Son père est Comorien, plongeur en cuisine. D’origine marocaine, sa mère fait des ménages. Les petits frères vont encore à l’école. Elle est championne mondiale en combat pieds et poings, et bientôt, à 25 ans tout juste, docteur en droit. Métissée, et fière de l’être, Sarah Soilihi (à gauche de Jean-Luc Mélenchon sur la photo, capture Twitter @sarah_soilihi) rêve de devenir fin juin la députée insoumise qui succèderait à l’iconique Defferre, dans la troisième circonscription de Marseille [feu le maire régna ici pendant presque 20 ans, de 1962 à 1981].
Fuschia, c’est sa couleur fétiche, car elle résulte du mélange des trois tons de sa patrie : bleu, blanc et rouge. En 2002, la fillette de Frais Vallon n’a que 10 ans, quand le choc Le Pen (père) secoue le pays dans sa diversité, visant l’Elysée face à Chirac. Dix ans plus tard, elle adhère au Parti socialiste. Sans délai, cet engagement la porte à une triple candidature : aux municipales, départementales, puis régionales. À chaque fois, l’échec.
Encaisser les revers
L’énergique jeune fille, qui pratique le karaté depuis l’âge de 7 ans, du côté de Saint Jérôme, n’est pas du genre à se décourager ; ses parents se sont séparés, mais elle sait encaisser les revers, et frapper son adversaire à bon escient. Le front haut, abondante et longue chevelure, les yeux tout aussi sombres, éclairant un large sourire, la cogneuse devient championne de France de karaté – contact. Puis, en novembre 2015, en Italie, championne du monde de kick boxing. Le fruit de deux heures d’entraînement quotidien, auquel rien ne pourrait la faire renoncer. Ses compagnons de ring observent : « elle ne triche jamais. »
Agile des mains et des jambes, la sportive engagée ne laisse pas son cerveau en friche. Après un master en droit pénal, elle peaufine sa thèse de doctorat sur la cybercriminalité, notamment les contrefaçons d’œuvres de l’esprit, et les moyens de la combattre. À temps perdu, la future avocate fournit son aide bénévole aux collégiens de Castellane, la cité où vivent aujourd’hui ses grands-parents. À la fac, elle enseigne aussi les lois.
Éponge desséchée
Fin 2016, la militante jette l’éponge socialiste racornie, après de multiples cortèges dans lesquels elle défile contre la loi travail. Elle ne suit pas son camarade Castaner dans l’aventure macronienne. « Ce n’est pas ma gauche »- confie-t-elle à Gomet. Sarah opte alors pour celui qui, à son avis, s’attaque vraiment au vieux monde et à son (dés)ordre établi, le tribun Mélenchon. Qui, séduit, fera d’elle son porte-parole national. Si ce dernier espère en juin transformer l’acclamation du Vieux-Port en mandat quinquennal, elle reste sur son nord-phocéen natal, pour y affronter le baron local du nationalisme, le sénateur Ravier. Contesté dans son propre camp, le maire des 13 et 14e arrondissements doit aussi se colleter son ex-adjoint Maggio – très fâché contre l’autoritarisme, l’ayant côtoyé de près.
In extremis, la République en marche a investi sur ce secteur l’avocate Alexandra Louis, inscrite au barreau de Marseille. Rappelons qu’au premier tour de l’élection présidentielle, dans cette circonscription, si Marine Le Pen, avec 31%, devance Melenchon (24%), Macron arrive troisième, avec 18% et Fillon quatrième (16%). Et un taux élevé d’abstention et de non inscrits.
700 voix d’écart
Au second tour législatif de 2012, la socialiste Andrieux, [condamnée, puis démissionnaire depuis], ne l’emportait sur Ravier que de 700 voix (50/49). Avec un léger parfum de fraude. Il y aura cette fois MM. Masse et Miron, et Anne di Marino pour le PS, tandis que Soilihi s’est choisi un suppléant couleur écolo, Olivier Agullo. L’électeur trouvera même le 11 juin un bulletin Zidane, prénom Farid. Il faudra attendre le message des urnes ce soir là pour savoir qui portera le 18 juin la voix des 130 000 habitants des hauteurs marseillaises.
Riches en paysages, mais pauvres en fin de mois.
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