Il était une fois, une ville du centre de l’Europe, où l’on pouvait entendre le pas des passants et le timbre des sonnettes des vélos. Non vous ne rêvez pas, ce n’est pas un conte de fées, mais la réalité d’une ville à l’histoire longue et belle, qui a décidé, une fois pour toutes, de chasser les voitures de son centre et de donner une seconde vie aux poumons de ses concitoyens et de leurs toujours plus nombreux visiteurs. Ljubljana c’est la capitale de la Slovénie (ex-Yougoslavie). 280 000 habitants. Située entre Autriche, Italie, Hongrie et Croatie, la ville a naturellement eu un passé aussi riche que tellurique, mais elle a été, in fine, épargnée conservant une architecture qui se partage entre art nouveau et baroque. C’est dire que la couleur, et le pastel particulièrement, sont de mises. C’est dire aussi combien il était important de faire cesser l’agression des hydrocarbures, qui coloraient de gris son ciel et de noir ses façades. Comme à Prague, la cité de Kafka, c’est un château qui domine Ljubljana et veille à ce qu’aucun dragon ne vienne troubler sa quiétude. On représente le monstre cracheur de feu, en vert, ce qui finalement est un symbole pour cette ville écolo qui a décidé de faire taire le feu des moteurs à combustion.
La décision a été prise au tournant des années 2010, et la ville fut sacrée Capitale verte en 2016, par la Commission européenne. On peut ainsi profiter des berges de la rivière Ljubljana qui traverse la ville, installer sa couverture et ses pliants dans la parc-forêt Tivoli qui pénètre jusqu’au cœur de la ville, profiter du bourdonnement des abeilles et autres insectes qui ont reconstitué leur écosystème.
Ljubljana : une volonté politique inébranlable, qui a résisté à tous les mauvais vents
Alors la question qui se pose est bien évidemment aussi simple que la réponse à y apporter. Comment ce miracle a-t-il été possible ? Par une volonté politique inébranlable, qui a résisté à tous les mauvais vents qui murmuraient à l’oreille des habitants qu’il était impossible de vivre sans sa voiture. Un récent reportage sur France 2 attestait que non seulement le contraire est vrai, mais que plus de 90% des habitants en étaient satisfaits et condamnaient d’avance toute tentative de retour en arrière.
Du coup, on repasse à l’Ouest, à Marseille, cette ville martyrisée par les paquebots, les poids lourds, les moteurs de toutes les catégories, qui n’en finit pas d’enregistrer des records sordides de pollutions, sonores et atmosphériques. Et de subir les bouchons les plus invraisemblables dans une ville où les anciens dirigeants ont cru malin de faire entrer trois autoroutes en cœur de cité et d’en concevoir une autre, sur la corniche, la plus belle du bassin méditerranéen.
Pourtant, au moins dans les annonces, une lueur d’espoir semble poindre au bout de ce tunnel sans fin. On nous promet, mensuellement, de libérer notre paysage urbain en piétonnisant, ici, quelques kilomètres de littoral, là, l’artère la plus célèbre du monde selon César, Pagnol et compagnie.
On en devient gourmand et puisque les Régionales qui s’annoncent à la fin du mois de juin parlent d’écologie à longueur de liste, on aimerait un peu plus d’audace, de ceux qui se sont fait élire sous la vocable, ô combien prometteur, de « Printemps marseillais ». Dans cette surenchère sémantique, on aura bien évidemment noté que la municipalité de Benoît Payan, était talonnée de très près par la métropole de Martine Vassal. La présidente du Conseil départemental a été récompensée par une Marianne d’Or, pour son engagement dans « la lutte contre la Covid 19 et sa stratégie globale pour faire la guerre au virus ».
On ne peut qu’applaudir et on se dit que Mme Vassal, qui a pris conscience à cette occasion de la fragilité de nos réseaux respiratoires, devrait aller plus loin, en initiant une vaste campagne de reconquête du centre-ville, qui est le poumon de la vie sociale, économique et culturelle. Après tout Marseille est capable de tous les prodiges et pas seulement qu’en football où l’OM est « à jamais le premier », mais aussi en médecine où le vendéen Philippe de Villiers a annoncé urbi et orbi qu’il avait été sauvé grâce à un cocktail préconisé par le professeur Didier Raoult et qui outre l’hydro-chloroquine recommandait deux doses de Pastis. A quand un Ricard d’Or pour notre glorieux scientifique ?
Et si le Printemps Marseillais osait un été, puis des saisons à venir sans voitures
Revenons donc à notre préoccupation du moment. En 1792 un certain Danton abjurait ses citoyens ainsi : « De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace ». Et si Marseille qui n’en a jamais manqué remettait au goût du jour l’antienne du révolutionnaire. L’expression « ne pas manquer d’air » signifie, on le sait, avoir du toupet, être audacieux, et en un mot « oser ». Et si le Printemps Marseillais osait un été, puis des saisons à venir sans voitures. Comme à Ljubljana on se garerait dans un parking relais, on s’engouffrerait dans un petit bus électrique, comme les Diablines qui existent déjà à Aix, et on irait écouter les passants qui passent, dans les rues de la ville, ravalées, toilettées, ressuscitées. Ljubljana selon les Slaves veut dire « aimée ». Et si on aimait à nouveau Marseille.
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