Le tribunal de commerce de Marseille a signé lundi 25 septembre une convention avec l’association Apesa (Aide psychologique pour les entrepreneurs en souffrance aiguë) France. Fondée en 2013 par Marc Binnié, greffier au tribunal de commerce de Saintes, l’Apesa s’est donné pour mission de prévenir le suicide chez les chefs d’entreprise. C’est un cas plus fréquent qu’on ne le pense : selon les données 2020 de l’Observatoire national du suicide, citées par Forbes France, 27% des dirigeants auraient déjà envisagé le suicide, suite à un échec entrepreneurial, par exemple. A l’échelle locale, en Provence, Apesa France a reçu 302 alertes depuis sa création en 2013.
Aujourd’hui, le réseau Apesa France est présent au sein de 95 juridictions, dont celle de Marseille désormais, et dénombre 5700 « sentinelles », des professionnels du droit sensibilisés à la problématique et qui jouent un rôle de lanceurs d’alerte. Il peut s’agir de juges bénévoles, mais aussi d’huissiers, de mandataires judiciaires ou encore d’agents de l’Urssaf. « L’objectif, c’est d’agir à tous les niveaux pour déprogrammer une crise suicidaire. En outre, les débiteurs peuvent avoir une analyse faussée de la situation, c’est pourquoi il faut les accompagner, les écouter », détaille l’entrepreneur Bertrand Bigay, président de l’Apesa Provence.
Une vingtaine de juges formés à Marseille
Dans un premier temps, à Marseille, une vingtaine de juges « sentinelles » seront formés par des psychologues du réseau. « Nous ne demandons pas au juge de traiter les cas de détresse, mais de les détecter puis les signaler », précise Marc Binnié, à l’occasion de la signature de la convention avec le président du tribunal de commerce, Jean-Marc Latreille. Pour cela, surtout, exit l’empathie et la bienveillance, qui peuvent aggraver la situation. Marc Binnié conseille une démarche plus simple : « Il faut toujours demander à un chef d’entreprise comment il va avant de démarrer une audience.» Une question toute simple, qui peut révéler un mal-être profond. Une fois alertés, les psychologues du réseau rappellent « en moins de 30 minutes » l’entrepreneur pour lui proposer cinq consultations gratuites.
Le dispositif est donc plus que nécessaire, admet le président du tribunal Jean-Marc Latreille, qui reconnaît lui-même s’être senti quelques fois impuissant face à la détresse et aux larmes de certains chefs d’entreprise. « Dans ce genre de situation, on se sent complètement démuni », constate-t-il. Dans un premier temps, la juridiction s’était tournée vers l’association 60 000 rebonds, qui agit plutôt a posteriori pour aider les entrepreneurs à rebondir après un échec entrepreneurial, alors que l’Apesa intervient en amont, pour prévenir les risques psychiques.
Pour l’heure, le tribunal préfère concentrer ce dispositif sur les entrepreneurs confrontés aux procédures collectives mais n’exclut pas de l’élargir à terme.
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