Cet été, huit musées de Martigues, Arles, Marseille et Aubagne se rassemblent le temps d’une balade culturelle à travers les mers et océans. Petit tour d’horizon de ces invitations à la découverte et au voyage, bien souvent au départ de la Provence.
Raconter la Provence et son histoire maritime à travers huit expositions différentes, voilà le projet ambitieux dans lequel s’est engagé Bouches-du-Rhône Tourisme depuis un an. Pour la première fois, quatre villes se rassemblent autour d’une thématique commune pour allier tourisme et culture. « C’est une balade de tourisme culturel qui va sillonner Arles, Martigues, Marseille et Aubagne », précise Danielle Milon, vice-présidente du département, présidente de Bouches-du-Rhône Tourisme et maire de Cassis. “L’Appel du large”, une traversée historique et artistique mais aussi économique et politique pour ouvrir notre regard sur la mer.
L’exposition Martigues, terre d’ailleurs – De Ziem à Camoin, qui se tient au musée Ziem jusqu’au 17 septembre 2017, a ouvert le bal dès le 17 mai. Siégeant fièrement entre la mer Méditerranée et l’étang de Berre, la « Venise provençale » a été une terre d’accueil pour de nombreux artistes à travers le temps. En 1860, le peintre Félix Ziem, renommé pour ses marines et ses paysages de Venise et de Constantinople, ouvre la danse en y achetant un atelier. Dans son sillage, Renoir passera l’hiver à peindre Martigues en 1888, suivi par Picabia, Derain, Dufy… « Ce qu’on explore, c’est ce besoin qu’ont les artistes de s’évader vers un autre horizon, explique Lucienne Del’Furia, conservatrice en chef du musée Ziem. À travers l’exposition, on essaie de voir ce qu’ils sont venus chercher ». Dans cette quête d’un ailleurs propice à la création, les artistes rencontrent de nombreux peintres locaux tels que Seyssaud, Camoin ou Chabaud. « Ce sont des artistes incontournables du territoire, qui ont participé à cette révolution moderne de fin XIXe – début XXe », ajoute la conservatrice du musée. Sous leurs pinceaux, les quartiers typiques de la ville reprennent vie au travers de 90 oeuvres marquant le tournant artistique du XXe siècle.
À Marseille, l’Appel du large se fera dès le 7 juin, au Mucem avec les Aventuriers des mers, Méditerrannée – Océan Indien, VIIe – XVIIe siècles. À travers ce projet conçu avec l’Institut du monde arabe, le Mucem parcourt les grandes aventures maritimes de la Méditerranée et de l’océan Indien. « L’exposition est pensée autour de trois grands axes, détaille Cécile Dumoulin, responsable du développement culturel et du département des publics du Mucem. La peur de la mer, la cartographie, et ce qui a alimenté ce désir vers le large avec un cabinet de curiosités ». Riche de plus de deux cents œuvres, l’exposition relate des récits de conquêtes, de courage et d’épopées sur des bateaux incertains. Grâce à une projection des tempêtes en mer réalisée par l’équipe de Yann Arthus-Bertrand, à une carte attribuée à Christophe Colomb ou à des soieries, métaux précieux et porcelaines venues d’ailleurs, le visiteur est transporté dans cet imaginaire partagé qu’est devenu l’océan au fil des siècles. À vivre jusqu’au 9 octobre.
Escales méditerranéennes, quant à elle, est une exposition qui met à l’honneur ces escales à travers le regard d’artistes des XIXe et XXe siècles. Inspirés par les calanques, les ports et les navires, des peintres comme Dyf, Ziem, Olive, Camoin ou Ferrière proposent aux visiteurs une balade artistique à travers la Méditerranée. « Les quatre-vingt oeuvres exposées ont magnifié dix escales, décrit Adeline Granerau, directrice du musée Regards de Provence. On part de Collioure, puis on passe par Martigues, Marseille, Cassis ou Toulon, et on finit avec des destinations plus lointaines, comme Venise ou Alger ». Un bel hommage à l’art de vivre méditerranéen, au musée Regard de Provence, du 17 juin au 7 janvier 2018.
