Les mystères de Marseille
Quelques-uns se souviennent de René Lucet. Cet ancien de Sciences-Po, avait été nommé à la direction de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie des Bouches-du-Rhône. Pour faire le ménage, disait-on alors, et mettre au jour des pratiques syndicales peu orthodoxes. Le 4 mars 1982, il mettait fin à ses jours. Avec deux balles mortelles, concluait l’autopsie. Pour autant l’affaire fut classée. Comme plus tard, celle des frères Fernand et Christian Saincené qui se suicidèrent dans leur garage et leur voiture, à Tourtour (Var). Un tuyau branché sur le pot d’échappement. Les deux 48 et 52 ans étaient plus ou moins barbouzes et avaient leurs entrées dans les partis de la droite marseillaise, a-t-on dit et écrit alors. Pas clair, mais sans suite. Nous étions en 1994. Pas plus limpide la disparition d’un chef d’entreprise depuis 2002. Edmond Goubert patron de Marseille manutention et considéré comme le big boss du port autonome. On ne l’a toujours pas revu. Pour les quatre on a parlé d’assassinat, puis c’est le silence qui s’est lesté de plomb. Comme on le disait naguère les mystères restent entiers.
Danielle Thompson va faire un miracle
Ces derniers jours à Paris. Un petit café, dans une brasserie en face de la comédie Française. Un homme entre. Il retrouve une dame. La voix est connue. C’est Guillaume Gallienne. On écoute, sans trop être indiscret. Pas de doute. Un timbre haut perché. Précieux. Agréable en tout cas, comme peut l’être celui d’un sociétaire de la maison de Molière. Réflexion : Danielle Thompson l’a choisi pour jouer Cézanne. On attend avec intérêt, comment cette voix pourra se métamorphoser en celle du maître aixois. Forcément rugueuse, si l’on se fie aux réflexions de ses contemporains. Mais le septième art fait des miracles. Rendez-vous dans les salles obscures. Le 21 septembre prochain avec Guillaume Canet en Zola.
Aix et les sciences humaines
Il y a quelques années encore – c’était avant la fusion des trois universités d’Aix-Marseille (2012) – on redoutait toujours du côté de l’avenue Schumann à Aix, à la fac de Droit, la proximité de la faculté des Lettres. Le représentant de l’Uni, syndical étudiant de droite majoritaire chez les juristes, qualifiait encore ses voisins des sciences humaines de « cosaques ». La grande université unique n’a sans doute pas tout à fait effacé ces petites haines recuites. Mais, c’est tout un symbole, c’est un professeur de droit, Hervé Isar, vice- président chargé du patrimoine qui veille désormais aux travaux qui devraient, dans ce quartier des Fenouillères, offrir des locaux rénovés aux étudiants. Tant mieux car on a aujourd’hui, à l’heure des extrémismes, communautarismes, terrorismes plus que jamais besoin d’historiens, sociologues, philosophes bien formés. Dans des locaux dignes des enjeux.
2A plus 2B égale…
Jean-Guy Talamoni, président de l’assemblée de Corse, considère que « la France est un pays ami ». Il affirme de facto que l’île de beauté n’est pas française. A suivre son raisonnement, on peut également induire que toutes ses plaques d’immatriculation circulant à Marseille, frappées d’un 2A ou d’un 2B, sont celles d’automobilistes étrangers en villégiature. Séjour qui dure car une légende veut que beaucoup ont choisi cette référence insulaire, en raison du fait qu’elle est « dissuasive». On aurait, dit toujours la rumeur, plus d’hésitation à insulter un automobiliste immatriculé en Corse, qu’un autre. Précieux dans une ville où l’on s’agite beaucoup au volant, dès que débute un bouchon ou que commence une manœuvre. Tout cela est désarmant.
La Marseillaise qu’on doit siffler
Ils font le buzz. L’émission de télé réalité « Les Marseillais en Afrique du Sud » distribuée et diffusée par W9 (Groupe de M6) fait le bonheur de ceux qui ne peuvent voir la ville qu’en caricature. Une des équipières de cette bande de tarés majuscules vient de s’illustrer en passant en boucle sur le zapping. Elle s’interroge sur ce portrait qu’elle découvre partout dans ce pays du bout de l’Afrique. « C’est le type qu’on voit dans tous les films non ? » pérore la décolorée. Triste constat: la réputation de Nelson Mandela n’a donc pas atteint tous les cerveaux marseillais. Il faut d’urgence remettre une médaille de la ville à cette perruche et un dictionnaire des noms propres en prime. On le voit, rien de neuf sur W9.
L’Algérie, cartes en main
On a jusqu’au 2 mai, pour découvrir l’exposition du Mucem, Made in Algeria. Zahia Rahmani responsable du domaine « Art et Mondialisation » (Institut national d’histoire de l’art) et Jean-Yves Sarazin, directeur du département des cartes et plans de la Bibliothèque nationale Française, proposent dans le vaisseau aux voiles de dentelle de béton, une traversée salutaire. Longtemps le tintamarre d’une histoire collective (celle des rapatriés, puis des « libérateurs ») a masqué l’épaisseur d’une autre histoire, celle de l’Algérie depuis la Renaissance jusqu’à la colonisation. Les documents réunis au Mucem offrent des chemins de lecture différents. Notamment à travers un patrimoine cartographique exceptionnellement réuni Marseille. C’est un voyage qui ajoute encore une fois à la belle réussite de ce musée.