Il est à l’est de notre région, un chemin de l’énergie qui est la parabole de nos problématiques énergétique en région Sud. En 1921, la Compagnie « Energie électrique du littoral méditerranéen ». ouvre un vaste chantier pour capter les eaux de la vallée de la Tinée et les turbiner. Le réseau électrique est privé, morcelé et il n’est pas encore connecté à l’Hexagone et chaque région doit se trouver des ressources propres. Pendant une quinzaine d’années les ouvriers vont tailler à même la roche à plus de 2000 m d’altitude une route de huit kilomètres destinée la construction d’une centrale hydroélectrique à Saint-Etienne-de-Tinée, Ce chemin en balcon avec ses tunnels creusés dans le roc, ses ponts, ses ouvrages d’art 1200 m au-dessus du vide fut abandonné en 1940 et ne servit depuis qu’à des randonnées (superbes) .
Parabole donc que ce chemin, car notre région n’a toujours pas les ressources propres nécessaires au quotidien de sa population, nous produisons 1,7 Mtep (Mégatonne équivalent pétrole) d’énergie primaire, nous consommons 13,3 Mtep, en énergie finale, nous consommons 36 TWh en 2021 et nous produisons 17,7 TWh pour la même année. Parabole, car l’énergie est le lieu d’investissements massifs sans garantie d’efficacité, ni de retour sur investissement. Parabole, car dans ce domaine les enjeux locaux, régionaux, nationaux, planétaires sont liés. C’est ce que nous voulons éclairer dans ce hors-série.
Nous avons vécu avec les Trente Glorieuses la construction d’un appareil français de production énergétique considérable avec les équipements hydroélectriques de nos fleuves et le nucléaire. Le Général y veillait personnellement. Nous avons profité sans en réaliser le bénéfice d’une énergie abondante, moins chère que chez nos voisins et sûre. Les mobilités furent assurées par le pétrole, le chauffage par le gaz. Les énergies renouvelables apparaissaient alors comme une distraction pour écologistes rêveurs qu’il fallait empêcher d’émerger.
Le réveil se fit par secousses violentes et répétées depuis 1973, mais vite oubliées. En 2023, il n’y a plus d’abondance, le nucléaire est à la peine, les barrages manquent d’eau, le pétrole et ses dérivés sont chers et bannis, le charbon est heureusement au passé, les ENR sont espérées et déjà contestées. Le bouquet énergétique primaire réel de la France se compose officiellement « de 40 % de nucléaire, 28 % de pétrole, 16 % de gaz naturel, 14 % d’énergies renouvelables et déchets et 2 % de charbon. » Mais, enfin, l’énergie est devenue un débat public et ouvert, « L’énergie est sur le devant de la scène », affirme ainsi l’Observatoire régional de l’énergie, du climat et de l’air. Les nouvelles lois et plan, la Loi Énergie Climat, la Loi de transition énergétique pour la croissance verte, le Plan Climat Air Énergie territorial… tracent un nouveau mix. La planification énergétique doit mettre en cohérence les mesures d’urgence et les investissements de long terme avec la future Stratégie française énergie climat (SFEC).
Nous avons, de notre observation à Gomet’ détecté quatre tendances que nous approfondissons dans ces pages.
- Le nucléaire. Il n’est plus banni, il se relance et si notre région n’héberge pas de centrale de production, elle peut œuvrer puissamment dans le back-office des prochains EPR.
- Le solaire. Il connaît une explosion. Des grandes fermes solaires aux publicités agressives du web, des innovations de l’agrivoltaïque aux conquêtes internationales, les PME du solaire s’enhardissent et se positionnent comme un acteur majeur de notre mix. Le 13 mai 2021, la production d’énergie solaire a permis de couvrir presque 30 % de la consommation électrique régionale et l’Oreca[1] décompte 8637 nouvelles installations solaires en 2021 représentant 263 MW, mais nous avons seulement le 3e parc de France avec près de 50 000 installations
- L’éolien. Les éoliennes peinent à s’installer dans une région qui bénéfice d’un patrimoine classé, de vastes zones ventées, mais intouchables et de paysages remarquables. L’éolien en mer par contre a ses chances. Mais, qui de Port La Nouvelle ou de Fos sur mer sera le lieu d’assemblage, de pilotage et d’entretien, qui sera attributaire des appels de la CRE ?
- L’hydrogène. Il est aussi prometteur qu’incertain. Mais notre région a pris la question à bras-le-corps avec un comité stratégique régional et des entreprises qui avancent, vite, vers cette mutation industrielle.
[1] L’Observatoire Régional de l’Énergie, du Climat et de l’Air est le fruit de la réunion des acteurs majeurs des domaines de l’énergie, du climat et de la qualité de l’air sur le territoire de la région Provence- Alpes-Côte d’Azur.