Six ans après la faillite de Lfoundry, la zone de Rousset entrevoit enfin un nouvel avenir sur le site de l’usine de microélectronique. En partenariat avec l’Etat, la Métropole et la Région, la Ville de Rousset travaille sur un grand projet industriel mêlant start-up et ETI sur les 20 hectares de foncier et les 65 000 mètres carrés de plancher toujours en friche. « Nous prévoyons d’y installer un pôle industriel de grande envergure. On pourrait le comparer au projet Henri Fabre centré sur l’aéronautique à Marignane mais autour de la microélectronique et des mobilités alternatives. Il sera également beaucoup plus grand », avance François Cordeau, directeur du développement économique à la mairie de Rousset. Ces nouvelles perspectives doivent permettre de tourner la page d’un gâchis économique qui a ébranlé tout un écosystème en 2013.
Un pan de l’histoire de la zone s’effondre avec LFoundry
L’histoire de Rousset est intimement liée à celle de la microélectronique française. La première zone industrielle des Bouches-du-Rhône a officiellement été créée en 1961 mais c’est à la fin des années 70 avec l’installation de la première usine de micropuces, Eurotechnique, ancêtre de STMicroelectronics, qu’elle prend pleinement son essor. En 1985, d’anciens cadres du groupe créent European Silicon Structures qui va rapidement grandir puis être rachetée par l’américain Atmel en 1995. En 2010, le groupe la cède à son tour à l’allemand Lfoundry qui provoquera la chute de ce mastodonte local de plus de 650 salariés. Le tribunal de commerce de Paris scelle le sort du champion régional en décembre 2013. Six ans plus tard, la blessure est encore vive. D’autant plus que la liquidation a trainé en longueur bloquant toute possibilité de relancer un projet sur le site : « Le procédures judiciaires ont été très compliquées. Aujourd’hui, c’est Microchip, le groupe américain qui a racheté Atmel qui est propriétaire du site. Il a enfin commencé les opérations de dépollution de l’usine cette année. On devrait avoir un site propre au printemps prochain », annonce François Cordeau.
Sportimmo et Microchip dévoilent le projet X
Les services économiques locaux voient enfin le bout du tunnel et ont commencé à travailler sur l’avenir du site. « Il bénéficie de superbes atouts pour accueillir une nouvelle activité industrielle avec l’eau du canal de Provence, une usine de rejets liquides, un réseau électrique très stable… », indique le responsable de la zone de Rousset. Les contours exacts du projet sont toujours en cours de discussion mais le groupe immobilier Sportimmo a présenté en début d’année, en collaboration avec Microchip, un premier document de travail. Dans une brochure de 14 pages, il dévoile le « Projet X » qui doit permettre la revitalisation industrielle du site. « Les entreprises cibles seront des entreprises ETI ou grands groupes souhaitant déployer leur production dans le domaine des nouvelles technologies. Cette ou ces entreprises pourraient déployer leur activité dans le bâtiment B3 », précise le document. Et selon François Cordeau, « plusieurs candidats se sont déjà déclarés intéressés ». Le bâtiment B3 est l’édifice historique d’Atmel construit en 1996. Avec plus de 42 000 mètres de surface de plancher, c’est le plus gros bâtiment du site. Il a été spécifiquement conçu pour la fabrication de semi-conducteurs comprenant, à l’intérieur du bâtiment, tous les équipements nécessaires à cette fabrication (eau ultra pure, locaux de transfert de gaz, d’air et matières chimiques). L’ancienne usine Atmel comprend deux autres édifices, le B4 de 19 700 mètres carrés, et le B5 plus modeste avec 4 800 mètres carrés. Pour cette deuxième partie, le promoteur avance deux scénarios possibles. Première idée, « On aimerait créer un accélérateur de PME industrielles, le but étant de mutualiser les équipements du site pour créer des synergies », explique François Cordeau. Il ciblerait des entreprises soit dans le domaine de la microélectronique pure, soit dans des domaines transverses, en lien étroit avec le numérique et la microélectronique comme l’internet des objets, les nanotechnologies, les biotechnologies ou encore les énergies propres. Le direction du développement économique de Rousset ajoute qu’il aimerait voir se développer de nouvelles activités autour de la mobilité. « J’aimerais construire un hub des mobilités innovantes avec notamment les nouveaux carburants ou encore les drones pour le transport de charges. On pourrait même imaginer voir rouler un jour le premier véhicule autonome sur la zone de Rousset », lance-t-il.
Deuxième hypothèse, une partie des bâtiments pourra être dédiée au développement de projets collaboratifs. « Il pourra regrouper par exemple les plateformes du centre intégré de microélectronique (CIM) PACA, le pôle SCS, l’IoT center, le security center, Connectwave, une école de formation en lien avec le besoin des entreprises de la zone industrielle, un ou plusieurs laboratoires de recherche », avance le projet X de Sportimmo et Microchip. Côté calendrier, aucune date n’est fixée pour la finalisation du projet. Il ambitionne par contre de recréer à terme un millier d’emplois sur l’ensemble du site.
L’emploi résiste sur la zone malgré les fermetures
Lfoundry n’a pas été la seule entreprise de la zone à mettre la clé sous la porte. Nexcis, Crosslux et en début d’année Sunpartner… Pour ce dernier, les pouvoirs publics cherchent activement un successeur pour s’installer dans les 2 000 mètres carrés laissés par l’entreprise. Malgré les multiples défections, la zone industrielle a réussi à préserver son dynamisme. « Nous avons retrouvé le niveau d’emploi d’avant la faillite de Lfoundry », se félicite François Cordeau. Depuis 2014, elle a gagné 670 emplois et a accueilli 53 nouvelles entreprises contre onze départs seulement. Elle réunit désormais 9 000 salariés et prévoit de croître encore. « Nous avons encore plusieurs parcelles disponibles pour accueillir de nouvelles sociétés avec des prospects très chauds », affirme le directeur de la zone. Et plusieurs entreprises déjà installées ont des projets d’extension en cours comme Simagec qui a racheté 5 000 mètres carrés de terrain pour réaliser un nouveau bâtiment. Le site pilote de recyclage de panneaux solaires de Veolia devrait également monter en puissance dans les prochains mois.