L’idée est à l’image des cafés suspendus qui ont fleuri un petit peu partout en ville ces dernières années. Mais ici, plutôt que d’acheter un café pour une personne qui ne pourrait pas se l’offrir, il est d’usage d’offrir un repas ou simplement quelques euros en guise de participation. « Nous avons un tableau dans le restaurant où nous notons le nombre de repas disponibles qui ont été offerts », explique Jade à l’origine du projet. En trois ans, une petite centaine de personnes a déjà pu bénéficier de la générosité des clients du restaurant. « Notre volonté est très simple : c’est que tout le monde puisse bien manger, même les plus pauvres ! »
Bio et végétarienne, la cuisine des Ondines est saine et préparée à partir de légumes locaux même si les plats, eux, viennent des 4 coins du monde. Samossa, pad thaï, mafé, couscous… un seul coup d’œil à son assiette suffit pour être transporté et oublier, le temps d’un repas, des soucis parfois trop pesants. Du lundi au vendredi, Les Ondines propose trois formules qui changent tous les midis au grès des inspirations des cuisiniers et de la saison. Ici rien d’industriel, tout est fait maison, même le pain ! « Cela nous permet de ne rien gaspiller et de dépenser moins d’argent ! »
« Tout le monde peut mettre la main à la pâte ! »
Derrières les fourneaux, les profils sont aussi éclectiques que les repas proposés. « Stagiaires, bénévoles, professionnels ou non… Nous avons des personnes qui viennent de tous horizons. Tout le monde peut venir et mettre la main à la pâte. D’ailleurs, quelle que soit la personne qui vient taper à ma porte et quel que soit son besoin, je dis oui ! ». Aux Ondines, plus qu’ailleurs, la cuisine joue son rôle social en aidant les personnes qui en ont besoin à prendre confiance en elle et à aller de l’avant. Pour d’autres, c’est un bon moyen de se former au végétarisme ou simplement pour le plaisir d’aider et de donner de son temps. « Je ne fais rien de plus que de mettre à disposition un espace et des moyens pour que ceux qui souhaitent accomplir leur rêve », affirme modestement Jade.
Et cette générosité dont elle fait preuve chaque jour lui est bien rendue. « Je travaille avec des agriculteurs qui vendent leurs légumes sur le marché paysan du cours Julien à Marseille. Certains me donnent même leurs invendus ! C’est fou la solidarité que l’on trouve à Marseille, je n’ai jamais connu ça à Paris ! », s’étonne encore cette Marseillaise d’adoption pourtant arrivée il y a une dizaine d’années.
« Un restaurant pour les autres »
Business woman dans une autre vie c’est un accident qui l’oblige à lâcher du lest, suivi d’une rencontre, qui vont changer la vie de Jade. « Tous les matins en amenant mon fils à l’école je croisais une dame avec qui j’ai commencé à discuter et avec qui des liens ont commencé à se tisser. Un jour, elle m’a raconté son histoire, ça m’a complètement bouleversée. » Sans papier, Aïcha venait de se faire expulser de l’hôtel dans lequel elle vivotait avec son enfant, faute de pouvoir honorer ses dettes. « Mon mari et moi n’avons pas hésité, nous l’avons hébergée chez nous. Elle est restée plus d’une année. Elle nous cuisinait des plats marocains si merveilleux que nous avons eu l’idée de créer un restaurant dans lequel nous pourrions l’embaucher pour qu’elle puisse avoir son indépendance financière et des papiers. » L’idée n’avait pas fini de germer que Jade trouvait l’emplacement de son futur restaurant où Aïcha allait être employée en CDI en tant qu’aide cuisinière.
« J’ai voulu créer une association car je voulais couper les ponts avec mon passé d’entrepreneur, c’est un restaurant pour les autres. Tout ça, c’est en grande partie grâce à Aïcha, c’est elle qui m’a appris la solidarité ! » A 52 ans, Jade ne réalise toujours pas très bien tout le chemin qu’elle a parcouru et le monde qui la sépare aujourd’hui de sa vie passée.
Les Ondines, ouverts du lundi au vendredi de 11 h 00 à 15 h 00
19 Rue Saint-Bazile, 13001 Marseille.