Il aurait pu renoncer à ce traditionnel rendez-vous politique avec la presse. Exercice périlleux où il excelle, s’enthousiasmant à livrer quelques petits cours d’histoire, et répondant avec sa verve habituelle. Depuis le drame de la rue d’Aubagne, le 5 novembre dernier, les prises de paroles et les apparitions de Jean-Claude Gaudin, se font rares. Et pour cause… La gestion municipale est mise à mal et avec elle le maire LR de la deuxième ville de France. Mais Jean-Claude Gaudin n’aime que trop ces temps d’échange avec les journalistes, alors malgré la situation qui pèse sur la municipalité, son capitaine maintient son cap.
L’heure n’était pas au bilan, même si l’édile, a égrené quelques réalisations en cours. C’est surtout vers l’avenir qu’il se tourne (lire notre précédent article). Sur ses 15 prochains mois. « Je compte bien aller jusqu’au bout de mon mandat n’en déplaise à certains ». Son ultime mandat, marqué du sceau des effondrements dans le quartier de Noailles. Un drame qui restera gravé dans sa « mémoire de maire, il le restera tout autant dans ma vie d’homme », déclare Jean-Claude Gaudin, en ouverture de son discours. En rendant hommage aux victimes, à leurs proches, c’est aussi l’occasion pour lui de répondre aux « critiques infondées » concernant sa politique et de « repousser les commentaires désobligeants et les stigmatisations maladroites, les accusations indignes et les cruelles injustices.»
Municipales 2020 : « Il n’y a qu’un candidat déclaré, il se peut qu’il y en ait d’autres »
Alors s’il doit parler d’un bilan, c’est pour dresser celui des suites de la catastrophe : plus de 230 immeubles et 1973 personnes évacués, dont 1371 hébergées par la ville, 68 immeubles ont été réintégrés (399 personnes), 528 personnes ont retrouvé un logement, 71 baux d’occupations ou conventions d’occupation ont été signés… et pour l’heure 14 millions d’euros ont été déboursés par la Ville pour la gestion de la crise. Alors que le ministre du Logement, Julien Denormandie, est à Marseille, Jean-Claude Gaudin affirme que la Ville pendra « toute sa part dans le plan de lutte de la Métropole contre l’habitat indigne ». A ce titre, il évoque la mise à disposition des logements rue de la République. Il s’agit plus exactement d’un accord avec les propriétaires (lire par ailleurs). La Ville a identifié, avec Primonial [en partie propriétaire de la rue] et Covivo, (nouveau nom de la foncière des régions) 50 logements où l’association Soliha va pouvoir reloger les familles. 25 sont habitables immédiatement et 25 autres devront faire l’objet de travaux. « Ces quelques éléments rappellent que je suis plus que jamais présent et attaché au règlement de cette situation dans les meilleurs délais. Non, je ne me cache pas. Oui, j’agis et j’agis sans relâche, sur tous les dossiers et sur tous les fronts du développement de Marseille ».
Attractivité du territoire, aménagement, désendettement… Jean-Claude Gaudin est revenu sur quelques grands projets, insistant sur une priorité : l’emploi. A l’œuvre, à la manœuvre, Jean-Claude Gaudin n’entend pas laisser le bateau municipal sans capitaine. Il reste le maître à bord pour gérer les intérêts de la cité phocéenne à laquelle il s’est « donnée ». Il ne cédera pas son fauteuil si facilement, même pour son propre camp. « Si vous venez me parler d’élections et de succession, je vous répondrai simplement travail et ambition. Chaque chose en son temps… » Et d’ajouter : « Nous avons un an pour nous déterminer. Pour le moment, il n’y a qu’un candidat déclaré, il se peut qu’il y en ait d’autres ». Seul prétendant en lice, pour l’instant, le sénateur (LR) Bruno Gilles utilise la concertation pour construire son programme et prône une liste ouverte. La présidente du Département des Bouches-du-Rhône et de la Métropole Aix-Marseille Provence, elle, « ne s’interdit rien », tout comme Renaud Muselier, président de la Région Sud.
Accélérer la fusion avec une loi en 2019
Dans la deuxième ville de France, où les velléités politiques sont fortes, des « marcheurs » aux « insoumis », Jean-Claude Gaudin concède qu’il y aura bien une liste de la droite républicaine, mais prévient qu’il soutiendra celle sur laquelle figurera « le plus d’adjoints qui ont contribué à m’aider à transformer Marseille ». Il a pu compter dans cette métamorphose sur l’aide financière du Département pour booster les projets qui peinaient à se concrétiser. Et avec la Métropole « nous maintiendrons l’ambition que nous avons développée pour le centre-ville, premier pôle économique métropolitain pour lequel nous avons déjà engagé des efforts conséquents pour une qualité de vie meilleure ». Jean-Claude Gaudin s’est d’ailleurs dit « farouchement pour » la fusion entre la Métropole et le Département, sur l’ensemble du périmètre départemental, c’est-à-dire en intégrant le pays d’Arles. « Je pense qu’il faut aller plus vite. Il faut une loi maintenant dans l’année 2019, pour que le parlement s’en saisisse.» Et d’interroger sur le mode de scrutin : « Est-ce qu’on prend le modèle du conseil régional ? A mon avis, ils [l’Etat] n’y sont pas très favorables parce qu’ils ont peur de perdre », mettant en avant le risque prégnant du Rassemblement national. « Ils sont plutôt sur un système qui préfigurerait ce que le pouvoir veut pour les élections législatives futures », déclare-t-il.
Jean-Claude Gaudin : « Je suis toujours là »
Jean-Claude Gaudin sait que viendra le temps « de refermer la page de toutes ces années passées à la tête de cette ville » et à ce moment-là, «la rue d’Aubagne prendra toute sa place ». En attendant, Jean-Claude Gaudin tient toujours la barre jusqu’en 2020, compte sur sa majorité « forte et nous resterons jusqu’au bout ». Lui qui ne se dit pas « plus vertueux qu’un autre », contant et comptant ses victoires politiques au détour d’une question d’un journaliste, évoque furtivement ses mémoires, qui relateront l’ensemble de sa carrière. Un livre auquel il mettra un point final seulement en 2020. Mais avant : « Je suis toujours là ».