. Emmanuel Macron doit venir en villégiature à Marseille cet été et il n’est pas exclu que les deux hommes échangent. Mais, comme en son temps Robert P. Vigouroux, Berland n’est pas bavard et il préfère l’action sans projecteur. Seule la lumière du grand large éclaire son bureau sur le promontoire du Pharo. On y distingue les immeubles d’Euroméditerranée et ceux des cités en détresse. Presque un programme.
La Shoah c’est pas un sujet
Denis Robert journaliste à Média – la rédaction est proche des Insoumis – connu pour ses talents d’investigateur est tombé sur un os. Ou plutôt un professeur d’économie marseillais dur d’oreille. Interrogé sur la réalité des chambres à gaz par lesquelles sont passées des centaines de milliers de victimes juives, Etienne Chouard à qui Robert demandait s’il avait un doute sur leur existence a eu cette réponse : « Mais qu’est-ce que c’est que cette question-là ? C’est pas mon sujet, j’y connais rien moi ? » Et de revendiquer dès lors, au nom d’une forme d’honnêteté intellectuelle et pour éviter d’être un « criminel de la pensée », le droit de ne pas savoir. Ainsi celui qui connait si bien nos institutions au point d’avoir souffler aux Gilets Jaunes l’idée d’un Référendum d’Initiative Citoyenne ne connait pas les pages les plus noires d’une Histoire encore contemporaine. C’est à désespérer du niveau requis pour enseigner dans le secondaire. Un chercheur tunisien nous expliquait un jour que certains islamistes refusaient de regarder l’histoire en deçà de 571 (Naissance de Mahomet). A Marseille il y a un prof qui n’a pas regardé en deçà du 1er octobre 1946 (fin du procès de Nüremberg). Quelques élèves devraient lui en parler.
C’est encore loin L.A.
Au siècle dernier, un brillant professeur de la Timone, Jean-François Mattei rêvait de faire de Marseille un morceau de Californie française. Inspiré sans doute par sa maison secondaire du Var, il voyait déjà comme à Bandol, Sanary, Bormes ou Saint Tropez, des plages au sable fin soignées, des allées de Laurier préservant l’intimité de chacun, des terrasses où l’on pourrait siroter moyennant quelques écus sa boisson préférée… Las tout cela s’est envolé avec le projet municipal d’alors recalé dans les urnes. Pourtant à y regarder de près une partie de ce songe éveillé est en train de se réaliser. Aux Catalans (photo), encore populaires, on attend le palais de verre conçu par l’anarchisant Rudy Riccioti pour quelques riverains argentés. A l’Escale Borély, les plages privées se sont multipliées chaque établissement ayant pignon en arrière-plan possédant désormais sa succursale. A la Pointe Rouge, il en sera de même en 2020, la municipalité ayant désormais la gestion de ces quelques centaines de mètres carré donnant sur la plus belle baie du monde (Selon les Marseillais s’entend). Une quatre voies devrait depuis l’A50 drainer la clientèle qu’attendent les exploitants de ces périmètres. Ainsi s’achève un certain art de vivre marseillais, indiscipliné, « foutrac », urticant… où l’on plongeait avec audace du premier rocher pris d’assaut, où l’on installait sa glacière, son parasol, son transistor, ses boules et surtout son parler haut et fort marseillais sans se soucier du regard oblique des baigneurs honnêtes. Manque plus que le casino à la Joliette et on sera entre Los Angeles et Las Vegas. Sans exagérer, bien sûr !
Eh oui, des policiers
On a vu ressurgir ces derniers mois des slogans que l’on croyait disparu avec la fièvre de mai 68. On ne fera pas le lit des imbéciles qui les ont portés en les reproduisant ici. On dira simplement que les policiers, gendarmes, CRS étaient promis aux pires exactions pour avoir défendu l’ordre public et protégés le plus grand nombre de la folie d’un petit nombre. On a relégué pendant ces longs mois le travail inlassable de ceux qui sont chargés entre autres de maintenir notre civilisation dans un seul cadre acceptable : l’humanité. La barbarie court encore. A Marseille une jeune femme aussi belle que brillante, Marie Bélen, en a été victime. Près de la Timone un sauvageon de 17 ans l’a assassinée à coups de couteau. Elle s’est défendue jusqu’à rendre l’âme qu’elle avait si généreuse selon ses amis. Elle a réussi dans l’escalator du métro à décocher un coup de pied à son assaillant. Puis elle a agonisé alors que son agresseur prenait la fuite sous l’œil des caméras de surveillance. Sur une des chaussettes de l’étudiante il avait cependant signé son crime : une infime trace de son ADN. Les hommes de la police judiciaire ont réussi à confondre ce loup solitaire après des mois de traque. Il n’y aura sans doute pas de pancarte sur les ronds-points des Gilets Jaunes pour les en remercier.