Au cœur du Panier marseillais, sous l’admirable coupole ovale de la chapelle de la Charité, est posée une caisse en bois, ouvragée et coloriée. Un volume comparable à celui d’une ruche, ou d’une niche. D’un côté sort une tête rouge à longues oreilles, la queue émerge du flanc opposé. Dépassent du haut de la boîte cubique des personnages bariolés, en tuniques et casques multicolores. Ce masque venu de Guinée est nommé Sibondel. Les figures émergentes semblent typiques de l’époque coloniale : un chasseur, un cavalier, une dame assise et le chef du canton.
Une vingtaine d’autres masques et statues, ainsi que quelques sièges ou tambours juchés sur caryatides proviennent de la même côte africaine, via Genève, où s’enrichit depuis un siècle la collection Barbier – Mueller, l’une des plus fameuses au monde en ce domaine.
Peuple de riziculteurs en zone tropicale, les Baga de Guinée – Conakry prouvent ainsi un talent et un soin peu ordinaire pour honorer ancêtres et esprits sacrés. Un serpent de bois ondule sur plus de 2 mètres, flanqué de petits miroirs et décoré en losanges bruns et beiges. C’est le python magique qui protègera les jeunes initiés.
Déesse mère sur papier monnaie
Le buste géant d’une femme Dimba, haut d’un mètre 33 et planté d’une multitude de clous connut une telle renommée qu’il figure désormais sur les billets de 5 000 francs édités par la banque de Guinée. Ces réalisations ont fasciné des générations d’artistes occidentaux comme Giacometti ou Picasso. Lui préféra qualifier cet art de savant plutôt que primitif. Dès 1905, Vlaminck achète une statuette féminine aux seins en pointe, elle sera à Marseille tout l’été.
Avec cette exposition le Musée d’Arts Africains, Océaniens, Amérindiens (MAAOA) s’attache à présenter au public la richesse artistique des cultures extra européennes. Avec l’arrivée du christianisme et de l’islam sur le rivage atlantique de l’Afrique, ces somptueuses réalisations disparaissent où se dispersent.
Le visiteur de la Vieille charité peut regretter l’absence du moindre film relatant l’allure et la vivacité de ces rituels villageois, lorsque, de la brousse ou de la mangrove surgit le danseur masqué d’un de ces objets ici inertes. D’autant qu’il est permis de supposer que le MAAOA possède de telles images vidéo, du genre de celles que tournait, au siècle passé, Jean Rouch chez les Dogon du Mali.
Liens utiles
> Des conférences : le 8 septembre à 18h30. L’esthétique Baga par Marie-Yvonne Curtis, anthropologue de l’art et du genre. Le 16 Septembre à 18h30 Baga Guiné. Un film de Laurent Chevallier, production Les films d’ici, 1996. Vivant à Conakry, capitale de la Guinée, une centaine de femmes issues de l’ethnie baga continue à pratiquer en ville la tradition du village. Exclusivement féminin, Baga Guiné est un groupe de chants et de danses. Pour la première fois, ces femmes partent en tournée jusque dans leur village du Bagataï. Baga Guiné est un portrait de la femme africaine d’aujourd’hui. En présence du réalisateur (sous réserve). Projection en continu les 17 et 18 septembre 2016 à l’occasion des Journées Européennes du Patrimoine.
> Autres sources : culture.marseille.fr, dgac-maaoa@mairie-marseille.fr et dur Apple application MAAOA
> Expo du 13 mai au 18 septembre, ouverte du mardi au dimanche de 10 à 18h
> Entrée de 5 à 8€