Les députés Delphine O et Jean-Marc Zulesi (LREM) ont proposé jeudi 28 mars une conférence-débat sur le thème « La France dans le monde à l’heure de la transition écologique », afin de présenter et d’échanger autour des actions et ambitions de la France en matière d’écologie. La députée Delphine O, également membre de la commission des Affaires étrangères, a choisi la ville de Salon-de-Provence pour clôturer son « O’Tour », un tour de conférences dans cinq villes françaises autour de l’engagement du pays à l’international dans différents domaines dont celui de l’écologie. L’événement s’est tenu à la Maison de la vie associative de Salon-de-Provence, en présence également de Bruno Montel, co-fondateur de l’association « Pays salonais en transition » et auteur du livre « On peut le faire », une réflexion sur cette transition écologique de plus en plus urgente.
Pragmatisme, multilatéralisme, et souveraineté au cœur de la politique étrangère française
Au niveau international, la France mène avant tout une politique étrangère pragmatique et « indépendante ». Et surtout elle essaie de « réagir vite » pour la députée Delphine O, évoquant la réactivité du président français lors du retrait des Etats-Unis de la COP 21, et le lancement en parallèle d’autres initiatives pour « relancer la coopération internationale » autour du réchauffement climatique (comme le « One Planet Summit » dont la troisième édition s’est tenue récemment à Nairobi au Kenya). L’Etat s’appuie aussi sur un multilatéralisme « fort à une géométrie variable » a-t-elle poursuivi. Elle explique : « Si nous ne sommes pas d’accord sur certains sujets avec certains, on avance sur d’autres, comme avec la Chine ». Et cela passe aussi par de nouvelles alliances autour de l’écologie, comme la récente Alliance solaire internationale lancée à Nairobi dégageant 1,5 milliards de dollars pour aider quelques 121 pays « pauvres » à investir dans l’énergie solaire. Car « aujourd’hui, il faut avancer avec ceux qui en ont l’envie ».
Delphine O a également rappelé que la France doit « défendre ses intérêts, et ceux de l’Union Européenne ». Exemple avec le marché des batteries électriques « en partie occupé par des batteries construites en Chine, dans des conditions éthiques, sociales, écologiques » qui peuvent être « épouvantables ». Pour changer la donne, la France et l’Allemagne planchent actuellement sur la création d’une « filière industrielle européenne de construction de batteries » a confié l’élue, pour qui cela pose la question de la création de géants industriels européens pour « retrouver une souveraineté de production, et concurrentielle » plus éthique allant ainsi dans le sens de la transition écologique.
20,1 milliards d’euros d’investissement pour la transition écologique
La France, qui essaie de s’imposer comme médiateur et précurseur mondial en matière d’écologie, doit néanmoins faire ses preuves, notamment à travers le plan Climat et l’investissement de 20,1 milliards d’euros de l’Etat dans la transition écologique nationale. Pour le député Jean-Marc Zulesi, qui a lui-même fait le constat d’une hausse de températures en comparant des données de 1988 avec celles d’aujourd’hui, « il est désormais temps de passer à l’action ». Et de rappeler en évoquant les récentes études sur la fonte des glaces en cours que « si on continue à ce rythme, des villes comme Rognac ou Berre l’Etang pourraient être submergées d’ici 2100 ».
9 milliards d’euros sont ainsi prévus pour la rénovation thermique des bâtiments, aussi bien chez les particuliers à travers des aides et prêts, que dans le public qui « doit donner l’exemple » pour le député. 7 milliards sont alloués au développement des énergies renouvelables, avec pour objectif de « multiplier par deux notre part d’énergie renouvelable d’ici 2030, qui représente aujourd’hui à peu près 15% » mais également d’accueillir et soutenir le développement de projets innovants dans ce domaine. 4,1 milliards d’euros sont finalement destinés à développer une mobilité durable, avec entre autres le Plan Vélo que Jean-Marc Zulesi avait d’ailleurs présenté aux maires et associations locales à Grans quelques semaines plus tôt (lire notre article à ce sujet). « On a cette volonté d’aller de l’avant » a appuyé le député, regrettant tout de même « une sorte de latence » à tous les niveaux en matière d’écologie. « Il est désormais nécessaire que l’ensemble du corps politique et des citoyens se saisissent de cette problématique et de ces nouveaux dispositifs encore peu connus » pour lutter contre le réchauffement climatique.
Acteurs locaux et « consom’acteurs » en première ligne
Co-fondateur de plusieurs associations de transition citoyennes, le vécu et l’expérience de terrain de Bruno Montel l’ont amené à constater « qu’une grande majorité des gens se sent encore démunie face à la question car l’enjeu semble trop lointain ». Pour lui, une partie de la solution résiderait dans « le consom’acteur » : par des actions individuelles comme le fait de mieux consommer, respecter la saisonnalité des produits, recycler et même adhérer à une monnaie locale comme « la roue », chacun peut peser « sur les actions collectives, qui impacteront ainsi les décisions gouvernementales ». « Il faut faire masse, agir, s’indigner et mener des actions citoyennes non violentes » a insisté l’auteur, pour « montrer aussi que la transition écologique est un sujet majeur qui nous concerne tous ». Car si les maires, conseillers métropolitains, départementaux ou régionaux ont eux aussi « un pouvoir d’action très fort », Bruno Montel regrette néanmoins que les associations porteuses d’idées innovantes pouvant apporter leur avis sur ces décisions territoriales « ne soient pas plus considérées », profitant au passage pour évoquer les 300 propositions écrites d’Alternatives Territoriales pour « une métropole à la hauteur de la transition écologique » (à lire ici).
Autre acteur local : le monde de l’entreprise, qui a « une forte responsabilité dans les émissions et pollutions de toutes sortes », et qui doit aussi devenir un acteur-clé de cette transition notamment avec la responsabilité sociétale des entreprises. Des projets comme celui de « Total-La Mède et son huile de palme » qui sont « climaticides » selon M. Montel, doivent laisser place à d’autres projets plus éco-responsables comme sur la zone Piicto à Fos-sur-Mer, où une entreprise travaille sur la mise en culture de microalgues alimentées par le CO2 produit par les émissions industrielles locales, en vue de les transformer en carburant.
Malgré tout, pour l’intervenant, ces efforts ne suffiront qu’à condition de « changer de système, de paradigme », à l’heure où « le système financier, le capitalisme influence directement les décisions politiques ». En fin de conférence, les questions et inquiétudes restaient encore nombreuses de la part des participants, les aides et investissements prévus par l’Etat sont encore trop dérisoires face à l’urgence climatiques pour certains. Mais pour les intervenants comme les participants, la phase de concertation et de sensibilisation autour de cette transition doit laisser place maintenant à l’action commune.