Depuis le 11 mai dernier, les entreprises ont commencé à rouvrir leurs portes aux salariés. Mais le virus n’ayant pas disparu, ce retour au travail reste très partiel à l’image de la zone d’activité Domaine Vallée Verte, dans le quartier de la Valentine à Marseille. Habituellement, elle accueille chaque jour 1 500 personnes et deux semaines après le début du déconfinement, elle reste majoritairement vide. Un peu plus de 500 salariés seulement ont rejoint leur bureau. Certains toujours en télétravail et d’autres au chômage technique.
Un diagnostic contrasté selon les secteurs
La typologie des sociétés de Domaine Vallée Verte est très variée. Cela va de la start-up à la grosse PME de plusieurs centaines de personnes. Et selon les secteurs, le Covid-19 a impacté l’activité plus ou moins fortement. Par exemple, l’ascensoriste Kone qui a installé sa direction régionale sur le site un peu avant le confinement, les effets restent pour l’instant mesurés. « On a toujours besoin d’ascenseurs en bon état et ils travaillent sur des contrats au long cours. Résultats, ils ont assez peu utilisé le chômage partiel et maintenu les salaires », raconte à Gomet’ Yvan Gouchon, le propriétaire de Domaine Vallée Verte. Pourtant, sur la centaine de salariés qui travaillent sur place, seulement la moitié sont revenus à leur poste. « La plupart des entreprises préfèrent maintenir le télétravail tant que c’est possible », justifie-t-il. D’autres entreprises ont eu moins de chance et les conséquences du coronavirus risquent d’être terrible.
Un vrai risque de défaillance dans les mois qui viennent
Pour l’agence Dekra de la zone, l’une des plus grosses de France, le Covid-19 a mis un véritable coup d’arrêt à son activité. Le groupe a ouvert l’an dernier un grand centre de formation sur les métiers du contrôle, de l’inspection et de la certification dans les domaines de l’automobile, du transports et de l’industrie : « Tout s’est arrêté du jour au lendemain », explique Yvan Gouchon. Quelques formateurs ont pu assurer des sessions à distance mais la perte d’activité est de plus de 95%. Même constat sur les contrôles réglementaires « mais cette partie devrait reprendre plus rapidement notamment sur le sanitaire », estime Yvan Gouchon. Pour la formation, le redémarrage de l’activité n’est pas attendu avant septembre, et encore sur une prévision à 50% de la capacité seulement. Et la situation est encore plus critique pour les sociétés de la zone dont l’activité est liée au tourisme.
Domaine Vallée Verte abrite aussi les bureaux d’Indevho, la société qui a repris la gestion des hôtels de l’ancien groupe marseillais Maranatha. A la tête de 50 établissements employant 1 200 salariés, l’entreprise est en grave danger : « Pour eux, c’est la Bérézina car tous les hôtels ont vu leur chiffre d’affaires tomber à zéro », alerte Yvan Gouchon. Indevho a mobilisé toutes les aides publiques possibles avec des prêts garantis par l’Etat pour tous ses hôtels. Mais la saison estivale approche à grand pas dans un climat très incertain. Le groupe pense pouvoir rouvrir une vingtaine d’hôtels au mois de juin pour redémarrer, une autre vingtaine attendra septembre et les dix restants espère redémarrer avant la fin de l’année. « Le grand danger, c’est maintenant, prévient Yvan Gouchon. Il n’y a plus de mesures de soutien assurées pour le moment. Si le gouvernement ne prévoit pas des aides dégressives dans le temps pour aider les entreprises, il va y avoir une véritable hécatombe ». Lui-même, en tant que gestionnaire de parc d’activités, s’inquiète de la suite des événements.
Malgré la crise, la plupart des entreprises ont payé leur loyer à Domaine Vallée Verte pendant le confinement : « Nous avons pu nous adapter pour les quelques sociétés qui ont eu des soucis », indique Yvan Gouchon. Mais le coronavirus n’est pas sans conséquence. Tant que les entreprises n’ont pas retrouvé un fonctionnement normal, la zone d’activités tournera au ralenti « Et cela devrait continuer au moins jusqu’en septembre », estime le propriétaire. La situation ne se limite pas à Domaine Vallée Verte.
L’inquiétude gagne toute la vallée de l’Huveaune
Installée dans le 11ème arrondissement, la zone d’activités fait partie de l’association des entrepreneurs de l’Huveaune Vallée. Son président, Thierry Vanderdonckt, constate aussi un « retour au travail en présentiel très très lent ». Pour les activités de services notamment. L’Est marseillais abrite aussi de grands industriels comme Heineken, Arkema ou encore Panzani qui n’ont pas stoppé leurs activités pendant le confinement. « Panzani a fait de très bons scores car la consommation de pâtes a augmenté et Heineken a continué de vendre des cannettes même si sur l’hôtellerie-restauration, ils ont souffert », révèle Thierry Vanderdonckt. Mais une fois encore, certaines sont plus exposées que d’autres. C’est notamment le cas des cafés marseillais Henry Blanc qui ont perdu environ 90% de leur activité depuis le début de la crise du Covid-19.
Globalement, les entreprises de l’association ont fait massivement appel au chômage partiel et au prêt garanti par l’Etat pour résister à la crise. Les plus grosses craintes sont pour la suite des événements : « La peur commence à se faire sentir maintenant car personne ne sait comment va se faire la reprise », indique le président de l’association des entrepreneurs de l’Huveaune Vallée. Et d’appeler aussi les décideurs publics locaux à réagir très vite pour résoudre les problèmes qui durent depuis longtemps sur l’Est marseillais : « L’urgence numéro un dans la zone, c’est la mobilité. Si on ne prend pas les décisions qui s’imposent maintenant, on va voir les problèmes s’accumuler avec cette crise et de grosses difficultés sont à prévoir pour notre économie », prévient-il.