Combien de candidats chez les Républicains pour briguer le fauteuil de Jean-Claude Gaudin ? S’il est encore trop tôt pour le dire, les velléités des uns et des autres se font connaître au rythme de petites phrases bien choisies. Mais si elles sèment parfois le trouble, elles ont le mérite de faire réagir les premiers concernés. Lorsqu’il est question des élections municipales de 2020 à Marseille, le fameux « je ne m’interdis rien » prononcé par Renaud Muselier, président de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, repris à son compte par Martine Vassal, présidente de la Métropole et du Département des Bouches-du-Rhône ont déjà suffi à brouiller les cartes du jeu électoral à droite, alors que Bruno Gilles est en campagne depuis maintenant quatre mois.
Les récents propos élogieux du patron des Républicains à l’égard de Martine Vassal, viennent encore un peu bousculer l’échiquier politique. Interrogé au cours du journal télévisé de France 3 Provence-Alpes, alors qu’il était en déplacement dans le Var, Laurent Wauquiez a déclaré : « Il y a une personnalité qu’on aime tous beaucoup qui est Martine Vassal ; elle a énormément de courage, beaucoup de talent, beaucoup d’envergure, et elle aime avec la même passion que celle de Jean-Claude ou de Renaud, sa ville ».
Le choix de Jean-Claude Gaudin
Des propos qui ne sont pas tombés dans l’oreille d’un sourd. En marge du débat organisé par Sciences Politiques Alumni, vendredi 8 février entre Bruno Gilles (LR) et Sophie Camard (LFI), le candidat déclaré à la mairie de Marseille a réagi. Le sénateur s’est fendu d’un petit SMS « plutôt sympa mais assez fort » à l’attention du patron des Républicains. S’il ne nous en a pas dévoilé le contenu, le petit mot a suffi pour qu’une rencontre soit organisée entre les deux hommes prochainement à Paris. Si Bruno Gilles reconnait naturellement que Laurent Wauquiez a dit, « grand bien de Martine Vassal », mettant en avant des qualités que lui-même a déjà saluées, il observe néanmoins : « il n’a pas non plus présidé une commission nationale d’investiture pour dire qu’elle était investie, surtout qu’elle n’est pas candidate ». Reste que dans le microcosme politique marseillais, la déclaration de Laurent Wauquiez résonne comme un adoubement. Nombreux sont ceux à droite qui souhaitent voir Martine Vassal se lancer à l’assaut de la Mairie de Marseille. A plusieurs reprises Jean-Claude Gaudin qui a désigné Bruno Gilles comme son possible dauphin – un choix d’ailleurs confirmé par le principal intéressé – ne semble jurer désormais que par celle qui lui a succédé en septembre dernier à la tête de la Métropole Aix-Marseille Provence.
Bruno Gilles : « un mandat, un élu »
Autre soutien : Sabine Bernasconi. Si elle juge, comme d’autres, la candidature de Bruno Gilles, « légitime », pour le maire LR du 1&7, Martine Vassal « est la mieux placée pour représenter Marseille en 2020 », nous confiait-elle au lendemain de ses vœux à la population. « Elle a montré qu’elle était à l’écoute. Compétente. Avec Martine Vassal, nous partageons la même vision pour Marseille. Et puis, il y a un peu de solidarité féminine je dois dire », avoue l’élue. « Au-delà de ça pour faire suite à Jean-Claude Gaudin qui a fortement marqué Marseille, ce serait tout aussi marquant d’avoir une femme ». Sabine Bernasconi voit même comme une force d’être à la tête du Département, de la Métropole… et demain de Marseille. « On a vu Marseille se transformer grâce à la puissance du Département. Nous avons pu mener des projets ambitieux et nous pourrons ainsi continuer à la faire ».
A contrario, Bruno Gilles continue de prôner « un mandat, un élu », donc une personne pour chaque institution. Le trio Martine Vassal en patronne de la future super collectivité issue de la fusion entre le Département et la Métropole en 2021, Renaud Muselier en chef d’orchestre à la Région et Bruno Gilles dans le fauteuil de Jean-Claude Gaudin, est celui dont rêve le sénateur LR. Une manière pour lui d’imposer plus fortement la voix du territoire auprès de l’Etat.
Quand l’étiquette LR ne suffit plus
Cette campagne des municipales qui se dessine semble se détacher de celles du passé, où le clivage gauche-droite était clairement imprimé dans le paysage marseillais. Ainsi, depuis qu’il s’est lancé dans la campagne, Bruno Gilles milite pour une liste de large rassemblement avec un projet qu’il entend construire avec les Marseillaises et les Marseillais. Il répète à Gomet’ ce vendredi 8 février qu’il n’est « pas le candidat du parti », même s’il ne cache pas « que c’est mieux bien sûr d’avoir le soutien de sa famille politique ». Sur la même ligne, Martine Vassal qui a « coutume de dire qui m’aime me suive » milite pour un projet de territoire. Toujours lors de ses vœux à la presse, dans l’hypothèse de sa candidature, elle avait également évacué la question de l’étiquette politique. « Pourquoi, [candidate] que de la droite ». Le plus difficile pour les Républicains serait d’avoir à trancher entre le président de la Fédération LR des Bouches-du-Rhône « historique » et la secrétaire départementale et présidente du Département des Bouches-du-Rhône, devant la commission d’investiture, reconnaît Bruno Gilles. C’est en tout cas le scénario qu’il souhaite éviter.
« J’ai longuement discuté avec mes amis politiques avant »
La commission d’investiture, présidée par Eric Ciotti, député des Alpes-Maritimes, depuis le 24 janvier 2019, est composée de 36 membres dont la moitié de sénateurs, parmi lesquels Bruno Gilles. Martine Vassal et le député des Bouches-du-Rhône Bernard Deflesselles en font également partie. Renaud Muselier, président de la Région Sud représente, quant à lui, Laurent Wauquiez au sein de cette commission, ce qui lui confère un certain poids dans le choix du ou de la candidat(e) pour l’échéance de 2020. S’il n’a de cesse de déclarer son amour et sa passion pour Marseille, qu’il ne souhaite pas voir tomber entre les mains des extrêmes, le député européen se plaît également dans sa fonction de président de Région. Il pourrait ainsi œuvrer davantage en coulisse plutôt que tenir le premier rôle pour les municipales. Si choix il devait y avoir, il se fera en coulisses. Invitée de notre émission Questions de politique en mai dernier, Sabine Bernasconi déclarait : « c’est un choix qu’on aura pas à faire en public. Je pense que si il y a un choix à faire, il se fera en interne, dans le cadre des statuts de notre parti politique». A l’époque, la question concernait surtout Renaud Muselier et Martine Vassal, Bruno Gilles poursuivant sa rééducation après sa greffe du coeur.
Ami de longue date de Renaud Muselier dont il a été directeur de campagne et suppléant à l’Assemblée nationale, avant de devenir sénateur en 2008, Bruno Gilles n’est pas prêt à rester sur le banc de touche. « Je n’ai pas pris la décision d’être candidat un matin en me levant, rappelle-t-il. J’ai longuement discuté avec mes amis politiques avant. On ne peut pas changer les règles au cours d’un match. On ne peut pas me dire : “rentre tu vas marquer plein de buts”, et ensuite me dire tu vas sortir, on fait rentrer quelqu’un d’autre sur le terrain ». En septembre dernier, Renaud Muselier espérait que la candidature de Bruno Gilles permettrait « de clarifier le positionnement de chacun en vue de l’échéance de 2020 ». Force est de constater que pour l’instant, rien n’est clair.