Ne leur dites plus que, dans la vie, leurs rêves ne peuvent se concrétiser. Parce que « rêver », est devenu le moteur de ces jeunes. Ils s’appellent Ramy, Younès, Akram, Abde, Ben… et comme d’autres, issus des quartiers nord de Marseille, ils préfèrent prendre leur destin en main, plutôt que de chanter ce célèbre refrain d’IAM : « Tant pis, on n’est pas nés sous la même étoile ». A 18 ans, Ramy est en première année de médecine, Akram a obtenu son bac sciences techniques des laboratoires avec mention assez bien, quant à Younès, il est tout jeune bachelier lui-aussi. Et pourtant… pour en arriver là, ils ont dû faire preuve d’une persévérance à toute épreuve. « On a tous le souvenir d’avoir été bridés par les profs, mais aussi de s’être bridés nous-mêmes, confie Ramy, avec son maillot de foot sur le dos floocké du mot « président ».
Devant le stade du Merlan-Luchesi, dans le 13e arrondissement de Marseille, le jeune homme raconte comment les uns et les autres ont décidé de suivre leur propre voie, plutôt que de se conformer aux orientations des enseignants. « Ces petites histoires », c’est ce qui caractérise cette jeunesse, venue ce soir-là des cités des Lauriers et des Oliviers, dans le quartier de Malpassé (13e), pour taquiner le ballon rond. Coupe du monde oblige ! Si ce match de fin d’année, organisé le 26 juin dernier, peut paraître ordinaire, il est seulement en apparence, car sur le terrain les entrepreneurs locaux sont venus se mesurer aux jeunes dans un seul but : créer une dynamique de réussite et tirer vers le haut les talents !
Impact Jeunes, une méthode inspirée de la Harlem Children’s Zone de New-York
Cette ambition s’inscrit dans le cadre du programme Impact Jeunes, expérimenté depuis mars 2017, à l’échelle de trois quartiers prioritaires des Bouches-du-Rhône : Parc Bellevue – Saint-Mauront (3e arrondissement), Les Lauriers – Les Oliviers (13e) et Tarascon). La démarche innovante, portée par les Apprentis d’Auteuil, déploie une nouvelle méthodologie d’implantation sur le territoire. Celle-ci consiste à aller vers les jeunes, travailler avec les acteurs locaux et avec les entreprises pour trouver à la fois une solution globale et sur-mesure à chaque situation. « Avec des jeunes entre 13 et 30 ans, vous pouvez imaginer que le grand écart est quotidien, explique Julie Landon, booster territoriale Impact Jeunes. On travaille à la fois avec les collégiens sur les stages de 3e, la découverte des métiers, mais on peut aussi travailler avec des lycéens sur une inscription à Parcoursup, par exemple, ou sur une poursuite d’études en alternance avec la diffusion d’un CV auprès des entreprises partenaires d’Impact Jeunes, et on construit aussi avec les associations du territoire des actions de remobilisation, tout ça dans une visée d’emploi auprès des jeunes ».
Une méthode « hyper-ciblée et locale », qui s’inspire de la Harlem Children’s Zone impulsée dans les quartiers nord new-yorkais, il y a quelques années. Le principe est d’aller à la rencontre des jeunes, bloc par bloc, et de trouver une solution à tous, l’effet de contagion positive permettant d’inverser la spirale du chômage dans les quartiers.
« Ce que vous vivez, c’est ce que nous vivons tous les jours en tant qu’entrepreneurs »
Sur cette base, les premières rencontres entre les jeunes et les entrepreneurs du territoire dans le cadre du dispositif Impact Jeunes ont déjà porté leurs fruits. Au-delà des contacts, c’est désormais l’envie et le désir de réussir qui animent ces futurs actifs, qui ont décidé de mettre en œuvre une démarche intitulée « L’Ecole des Numéros 10 ». Il y a quelques mois, dans le cadre de ses activités, Impact Jeunes a fait appel à l’association « Moderniser sans exclure », qui a produit un film d’auto-médiatisation avec un groupe de jeunes habitants aux Lauriers.
Durant trente minutes, ils s’expriment sur leurs difficultés dans leur quartier, leur recherche d’emploi, ou d’alternance… Ce film a été diffusé à l’occasion d’une cession devant une dizaine d’entrepreneurs. « Immédiatement, ils ont adhéré aux histoires des jeunes », reprend Julie Landon. Posté sur le réseau Linkedin, le film a été visionné plus de 10000 fois, même jusqu’à San Francisco, « essentiellement par un réseau d’entrepreneurs », souligne Patrice Martin, co-fondateur et dirigeant de Q3 Advocacy.
Il explique ce succès, « car au fond ce que vous vivez, c’est ce que nous vivons tous les jours en tant qu’entrepreneurs au-delà des apparences, dit-il à l’attention des jeunes après le match. Tous les jours, on rêve un peu plus grand que ce qu’on fait, on se confronte à des difficultés, on tombe, on ne se relève pas, parfois, quand on est entrepreneurs… Et on s’est senti très en affinité avec vos histoires. On ne vous regarde pas d’en haut en nous disant on va vous tendre la main, mais dans les yeux, à égalité ».
N°10, recevoir et transmettre
Alors ensemble ils ont décidé d’aller plus vite et plus loin avec « L’Ecole des numéros 10 ». Une fabrique de leaders inspirés et inspirants, entraînés pour devenir les meneurs de jeu de demain. Un centre d’entrainement différent, qui sort des schémas classiques permettant aux apprentis leaders « de développer des compétences que l’on n’apprend pas à l’école par exemple, comment s’exprimer, inspirer son auditoire, mais aussi mieux se connaitre pour mieux se projeter vers le futur, souligne Julie Landon. Ils se connecteront également à d’autres N°10 inspirants, des entrepreneurs, des sportifs, des hommes politiques…, qui vont leur transmettre leur savoir-faire et leurs secrets. »
« L’Ecole des numéros 10 » a pour ambition de lancer sa première promotion en septembre avec dix jeunes et dix entrepreneurs pour former une équipe qui gagne !