C’est presque désormais une tradition. C’est à La Boate à Marseille que la “marche” a commencé. C’est encore ici que le premier acte s’est achevé. Après la victoire d’Emmanuel Macron, pas de triomphalisme. La route est encore longue. Reportage.
« Vous avez vu, ce n’est pas la même ambiance ». Une heure avant la proclamation des résultats, les visages sont plus graves qu’il y a quinze jours. « Au premier tour, on ne s’y attendait pas vraiment… » Mais aujourd’hui, ce 7 mai 2017, « marcheuses » et « marcheurs », comme on les appelle désormais attendent, avec cette impatience des grands jours, à La Boate, à Marseille. C’est dans ce lieu devenu QG de campagne de « En Marche ! » que tout a commencé pour eux, il y a de cela presque un an. Ils attendent un brin angoissés mais confiants, le dénouement de ces longs « mois de combat ».
19h30. La pression monte d’un cran, lorsque les journalistes de différents médias locaux, nationaux voire même internationaux, à l’image d’Euronews, arrivent les uns après les autres. Tous se placent pour trouver le meilleur angle. Pour capter ce moment où se lira sur les visages la déception ou la joie, la désillusion ou la satisfaction. On ne change pas ici, c’est la chaîne du service public qui délivre les premières informations. Petits bugs de réceptions et petites frayeurs de ne pas voir en direct la proclamation des résultats. Tout le monde se déconnectent du wifi, et voilà que les dernières secondes défilent. Serrés les uns contre les autres, les yeux rivés sur le grand écran, les cœurs battent à vive allure dans les poitrines. Le pourcentage s’affiche enfin et l’image du nouveau chef de l’Etat apparaît. 65,8%. Emmanuel Macron devient le nouveau président de la République.
Explosion de joie générale. Sous les crépitements des flashs et des caméras, ils clament « on a gagné ! On a gagné ! » Tous sautent, crient, s’embrassent, pleurent, se félicitent d’y être arrivés. D’avoir gagné, sans ambiguïté. Marine Le Pen n’est qu’à 34,2%. Corinne Versini, référente de « En Marche ! » dans les Bouches-du-Rhône est une nouvelle fois au centre de toutes les attentions. A chaud, elle confie émue « ce qui était important, c’est le score, il fallait vraiment qu’on redresse la France et que l’on donne une leçon à tout le monde. Ça va être un renouveau, on va vraiment écrire une nouvelle page de la politique française. C’est extraordinaire. » Beaucoup sont émus « parce qu’on est parti de rien ».
“Le progrès face à la régression”
L’heure est à la célébration, aux déclarations des uns et des autres. Verre à la main on trinque, le sourire aux lèvres et pourtant, pas de triomphalisme pour autant. Le discours quelques minutes plus tard de Corinne Versini à l’attention de tous ceux qui ont travaillé à ses côtés, frappés aux portes, arpentés les rues le démontre… « Emmanuel Macron l’a fait. Nous l’avons fait ! Le progrès face à la régression. Nous, Français avons décidé de rassembler collectivement. Il y a un an, nous étions peu à y croire. C’est la juste récompense d’un travail fourni sans relâche depuis un an. Le pari est réussi mais il nous faut maintenant transformer l’essai, le premier engagement d’Emmanuel Macron, c’est de remettre de l’éthique dans la politique. » De nombreux défis les attendent et le discours du nouveau chef de l’Etat, est dans la même veine. Grave…
C’est une première victoire de remporter, une seule. Il faudra désormais gagner la bataille des législatives qui s’annonce encore plus difficile. C’est vers ce scrutin désormais que tous les regards se tournent. Patrice Thévenin, candidat à l’investiture « En Marche ! » dans le 5e secteur de Marseille, juge que le score d’Emmanuel Macron n’a rien avoir avec le front républicain qui s’était dressé en 2002, lors du face-à-face, Chirac-Jospin. « Si nous avions fait 80%, cela aurait été le cas, mais là, cela montre que ce sont des votes d’adhésions au programme ».
Issu du MoDem, il estime que pour remporter les législatives il faudra une émulsion forte dès le départ, “une véritable impulsion », mais surtout il faudra au nouveau président bien choisir son gouvernement. Une femme au poste de premier ministre serait une « bonne chose, car elles ont un autre regard, cela manque en politique ». Puis il lâche quelques noms sur sa vision du gouvernement Macron : Christine Lagarde, NKM, Christian Estrosi, Apparu… « Il faut que le gouvernement représente l’ensemble des Français au-delà désormais du clivage gauche-droite, ce sont les idées qui comptent ».
Cap sur les législatives…
L’effervescence retombe. Tous pendus au téléphone tentent désormais d’obtenir les résultats locaux. « Grosse mobilisation dans les quartiers Nord » peut-on entendre. Dans le 13e, le plus fort pourcentage s’élève à 75% pour Emmanuel Macron le plus bas à 45%, sur les différents bureaux de votes. “Une forte mobilisation dans ce fief de Stéphane Ravier”. Dans les deux bureaux du quartier Airbel, “Macron enregistre 79% et 78%, là on attend encore le Bosquet et La Rouguière et les Néreides, trois quartiers sensibles », nous confie Sophiane, animateur dans les 11e et 12e de Marseille, et candidat à l’investiture « En Marche ! » pour les législatives. « J’ai croisé des gens qui sont allés voter aujourd’hui et si on n’était pas allés frapper à leurs portes, ils ne seraient pas allés voter», reprend-t-il, satisfait des résultats. “Mais il est en tête à Marseille”, poursuit un autre qui vient de raccrocher son portable. Sur les 200 bureaux dépouillés, Emmanuel Macron enregistre plus de 60% des suffrages exprimés.
Mais le temps se suspend quelques instants, lorsqu’Emmanuel Macron, dans un moment riche de signes et de symboles, arrive sur cette esplanade du Louvre. Tous le suivent, regardent monter sur la scène le 8e président de la Ve République, achever cette longue marche. « Merci, les amis (…) La France l’a emportée »
A 39 ans, Emmanuel Macron devient le plus jeune président de la République, d’une République qu’il entend protéger. « Je ferai tout pour que les Français n’aient plus aucune raison de voter pour les extrêmes ». Un nouveau pari. Un nouveau défi qui commencera dès demain…