Vous avez pris la direction de l’Ademe Paca le 1er septembre. Quelle est votre vision du rôle de l’agence dans la région ?
Yves Le Trionnaire : Nous avons trois grands axes à travailler : la transition énergétique, l’économie circulaire et la gestion des déchets ; et enfin la mobilisation des territoires. L’Ademe intervient en soutien des projets qui ont besoin d’un petit coup de pouce avant d’être financièrement autonome. Nous sommes un organisme de transition dans tous les sens du terme car nous aidons aussi à faire la transition des initiatives en phase de maturation. On permet de rendre un projet compétitif jusqu’au point de bascule où il sera indépendant.
Si on la compare aux autres régions, Provence-Alpes Côte d’Azur est-elle en avance ou en retard sur les questions de développement durable ?
Y. L T. : Sur les énergies renouvelables, Paca est très bien positionnée. La région s’est particulièrement bien développée sur le photovoltaïque. Par contre, sur l’éolien, on est bien moins doté. Concernant la gestion des déchets, ce n’est pas un secret, nous ne sommes pas très bons. Il y a incontestablement une volonté de s’améliorer mais ça passe par un changement complet des mentalités et des process installés historiquement. Pendant des années, la région n’avait pas de problème de stockage des déchets alors la question ne se posait pas. Aujourd’hui, avec le développement de nos territoires, on arrive à saturation. Il faut créer de nouvelles infrastructures et moderniser les plateformes existantes. Et puis, longtemps, il y a eu des rivalités entre certaines collectivités locales qui bloquaient la mise en place de solutions. Ce fut l’une des particularités qui expliquent le retard de la région sur la gestion des déchets.
Aujourd’hui, les collectivités locales travaillent plus avec l’Ademe ?
Y. L T. : Il y a eu clairement un changement de mentalités chez les politiques.Ils sont aujourd’hui obligés d’élaborer de plus en plus de documents stratégiques en y intégrant les questions de développement durable : Plan de déplacement urbain (PDU), Schéma de cohérence territoriale (Scot), Plan climat air-énergie territorial (PCAET)… Nous sommes là pour les aider sur ces questions. Beaucoup de collectivités n’ont pas les compétences ou les ressources suffisantes pour répondre aux nouveaux enjeux environnementaux.
Quelles sont vos relations avec la Métropole Aix-Marseille Provence ?
Y. L T. : Nous travaillons beaucoup avec eux sur la qualité de l’air. Ils ont par exemple répondu à l’appel à projets sur les zones à faibles émissions. La Métropole nous a contacté pour réaliser une grande étude pour créer cette zone. A Marseille, il ne manque plus grand chose pour y parvenir. La semi-piétonisation du Vieux-Port et du bas de la Canebière va dans ce sens, il suffirait de poursuivre un peu plus haut pour aller au bout d’une zone piétonne qui réduirait considérablement la pollution de cette ville. Toutes les grandes métropoles européennes ont franchi le pas avec des résultats super positifs. Et je ne parle pas seulement des pays du Nord. Ce sont les espagnols et les italiens qui sont le plus en pointe. L’argument selon lequel la culture méditerranéenne empêcherait les projets d’avancer ne tient pas. Il n’y a plus aucune raison pour qu’on ne puisse pas le faire à Marseille.
En 2018, le budget de l’Ademe Paca était d’environ 24 millions d’euros. Est-ce qu’il va augmenter ?
Y. L T. : Globalement, les crédits augmentent chaque année même si ce n’est pas faramineux. En 2020, le gouvernement a annoncé notamment une rallonge de 50 à 100 millions d’euros supplémentaires sur les 300 millions d’euros actuels du fonds chaleur. En région, ça devrait se traduire par une augmentation de 6 à 10 millions d’euros.
Pouvez-vous nous citer quelques projets remarquables financés par ce fonds ?
Y. L T. : On a notamment abondé sur les boucles d’eau de mer Massileo et Thassalia à Marseille. A Nice, il y a un projet de géothermie dans le quartier Meridia que nous finançons. Plus près de Marseille, il y a un gisement géothermique à très gros potentiel à Marignane. Pour l’instant, nous en sommes toujours à la phase de réflexion mais à moyen-long terme, c’est certain qu’on exploitera ce site pour alimenter le territoire.
Vous avez également participé à la création de l’unité de production de biogaz sur l’usine des boues de Sormiou. Y-a-t-il de nouveaux projets de ce type en cours de préparation ?
Y. L T. : Effectivement, on devrait voir d’autres unités de biogaz fleurir sur les sites de retraitement des eaux usées mais pour l’instant, les acteurs privés concernés préfèrent ne pas en parler. Ils souhaitent conserver la maîtrise de la communication alors je ne vais pas révéler leur secret à peine arrivé à l’Ademe. Mais oui, il va y avoir des choses à Marseille notamment. De toute façon, c’est un bon moyen de créer de la ressource supplémentaire avec des déchets non valorisés jusqu’alors. C’est tout bénéfice pour l’exploitant qui aurait bien tort de s’en priver.