Attention au poids lourd des mots
Dans un élan de militantisme végétal, Gaëlle Lenfant élue socialiste d’opposition aixoise, utilise le mot « platanicide » pour évoquer l’abattage de quelques platanes, place des prêcheurs, où le maire d’Aix, Maryse Joissains, entend aménager les lieux. On est loin d’un « génocide » sylvestre, même si on comprend l’émotion de ceux qui sont passés pendant des décennies sous l’ombre protectrice de ces arbres majestueux. On ne peut que recommander à ceux qui usent de tels néologismes la prudence. D’autres ont usé de cette mauvaise ficelle pour provoquer. Faut-il rappeler le misérable « sidaïque » en lieu et place de sidéen de Jean-Marie Le Pen, évoquant les malades du Sida. A Aix il y a aux Milles un Camp, qui peut rappeler à ceux qui ont la mémoire courte, que les mots ont parfois un poids très lourd.
Zemmour et sa cousine
Il y avait finalement 300 personnes au château de la Buzine pour boire les paroles du nouveau prédicateur de la droite pure et dure, Eric Zemmour. En ces lieux qui a priori devaient promouvoir l’esprit créatif plutôt que les prédictions mortifères des tenants du déclinisme, le chroniqueur à succès a donc pu sans opposition développer ses thèses. Au passage, il aura vu en Marseille- approuvé par les spectateurs ravis de participer au dénigrement – la ville qui préfigure ce qui va selon lui advenir du pays tout entier. Zemmour n’a pas besoin d’aller plus avant dans la dénonciation, mais on n’est pas loin de Coluche et la première ville africaine traversée par le Paris Dakar. On peut rire de tout on le sait depuis Desproges, mais ça dépend avec qui. Justement cela tombe bien puisque parmi les ravis de cette crèche-là, il y avait, rapporte La Provence, Jean-Jacques Debout et Chantal Goya. Bécassine et Zemmour même combat. Post mortem ma grand-mère bigoudène va en être toute décoiffée.
Après la cuisine des tatas celle des tontons
Elles sont réputées les « tatas » qui bossent dans les écoles de Marseille. Les enfants les adorent ou les craignent. Ils connaissent moins les tontons qui se flinguent à tout va. Et ça canarde méchant pour disperser façon puzzle l’adversaire aux quatre coins de la ville. Renaud Muselier (photo lors de la visite de Manuel Valls à Marseille le 9 septembre © Jean Yves Delattre) a sorti cette semaine l’artillerie lourde, façon frères Volfoni chez Audiard, pour tirer sur Jean-Claude Gaudin. On se demande si le vice-président de la région ne s’est pas trompé de film. Là il nous joue plutôt « Nous ne vieillirons pas ensemble » de Maurice Pialat. Certains en font des gros titres. Pourtant ce n’est pas nouveau ce désamour affiché. Quand on connaît les deux hommes, on peut même dire que c’est consubstantiel à leur couple. Muselier est gaulliste (génétiquement). Gaudin ne l’a jamais été. Muselier a détesté le defferrisme. Gaudin n’a de cesse de s’y référer. Muselier fait la guerre aux Guérini. Gaudin les laisse en paix. Muselier s’est écarté un temps de la politique. Gaudin, il le répète à l’envi, en a fait sa compagne à vie. Avec les tontons, c’est cauchemar en cuisine.
On nous aime trop
Parmi les phrases auto-flagellantes qu’affectent certains Marseillais cette antienne : « on ne nous aime pas ! ». Archi faux nous explique dans sa dernière livraison « Courrier International », qui a réuni quelques articles plutôt flatteurs sur la ville et particulièrement sur ses habitants. Il n’est pas certain que ces feuilles soient distribuées par tous les partis, notamment lorsqu’on y trouve le témoignage d’un journaliste japonais qui explique que ses a priori ont été d’emblée balayés. Gare Saint-Charles un Marseillais noir s’est fait un devoir de lui indiquer son chemin avec un conseil de prudence délivré en prime. Pour le reste : où l’on voit que certains titres à l’étranger cherchent plus à vérifier leurs thèses qu’à identifier l’information. Du coup on revient aux vieux maîtres. Lorsqu’on demandait à Albert Londres quelle ligne il suivait en matière éditoriale, il répondait « la ligne de chemin de fer ». A traduire dans toutes les langues.
Rien affiche
Les législatives c’est en principe dans neuf mois. Pourtant la droite républicaine accouche déjà sur tous les panneaux d’affichage et notamment à proximité des écoles. Impressionnante l’épaisseur des couches superposées à grands coups de badigeon et de colle. Serait-ce prêcher dans le désert que d’expliquer que cette communication coûteuse n’a que peu de chances d’infléchir, si loin du poteau d’arrivée, l’opinion. Ce n’est pas mieux sur les réseaux sociaux où certains candidats usent et abusent des messages d’autosatisfaction. Trop d’infos tuent l’info et à ce rythme-là ce sont des forêts qui vont trépasser. Cerise sur le gâteau la primaire des Républicains s’invite à l’orgie. Le message le plus mystérieux restant les initiales géantes A.J. Ce sont les supporters d’Alain Juppé qui le revendiquent et il faut lire « agis ». Le maire de Bordeaux est plus doué pour les chiffres que les lettres.
Par ici la monnaie
Il fallait s’y attendre, l’hypothèse émise par Jean-Claude Gaudin de faire de la villa Méditerranée un casino a donné un haut le cœur aux bien-pensants. Michel Vauzelle, l’ancien président de la Région, regrette que cet outil international soit détourné de sa vocation. D’autres avancent des arguments plus techniques pour vouer aux gémonies la perspective avancée par le maire. On n’en est pas encore au cri d’orfraie d’un Alain Joissains – le maître à penser de la maire d’Aix – dénonçant en son temps le Pasino comme un « temple de l’argent » avant d’admettre, en une discrète repentance, qu’il était aussi une manne pour les finances de la ville. Justement le casino pourrait s’il voyait le jour, rapporter 5 à 6 millions d’euros à la ville par an. De quoi lorgner du côté de ce bâtiment qui n’a jamais vraiment installé, dans le paysage culturel marseillais, sa vocation. En attendant, si on est joueur, on peut toujours parier sur sa faisabilité.