Encore cinq ans de labeur et le chantier titanesque d’Iter, entre Aix et Manosque, devrait s’achever, laissant place aux premières expériences, à quinze milliards d’euros… Reproduire pendant un court instant les 150 millions de degrés qui font briller le soleil, avec l’ambition de faire sortir de la machine dix fois plus d’énergie qu’elle n’en réclame : tel est l’enjeu. Outre l’Union européenne, six des pays les plus riches du monde sont associés à ce projet : Chine et USA, Inde et Russie , Corée et Japon.
Chacun s’est engagé à fournir en équipements l’équivalent de 9 pour cent du coût des installations. La moitié du budget global reste donc à charge de l’Europe… La France comptant pour 30 pour cent à elle seule…Au bas mot final, quelques six milliards d’argent public tricolore. Installé depuis plus d’un demi-siècle à Cadarache, en bordure de la Durance, le Commissariat à l’énergie atomique (CEA), loue une centaine d’hectares voisins à ce qui est en passe de devenir le plus grand chantier du continent.
En 2040, première production d’électricité… espérée
Une plate-forme défrichée et aplanie de quatre cent mille mètres carrés – soit une soixantaine de terrains de football mis bout à bout.. Une fosse dont la taille permettrait d’héberger l’arc de triomphe (80 m de large, autant de haut, sur 120m de long). Ici se bâtit, sur un socle de béton épais d’un mètre et demi, un cabanon aux murs de même calibre. Anti-sismique, bien entendu… C’est là dedans que l’énorme réacteur de 26 000 tonnes, nommé en russe Tokamak, porterait le plasma gazeux à incandescence. Nous serons alors en 2020.
[pullquote]Pic d’embauches à l’horizon 2016-17, avec 3500 salariés sur la zone.[/pullquote] Et, si tout va bien, il faudra patienter encore deux décennies pour une hypothétique production d’électricité ! Les savants assurent qu’il s’agit d’une des machines les plus complexes jamais conçues, ne comprenant pas moins d’un million d’éléments différents. Jusqu’ici, outre un encadrement multinational de 800 personnes (au deux tiers européen), 300 gars du bâtiment ont pris part aux travaux..une quarantaine d’origines géographiques, pour autant d’immeubles à édifier. Le pic d’embauches s’annonce pour 2016-17, avec 3500 salariés sur la zone. Les entreprises de la région ont déjà signé pour plus d’un milliard et demi d’euros de contrats, sur quatre actés par Iter. Acronyme anglais d’International Thermonuclear Expérimental Reactor… ou, plus basique, en latin : chemin. Qui ne brille pas par sa brièveté.
La chronologie :
1959. Création CEA (accueillant en 2014 plus de 22 000 tonnes de déchets radio-actifs).
1986. Projet International de réplique de la fusion des atomes, sur modèle des étoiles. 1988 Premières études de faisabilité.
2001. Accord planétaire de coopération en ce domaine.
2005. A Moscou (“désoviétisée”) s’accordent Washington, Pékin, Tokyo, Séoul avec Bruxelles pour implanter Iter en Provence ; l’Inde rejoint le club.
2007. Au nom de la moitié de la population mondiale, les six États ratifient, l’UE également. 2008 Début défrichage à Saint-Paul-lez-Durance. 2009. Achèvement de la plus grande plate-forme continentale à Cadarache.(400 000 m2)
2010 Iter signe avec CEA un bail courant jusqu’en 2042.
2012. ASN Autorité de Sûreté Nucléaire donne le feu vert au projet .
2014. L’Inde a livré le Cryostat ; Américains les parafoudres; le complexe du Tokamak peut s’ériger sur un radier de béton épais d’1 mètre 1/2. 2019. Fin du Chantier avec 39 bâtiments créés.
2020. Première fusion du plasma dans le Tokamak géant.
2040. Premières livraisons d’électricité.
(Illustration : crédit Iter Tous droits réservés)