Le déjeuner de presse organisé par Euroméditerranée début février a été l’occasion pour la nouvelle présidente, Laure-Agnès Caradec, d’évoquer les principaux dossiers qui vont animer la 21ème année d’un projet qui continue de transformer Marseille. Nous terminons notre série en cinq volets (voir plus bas) avec plusieurs sujets internes à l’Etablissement public ou abordés ponctuellement lors des questions-réponses avec les journalistes.
Projet H 99 : « ce que dit Marc Pietri avec intelligence »
Comment avance le projet de tour H99 (immeuble de grand standing porté par le promoteur Constructa) ? « Tout dépend du volume de pré-commercialisation explique Laure-Agnès Caradec. Il ne commencera jamais tant qu’il n’auront pas ce volume. Ça nous échappe. » Pour François Jalinot, le directeur général d’Euroméditerranée « Constructa s’est inscrit dans cet esprit de skyline développé par Yves Lion (architecte urbaniste des quais d’Arenc, NDLR). Une phase d’aménagement, elle se juge dans la durée. Il y a des phases où le marché est extrêmement pénible, il y a des phases où il est l’est moins. Ce que dit Marc Pietri avec intelligence : depuis Paris, pour aller à Antibes, vous mettez 7h et vous êtes obligé de prendre l’avion. Là, vous avez une vue à 360° sur la baie de Marseille en 3h pour 6600 euros le mètre carré. »
Les immeubles de grande hauteur : trop de « frilosité »
Laure-Agnès Caradec observe : « On a une grande frilosité sur la grande hauteur en France. Je pense qu’à certains endroits, ailleurs dans Marseille on pourrait tout à fait monter… en ayant justement des pieds d’immeubles très aérés, très végétalisés plutôt que d’enchainer ces successions de bâtiments pour rester à R+4 R+5, parce que donc, c’est ce qui est admissible. Mais ce n’est pas une vérité. Vous prenez la Tour Méditerranée, le Grand Pavois ou Le Corbusier aujourd’hui, ça ne choque personne. » Et François Jalinot d’ajouter : « De toutes façons, si on veut préserver l’espace naturel et éviter l’étalement urbain il faut monter. »
Financement et gouvernance : « Faire entrer la Métropole »
Quid de l’évolution de la représentation de l’Etat dans le conseil d’administration d’Euroméditerranée ? « C’est en effet une discussion que l’on peut avoir » reconnaît Laure-Agnès Caradec. « La logique serait que la part des administrateurs soit proportionnelle à la clé de répartition financière. » L’Etat détient la moitié des postes au conseil d’administration alors qu’il n’apporte plus qu’un tiers du financement.
François Jalinot explique qu’un protocole a été signé en 2011 et se termine en 2020 pour encadrer les opérations et leurs financements. « Plus généralement, on a un accord signé par les partenaires jusqu’en 2030 mais avec des financements jusqu’en 2020. Chaque année, on fait voter un budget qui s’inscrit dans ce protocole. Actuellement, nous avons la chance d’avoir un budget, un conseil d’administration et un exécutif qui peut dépenser. Nous ne sommes pas du tout impactés par les questions métropolitaines. On va engager des gros travaux pour St Charles, terminer la digue du J4 et le parvis de la Major. L’enjeu suivant, ça va être de faire entrer la Métropole dans le CA. Pour l’instant, il nous manque deux administrateurs, ceux qui représentaient la communauté urbaine. Quand la métropole sera opérationnelle il faudra faire entrer de nouveaux administrateurs et puis probablement anticiper les questions liées à la réforme territoriale. »
Concernant le budget d’Euroméditerranée, il atteint 54 millions d’euros observe François Jalinot répartis comme suit : 24 millions de travaux, 24 millions de foncier, un million de promotion économique. « Les frais de fonctionnement de l’établissement public c’est a eu près six millions d’euros. » Et d’ajouter, un brin moqueur : « On coûte la même chose que le budget de la Villa Méditerranée. Sauf que l’on réinjecte dans l’économie locale un peu plus de 50 millions d’euros. »
La Villa Méditerranée dans les « points d’interrogation »
Justement la Villa Méditerranée. Comment Euroméditerranée voit l’avenir du lieu ? « C’est à Christian Estrosi qu’il faut poser la question… » déclare François Jalinot. « Elle atteint vite sa limite quand on voit sa capacité d’accueil, la configuration des lieux. J’ai rencontré le nouveau directeur de l’Avitem qui est aujourd’hui le gestionnaire. Est-ce que la Région continuera à donner ce qu’elle donnait ? On est dans les points d’interrogation. En tous cas, l’Avitem a envie de se concentrer sur ses objectifs de départ, c’est à dire un organisme de coopération sur des thématiques de développement et d’attractivité des territoires. »
Euroméditerranée et la Méditerranée ?