Des parcours dédiés à la navigation et à la construction navale
« Cette thématique de l’appel du large nous a inspiré deux choses, explique Laurent Vedrine, conservateur en chef du musée d’Histoire de Marseille. La première, c’est comment on fait pour partir au large, l’aspect technique des navires, comment se rendre d’un point A à un point B. La deuxième, c’est l’appel à l’imaginaire ». Éléments d’accastillage, ustensiles de la vie quotidienne à bord et une collection exceptionnelle de six navires grecs et romains se font ainsi les porte-paroles de l’histoire maritime de Marseille que l’on découvrira avec ce parcours Bateaux et merveilles, du 1er juillet au 30 septembre au musée d’Histoire de Marseille, Docks romains.
Mais “l’Appel du large” dépasse les frontières de la métropole et direction le musée départemental Arles Antique pour un parcours également autour des Navires et navigations à l’époque romaine. Du 1er juillet au 30 septembre, la nouvelle aile du musée, dédiée aux activités portuaires, fluviales et maritimes de la cité antique et inaugurée en 2013, avec pour pièce maîtresse un chaland gallo-romain, exposera cinq cents objets issus de fouilles archéologiques subaquatiques. « Ils ont été trouvés dans le Rhône en majorité, mais aussi à l’embouchure de la Méditerranée, du côté de Saintes-Maries-de-la-Mer », souligne Sabrina Marlier-Sabouraud, archéologue. Pour répondre à cet appel, une borne multimédia a également été créée, permettant de présenter au public toutes les pièces liées à l’accastillage conservées loin de son regard, et l’interface 3D emportera les visiteurs à bord d’un navire de commerce romain.
Jack London, un aventurier des plus mythiques
L’exposition Jack London dans les mers du sud qui se tiendra au musée d’Arts africains, océaniens, amérindiens, à la Vieille Charité, du 8 septembre au 7 janvier 2018, retracera la vie de cet écrivain qui fut également pilleur d’huîtres, chasseur de phoques, ouvrier à l’usine ou encore chercheur d’or. Un aventurier dans l’âme qui a eu mille vies en une seule. Au début des années 1900, Jack London décide de partir faire le tour du monde sur un bateau. Au fil de l’exposition, les visiteurs marcheront dans ses pas, emportés par ce voyage qui commence en Polynésie et s’achève prématurément suite à de graves problèmes de santé. « C’est une exposition très riche, promet Marianne Sourrieu, directrice du MAAOA. On suit Jack London dans ses découvertes et dans ses déceptions, ses constats et son regard critique, notamment sur la colonisation ». À travers de nombreux objets et documents, l’exposition embarque les visiteurs dans une aventure maritime, ethnographique et littéraire, car c’est au cours de cette épopée que l’écrivain composera son chef d’œuvre – Martin Eden.
Jusqu’à la défense des routes maritimes
En écho à l’exposition du Mucem, qui s’achève sur la célèbre bataille de Lépante à la fin du XVIe siècle, le public sera accueilli au musée de la légion étrangère par une pièce d’artillerie de cette même bataille. Entre terre et mer, l’aventure de la légion étrangère dans l’océan Indien est là pour rappeler, comme le précise le capitaine Géraud Seznec, conservateur du musée, que « les voyages maritimes sont d’abord motivés par le commerce mais rapidement, il devient important d’installer une présence militaire pour sécuriser ce commerce ». Immergés dans le quotidien des légionnaires, les visiteurs pourront découvrir des aquarelles façon carnet de voyage et de nombreux objets exotiques dans un cabinet de curiosités. Et si le lien entre les légionnaires et la mer n’est pas toujours évident, ils ont pourtant arpenté l’océan Indien, de Madagascar à Djibouti, en passant par les Comores. Du 21 septembre au 15 janvier 2018.
« Avec ces grandes escales, nous avons quatre fenêtres ouvertes sur l’activité maritime, sur le passé mais aussi le présent, conclut l’historien marseillais Gilbert Buti, spécialiste des économies maritimes et sociétés littorales en Méditerranée. Le projet permet d’offrir aux visiteurs une autre image de la Provence, qui rappelle les liens étroits entre terre et mer, la complémentarité de ces deux territoires ». Une balade historique donc, mais surtout une invitation au voyage. Et d’après les organisateurs, cette première édition sera suivie de bien d’autres…