Le président de Reservoir Sun, Mathieu Cambet, explique pourquoi sa société a selon lui un rôle prépondérant à jouer dans la transition énergétique, notamment à Marseille, via ce nouveau modèle économique de panneaux solaires.
Pouvez-vous nous dire ce qui différencie Reservoir Sun de ses concurrents ?
Mathieu Cambet : Le paradigme du solaire a changé. Pendant 20 ans, on a vendu des électrons à EDF. Maintenant, le modèle d’injection dans le réseau cède la place à l’autoconsommation où les clients profitent directement de leur production. Ce positionnement impose de bien connaître le client : ses courbes de consommation énergétique, son comportement, ses besoins … Résultat, nos collaborateurs sont plus proches des énergéticiens, ce qui explique pourquoi nous misons sur une force commerciale qui est beaucoup plus à l’écoute des clients que présente pour vendre un produit financier, ce qu’était le solaire à l’époque. Reservoir Sun a fait un choix fort lorsque l’on regarde le panorama des acteurs du secteur. Avant, on était dans une compétition où les acteurs devaient proposer le prix le moins cher à EDF pour signer un contrat sur 20 ans. C’était surtout les gros projets qui avaient l’avantage -plus rentable- et souvent dans le Sud-Est de la France. Avec l’autoconsommation, les règles changent et on vient se comparer au prix de l’électricité. Quelqu’un qui paye 100 à Calais, on peut lui proposer une électricité à par exemple 80 ou 85. Cela nous permet d’amener le solaire jusqu’au nord de la France ce qui n’est pas le cas avec l’injection réseau. C’est notre façon d’aider à la transition énergétique. Nous avons vu dans l’autoconsommation solaire un moyen de grandir. Aujourd’hui on est 40 dans toute la France, en octobre on sera 50. On a déjà un local supplémentaire prévu ici sur les Docks juste en face de la rue. Je pense que l’entreprise va croître très rapidement. J’ai bon espoir que l’on double les effectifs principalement à Marseille où sont déjà employés trente personnes. Le reste est surtout composé de forces commerciales au plus près du terrain.
Le modèle ne repose plus sur la vente de l’électricité à EDF, mais le client utilise-t-il toute l’énergie qu’il produit ?
M. C. : Aujourd’hui on dimensionne les installations pour que 100% de l’électricité produite par le panneau soit absorbée par le client. C’est le côté réservoir de « Reservoir Sun » : le potentiel infini du solaire couplé à la capacité de stockage. On anticipe le fait que l’autoconsommation sera associée au stockage, si l’espace foncier le permet -toiture, parking, espace vert- mais il n’existe pas encore de modèle économique arrêté. Actuellement on arrive à couvrir 20% de la consommation. A l’échelle de grands groupes, même d’une PME/PMI ou dans le secteur public, cela représente beaucoup. A la différence du prix de l’électricité du réseau qui est volatil et plutôt sur une tendance haussière comme nous pouvons le voir en ces derniers mois, le prix fluctue selon trois composantes : un tiers de fourniture, un tiers de transport et le dernier tiers de taxes. Avec l’autoconsommation, on fusionne tout sous le prix de production ce qui nous rend compétitifs avec un prix jusqu’à 15 à 20% moins cher. Tout dépend du type d’installation, où vous êtes placé… C’est un écart qui ne va que grandir.
Pourquoi avoir choisi Marseille pour installer le siège de votre société ?
M. C. Implanter le siège ici est une décision collégiale du comité de direction de l’entreprise. C’est une ville ensoleillée dans une région qui a donc une très grande ambition en matière de transition énergétique. La cité phocéenne et « Reservoir Sun » sont deux éléments qui attirent énormément de potentiels.
Avez-vous déjà des contrats en vue ici à Marseille ?
M. C. : Nous avons d’ores et déjà signé avec les Terrasses du Port pour équiper le plus grosse installation française de panneaux solaires sur un établissement recevant du public. Ce sera notre rampe de lancement et une vitrine assez incroyable. On veut que Marseille soit le berceau de l’autoconsommation. Ensuite, nous avons d’autres contrats en vue mais je ne peux pas encore communiquer dessus. On espère rapidement travailler avec les collectivités locales comme la Région, le Département ou la Métropole pour leur proposer d’équiper leurs bâtiments comme les collèges ou les lycées. On a développé un outil en interne qui nous permet de rapidement faire des simulations en ligne pour faire des propositions chiffrées sur la puissance que l’on peut installer, les économies réalisées ou encore le montant de l’investissement.
Quels sont vos projets les plus importants ?
M. C. On a un carnet de commandes qui commence à bien se remplir. L’objectif de départ est de signer 100 mégawatts de projets par an. C’est plus d’un demi-million de mètres carrés de surface de panneaux, plus de 100 millions d’euros d’investissement, plus d’un projet mis en service tous les jours. On parle de petits projets, partout en France. Mais on est aussi le seul acteur capable de massifier de grands projets. Sur une métropole d’Auvergne-Rhône-Alpes, on va solariser plus de 150 bâtiments publics. On est le partenaire privilégié de la métropole de Bordeaux. D’autres signatures vont arriver dans la région Sud. On a signé il y a deux semaines un contrat avec la Fédération française de tennis et la ligue Rhône-Alpes pour couvrir plus de 150 courts de tennis ouverts. On se positionne sur la solarisation de Biarritz qui va accueillir le G7. On est vraiment dans une logique de partenariat, qui est l’essence même de notre coentreprise. Nous sommes la force d’investissement et d’expertise et ensuite on vient s’allier avec des acteurs locaux pour vraiment privilégier le modèle de circuit court.
Comment vous rémunérez-vous ? Qui prend en charge l’investissement initial ?
M. C. On se rémunère sur la vente de l’électricité. On prend en charge 100% de l’investissement et de la maintenance. L’offre est très simple et très lisible pour un client : plus verte, plus locale et plus économique. Et en plus de ça, quand vous avez des objets comme des ombrières de parking, vous apportez un confort supplémentaire -protection contre la pluie et l’ensoleillement- pour les employés et les clients. Et sur certains modèles on arrive aussi à offrir des bornes de recharge de véhicules électriques. On est capable de fournir l’ensemble de la solution clé en main. Pour schématiser, vu que nous portons le risque de financement, c’est comme s’il y avait une ligne supplémentaire sur la facture du client. Et il sait déjà dans 20 ans combien il va payer : on est sur un prix stable qui va le protéger de la volatilité. C’est assez vertueux et le modèle fonctionne partout. On croit qu’en France le secteur va exploser. On arrive déjà à se positionner en tant qu’acteur référant, leader sur le marché français pour les entreprises et les collectivités.
Déjà leader 8 mois après avoir créé l’entreprise. Comment l’expliquez-vous ?
M. C. On a remporté 60% des appels d’offres de l’État. Tout simplement parce que c’est la première fois qu’un objet est destiné 100% à l’autoconsommation. La société entière est organisée dès le départ dans ce sens. On a décidé d’aller à fond sur ce créneau. Nous ne faisons pas d’éolien, pas de grande centrale au sol, pas de biogaz… Reservoir Sun est le premier pure-player de l’autoconsommation en France.