Interrogé sur la coopération méditerranéenne qui était l’un des enjeux au départ d’Euroméditerranée, François Jalinot souligne que ce thème est aujourd’hui partagé par « 117 associations différentes. La création de l’Avitem avait pour but de fédérer toutes les énergies autour d’un organisme unique. Euroméditerranée est membre fondateur de l’Avitem. Nous animons un réseau d’aménageurs avec la Caisse des dépôts. Le deuxième volet de notre action c’est notre participation massive, avec l’Ocemo à la Semaine économique de la Méditerranée. Donc Euroméditerranée entretient toujours cette volonté de développer avec ses partenaires » une politique méditerranéenne. Mais nous n’avons qu’une seule personne en charge de ces dossiers, Alexandre Sorrentino. On souhaite s’appuyer fortement sur les actions de l’Avitem avec un nouveau directeur Bernard Valero, un diplomate qui a de bonnes idées. On pense qu’il y un vrai rôle a développer autour de l’Avitem. »
[pullquote]Le président Vauzelle a voulu absolument marier de force l’Avitem et la Villa…[/pullquote] Mais il faut faire attention à ne pas réduire la question de cette coopération méditerranéen à un problème de lieu avertit François Jalinot. « Regrouper les acteurs dans un même lieu, ce n’est pas forcément la bonne solution.Vous avez aussi les Niçois -Madame Rampal traite ces sujets auprès de Monsieur Estrosi – qui eux veulent plutôt valoriser le Centre méditerranéen qu’ils ont sur la promenade des Anglais, les Toulonnais sont aussi concernés. Je pense qu’il ne faut pas réduire le sujet à une approche immobilière. C’est la meilleure manière de « planter » les projets. Regardez le problème que pose la Villa. Le président Vauzelle a voulu absolument marier de force l’Avitem et la Villa… Et donc ça a créé des réactions tout de suite de rejets des autres partenaires. Nous ce qui nous intéresse c‘est l’écosystème, ce n’est pas le bâti. L’enjeu c’est de faire travailler cet écosystème ensemble et favoriser un réseau. »
Immobilier de bureaux : des gros projets avec des entreprises du CAC 40
Jean-François Royer, le directeur du développement évoque le marché de l’immobilier de bureaux. La commercialisation en 2015 est dans la moyenne décennale, un peu en retrait par rapport à 2014 mais « on ne commercialise pas chaque année une tour de 35000 mètres carrés, malheureusement ! » Il fait remarquer que sur les 77 000 mètres carrés placés à l’échelle de Marseille, plus de la moitié est sur le périmètre d’Euromediterranée centre-ville. « Si on regarde l’offre future sur les 3 à 5 ans, les trois quarts sont sur le périmètre d’Euroméditerranée. Avec plusieurs opérations qui arrivent, la suite d’EuromedCenter, la tour La Marseillaise et Smartseille porté par le groupe Eiffage sur Euromed 2. » Concernant 2016, Jean-François Royer souligne que de grosses opérations sont en cours commercialisation. On discute avec des grandes entreprises, en particulier des entreprises du CAC 40 sur des enjeux qui en terme de valeurs sont très importants. Il est possible que l’on fasse une bonne année si les discussions vont au bout. Et on a l’offre immobilière qui permet d’accueillir ce type de projet. »
L’aménageur insiste également sur la diversité des secteurs concernés par les implantations : « On retrouve nos filières cibles, que ce soit sur le secteur de la banque assurance puisque en 2015, on a la SMC qui a installé son centre d’affaires dans l’Astrolabe, la MGEN et la MMA sur l’immeuble Grand Large; des entreprises de croissance et du BTP avec le siège régional d’Eiffage sur Smartseille, qui sera voisin des services de la ville, le bureau d’études Ingérop; dans le tourisme avec le Golden Tulip qui va ouvrir dans quelques mois, le Toyoko Inn à St Charles et le groupe NH Hôtel qui s’installe rue de la République. »
Notre série : Euroméditerranée, les grands enjeux de 2016
Euroméditerranée 2016 (1/5) : Euromed’ 2 entre en phase active
Euroméditerranée 2016 (2/5) : piscine, aquarium, casino, Arena, grande plaisance… des projets en réflexion
Euroméditerranée 2016 (3/5) : Mourepiane, rue de la République, Dock des suds… des dossiers sensibles
Euroméditerranée 2016 (4/5) : quid du numérique dans tout ça ?