Le projet d’occupation temporaire « Buropolis » dans le quartier de Sainte-Marguerite (9e arrondissement de Marseille) touche à sa fin le 4 juin après 18 mois d’aventure. Retour sur l’expérience avec Raphaël Haziot, coordinateur au sein de l’association Yes We Camp, opérateur de l’occupation temporaaire de ce lieu hybride, entre l’art et le social.
Comment vous financiez-vous ?
Raphaël Haziot : Le modèle économique repose sur 85% d’autofinancement, notamment les loyers dont la moitié était prise en charge par la Croix-Rouge. Nous percevions également 15% de subventions publiques et quelques dons de structures privées comme Icade (Ndlr, Icade est le propriétaire des locaux de 16 000m2). Au total, nous avons perçu 1,3 million recettes sur les 18 mois d’occupation. Ce modèle économique est réfléchi en fonction des usages du bâtiment. Nous proposons une offre sur-mesure à chaque fois.
Comment analysez-vous les usages d’un bâtiment aussi grand ?
R. H : On analyse la morphologie du site. Ici, d’un côté on savait que ce n’était pas possible de faire du logement. Et de l’autre, on sentait un besoin très fort des artistes et des ateliers de production que nous avions déjà perçus à Coco Velten. Au total, 350 personnes logeaient chez nous et 150 restaient sur la liste d’attente, ça prouve la demande…
Quelles difficultés spécifiques avez-vous rencontré sur ce site ?
R. H : Cet immeuble à l’architecture typique des années 70 flambe vite. Nous étions obligés d’avoir un gardiennage incendie et des gardiens dormants. Les coûts de gestion étaient énormes mais compensés par la présence de la Croix-Rouge.
Et ce n’était pas soutenable ?
R. H : C’est la première fois que nous menions un projet aussi court. Nous nous sommes rendu compte que 18 mois, ce n’est pas assez pour les locataires. Nous plaidons aujourd’hui pour une durée d’occupation temporaire entre deux et trois ans a minima. Une juste répartition des charges entre les pouvoirs publics, les acteurs privés et les opérateurs d’urbanisme transitoire comme Yes We Camp est nécessaire.
Quelles étaient vos relations avec la Mairie de Marseille ?
R. H : Nous avons beaucoup échangé avec les collectivités. Toutes. Notamment car nous avons anticipé cette fin. Ils ont eu une bonne écoute des contraintes, une attention des analyses que nous présentions. La mairie de secteur a aménagé une bibliothèque au sein de Buropolis ce qui a permis aux enfants de venir tous les mercredis. Le côté artistique est encore plus intéressant quand vous y ajoutez la dimension sociale.
Pourtant, beaucoup d’artistes déménagent à Marseille. Il faut développer les ateliers…
R. H : Sous la nouvelle mandature, Marseille est passée de 13 ateliers d’artistes à 20. Mais on part de très loin… Par exemple, vous en avez 2 500 à Paris ! Mais, ce que l’on demande surtout aux services de la mairie c’est de co-construire avec nous une charte de l’urbanisme transitoire qui permette de structurer les projets et de faciliter l’accès au foncier « en vacances » (Ndlr, latence entre deux propriétaires). L’idée est également que cette charte soit signée par les promoteurs privés. Mais attention, il faut être vigilant à ce que l’occupation temporaire ne devienne pas la norme unique.
Quel serait le lieu idéal pour créer une résidence d’artistes à Marseille ?
R. H : Nous nous sommes pris au jeu d’écrire le cahier des charges d’un bâtiment idéal car Buropolis n’était pas une solution optimale pour tous les artistes : c’était génial pour les peintres, mais pas pour les sculpteurs qui ont besoin d’être de plain-pied, d’éviter les ascenseurs et de souder. Et avec un bâtiment qui craint le feu c’est une contrainte… Du coup, nous sommes arrivés à la conclusion que les friches industrielles sont la meilleure solution pour les artistes.
[Document source] Plus d’informations sur le projet
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