Les Rencontres de la filière Forêt Bois en région Sud Provence-Alpes-Côte d’Azur ont lieu ce mercredi 1er décembre à l’Hôtel de Région Sud. C’est le rendez-vous annuel de tous les acteurs institutionnels et professionnels de la filière forêt bois. Cette 4e édition des Rencontres régionales, réunit les professionnels et les acteurs de l’innovation et du développement économique afin de mieux appréhender les enjeux et les opportunités des marchés futurs en lien avec la filière forêt – bois et ses dérivés. En avant-première, Florent Bigo, pilote de ces rencontres, expert et directeur de Fibois Sud Provence-Alpes-Côte d’Azur répond aux interrogations de Gomet’ sur une filière méconnue, parfois contestée et pourtant prometteuse.
Une pétition circule qui s’oppose au soutien européen à « l’abattage massif d’arbres comme une énergie renouvelable ». Comment l’exploitation du bois peut-elle contribuer à lutter contre le changement climatique ?
Florent Bigo : Tout d’abord, la filière Forêt Bois, en particulier dans notre région n’est pas à l’origine d’abattages massifs d’arbres, puisqu’aujourd’hui seul 25% de l’accroissement biologique de la forêt (la pousse annuelle) est récolté. La forêt régionale est en croissance en volume ainsi qu’en surface. D’autre part l’utilisation de l’énergie biomasse intervient en substitution d’énergies fossiles, comme le gaz, le pétrole ou le charbon. Enfin, les interventions en forêt, qu’elles soient pour de la coupe de bois ou des travaux forestiers, participent à une bonne gestion de la forêt pour la protéger des risques notamment incendie (meilleure accessibilité, moins d’accumulation de biomasse, zones coupe-feu…).
À noter que tous les produits bois, dont les produits de construction, stockent du carbone pendant des dizaines voire des centaines d’années. Néanmoins la meilleure énergie est celle qu’on ne consomme pas !
Quelles sont dans notre région provençale les potentialités de l’exploitation et du développement d’une filière bois ?
F. B. : La forêt régionale, méditerranéenne et sud-alpine, est une forêt riche et diversifiée par la variété de ses essences, feuillus et résineux, et par la diversité de ses paysages. Elle est très étendue, couvre 51% du territoire, ce qui fait de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur la deuxième région française en termes de taux de boisement. Certes la qualité de nos bois n’est pas équivalente à certaines autres régions françaises, mais de nombreuses essences trouvent une place dans des usages à forte valeur ajoutée comme la construction et la menuiserie bois. Ainsi mélèzes, sapins, pins sylvestres peuvent tout à fait être valorisés dans les constructions de notre région. Les progrès et innovations de la filière par la fabrication de bois techniques (lamellé-collé) permettent d’envisager l’utilisation d’autres essences moins traditionnelles comme le pin d’Alep, le pin de nos collines marseillaises et varoises.
La filière régionale est une filière dynamique avec 2 800 entreprises pour 11 000 emplois en région, non délocalisables
Florent Bigo
Par ailleurs les bois de moindre qualité, ainsi que les bois d’entretien ou d’éclaircies issus de la sylviculture du bois d’œuvre sont utilisés en bois énergie (plaquettes forestières pour chaufferies ou bois de chauffage) ou bois d’industrie dont le principal débouché est l’usine de pâte à papier Fibre Excellence Provence à Tarascon. Il est à noter que la filière régionale est déjà une filière dynamique avec 2800 entreprises pour 11000 emplois en région, non délocalisables et répartis de façon homogène sur le territoire (zones urbaines/zones rurales). Le développement à venir des constructions biosourcées avec la RE2020 donne de belles perspectives pour les usages en bois construction.
Les difficultés de la centrale de Gardanne ont montré les limites du marché local. Comment peut se structurer une filière alors que les outils de production, (exploitation, scierie…) ne sont plus et pas encore là ?
F. B. : Vous pointez effectivement une faiblesse de la filière bois française et plus particulièrement de notre région : l’absence d’unités de transformation du bois autrement dit de scieries. La récente conjoncture qui a provoqué la montée du prix des bois nous a rappelé tout au long de cette année notre dépendance à certains produits bois d’importation dans la construction. Fibois Sud travaille avec ses partenaires et soutiens à l’émergence d’unités de transformation capable de répondre au marché local en circuit court. Nous nous appuyons sur les entreprises locales et sur des systèmes de traçabilité comme la certification « Bois des Alpes » qui garantit la traçabilité non seulement de l’origine des bois mais aussi des entreprises du territoire qui les ont transformés et mis en œuvre.
L’usage du bois en architecture progresse. C’est esthétique au début. Mais faute d’entretien adéquat, sans une « culture » du bois, les bâtiments ou les éléments en bois deviennent en quelques années des panneaux gris et dégradés. Est-ce bien raisonnable de faire de la construction bois au Sud ?
F. B. : Il est tout à fait raisonnable de construire en bois en région Sud ! Tout d’abord le bois dans un bâtiment n’est pas toujours positionné à l’extérieur. Un bâtiment utilisant un système constructif à ossature bois ou poteaux poutres peut très bien avoir une finition extérieure avec un parement métallique ou un enduit minéral.
Pour les bois positionnés à l’extérieur, il est nécessaire de bien adapter la conception du bâtiment et de bien connaître le matériau pour choisir des essences naturellement durables qui permettront de préserver l’intégrité du bois pendant des dizaines d’années, même si son aspect a changé. Fibois Sud, dans le cadre de sa mission de développement des compétences des acteurs de la filière, organise régulièrement des formations pour les architectes à ce sujet.
Liens utiles :
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Le site officiel des rencontres filières bois avec le programme de la journée du 1er décembre