Gomet’ apporte sa contribution en prélude au Congrès mondial de la nature avec la publication de dix avis d’experts de notre région qui éclairent à partir de leur expérience et de leurs analyses les problématiques territoriales. Ces textes ont été publiés dans notre Guide de l’élu éco-responsable qui a été adressé cet été à 752 décideurs de notre territoire. Pour ce quatrième volet, Luc Petitpain, chargé de mission à la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal), donne les clefs pour relever le passage à l’énergie photovoltaïque dans les collectivités.
Luc Petitpain
Luc Petitpain, est chargé de mission pour le développement des énergies renouvelables (EnR) au sein du service « énergie et logement » de la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement, la Dreal Paca à Marseille. Originaire de Nancy, il est diplômé de l’ENTPE, l’École nationale des travaux publics de l’État qui s’annonce « École de l’aménagement durable des territoires » et il est titulaire d’un master « Urbanisme et aménagement urbain ». Il est à la Dreal depuis 2014 et est engagé dans la société civile dans l’animation d’un supermarché coopératif à Marseille.
2 870 heures d’énergies à transformer…
Les Bouches-du-Rhône sont le département le plus ensoleillé de France avec 2 870 heures d’ensoleillement par an. Le développement du photovoltaïque est donc, sans nul doute, l’enjeu principal en matière d’énergies renouvelables sur ce territoire. Les élus locaux ont un rôle majeur à jouer dans ce développement en organisant la concertation locale avec leurs concitoyens, notamment pour identifier, à une échelle pertinente, les espaces les plus propices pour accueillir des installations solaires.
À titre d’exemple, la Métropole Aix Marseille Provence s’est lancée l’an dernier dans l’élaboration d’un Schéma directeur des énergies qui devra être retranscrit dans son Schéma de cohérence territorial (SCoT) ou son Plan local d’urbanisme (PLU) pour devenir prescriptif. Les services de l’État accompagnent la Métropole dans ce travail. La réalisation d’un document de ce type est particulièrement importante dans le cas du photovoltaïque pour anticiper les conflits d’usage dans l’occupation spatiale et apporter aux futurs porteurs de projet des éléments facilitant l’instruction de leurs dossiers d’autorisation.
Le développement sur les toitures des bâtiments est à faciliter et promouvoir
Dans le schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires, le SRADDET, la Région Provence Alpes Côte d’Azur mise fortement sur le développement du photovoltaïque en toiture des bâtiments et des ombrières de parkings. Ces installations sont vouées à représenter les deux tiers de la production solaire locale. Pour faciliter la réalisation de ces installations, les documents d’urbanisme peuvent, par exemple, prévoir des obligations relatives aux énergies renouvelables pour les nouveaux bâtiments. La loi impose d’ailleurs, depuis l’an dernier, de végétaliser ou d’installer des panneaux solaires sur les toitures de toute construction neuve de plus de 1 000 m2 d’emprise au sol.
Les collectivités peuvent également montrer l’exemple en mobilisant leur propre patrimoine. Toutefois, développer du photovoltaïque en toiture nécessite de s’entourer de certaines compétences. Par exemple, sur le bâti ancien, toujours s’assurer qu’il n’y a aucun risque pour l’intégrité de la structure. Autre exemple, le Grand port maritime de Marseille a fait procéder à une analyse technique et économique de son potentiel photovoltaïque sur toiture pour objectiver ses choix.
Orienter le développement des centrales au sol sur les espaces de moindre enjeu
Pour le développement des centrales photovoltaïques au sol, deux types de terrains sont à distinguer :
- D’une part, les terrains dits « dégradés » ou sans enjeu particulier ;
- D’autre part, le foncier comprenant un certain nombre d’enjeux plus ou moins forts.
Les premiers sont naturellement à privilégier et présenteront le processus d’autorisation administrative le plus fluide. Toutefois, les professionnels relèvent que beaucoup de sites dans les zones qualifiées « sans enjeu identifié a priori » ou à enjeu « modéré » présentent des contraintes dimensionnelles ou topographiques qui limitent le potentiel de développement de projets. Ainsi, l’objectif régional ne pourra sans doute être atteint sans investir des zones à enjeux, mais il conviendra de chercher à les minimiser.
Les opérateurs privés manquent de légitimité pour justifier pleinement du meilleur choix d’un site à l’échelle d’un territoire. Les collectivités peuvent, ici, avoir un rôle décisif en cartographiant les enjeux territoriaux et en identifiant les espaces de moindre enjeu notamment à partir de la grille des enjeux établie par le cadre régional pour le développement du photovoltaïque.
Autrement dit, avant de se lancer dans un projet, il est primordial d’enclencher un travail de « dérisquage » permettant de retenir les secteurs les mieux appropriés. La Région Provence Alpes Côte d’Azur peut financer jusqu’à 50 % de ces études au travers de l’appel à manifestation d’intérêt (AMI) foncier dérisqué.
Par ailleurs, dans le cadre de l’étude d’impact du projet, un développeur, qu’il soit public ou privé, devra notamment prouver que le terrain d’assiette de son projet est celui de moindre impact. Le travail de « dérisquage » précédemment cité facilitera cette démonstration, notamment pour justifier de l’absence de site alternatif plus propice en cas d’impact résiduel (défini après avoir mis en œuvre la séquence éviter/réduire/compenser ou ERC) sur des espèces protégées. Dans ce cas, le porteur de projet devra demander une dérogation pour destruction d’espèces protégées auprès du préfet, qui n’est pas de droit (elle peut être refusée). Un avis consultatif est d’abord demandé au Conseil national de protection de la nature (CNPN) ou au Conseil scientifique régional du patrimoine naturel (CSRPN) selon les espèces concernées.