Silence les… « crions »
Funeste été où les cigales de la politique font entendre leur vacarme. C’est Collard, le frontiste, qui a osé, à l’Assemblée nationale, dire aux gouvernants que les morts de Nice les regardaient. Il ne faut jamais se mettre à la place des morts. C’est sans doute pour cela que, depuis 1918, celui qui à Paris repose sous l’Arc de Triomphe, est un « inconnu ». On ne saura jamais ce qu’il a pensé des généraux qui l’ont envoyé à la boucherie. A Nice, il y a eu huit dizaines de vies innocentes, sacrifiées sur l’autel de la bêtise crasse, de l’aveuglement criminel, du fanatisme narcissique. Fallait-il leur infliger la double peine, avec des élus de la République qui inventent à grands coups de « y-avait-qu’à », des solutions miracles ? Ceux qui exercent des responsabilités, savent bien que la sanction en démocratie, est toujours, au bout du compte, bon ou mauvais. On appelle cela une urne et elle est parfois funéraire. Toujours à propos de notre Marseillais devenu gars de la Marine, en s’exilant dans le Gard : il se plaignait que le maire de St Gilles l’ait récemment privé de parole. Il y a au moins un saint homme de l’autre côté du Rhône. Quant au plaideur, il sera passé de Septembre Noir (groupe terroriste qu’il se vantait d’avoir défendu dans les années 70) à ce Juillet Noir. Sans transition, comme on le dit sur les chaînes d’info continue.
Marseille et son fécond XVIIIe siècle
Un conservateur du Louvre de mes amis, avec qui je déambulais dans l’exposition du Palais Longchamp (Marseille au XVIIIe siècle), me disait combien l’académie de la ville avait été un réservoir fécond. A propos du rôle du musée, Jacques Louis David rappelait lui – comme le catalogue de l’exposition le mentionne – qu’il doit être « une école importante. Les instituteurs y conduiront leurs jeunes élèves ; le père y mènera son fils ». Le peintre qui immortalisa le sacre de Napoléon, porte là une affirmation d’une belle modernité. A Longchamp outre les œuvres exposées, c’est une partie décisive de l’histoire de Marseille que vous feuilletterez, dont les échos résonnent jusqu’à nos jours. Daniel Bauza, Mika Biermann, Céline Bijot, Céline George et Danielle Manoukian, qui ont conçu et réalisé un petit catalogue épatant de 40 pages, aussi pédagogique que ludique, méritent qu’on fasse ce petit détour par la colline où l’on célèbre l’arrivée de l’eau des Alpes à Marseille.
L’herbe est partie sans fumer
La Fan zone (photo) a laissé sur les plages du Prado un espace exsangue. A force de trépigner pour leurs équipes, les supporters européens ont eu raison de la pelouse qui donnait un peu de fraîcheur sous le cagnard. Il serait malvenu de s’en plaindre, tant la fête a été réussie à Marseille, n’exceptait l’épisode anglo-russe où quelques abrutis ont tenté de faire basculer le rendez-vous du foot en baston entre fous. On attend septembre avec confiance, pour quelques labours qui redonneront à ce périmètre ses vertus. A commencer par proposer un terrain de jeu géant à tous ceux qui, au pied des barres de béton, en sont privés. C’est pour ce faire que les plages du Prado et leurs pelouses ont été inventées.
Les délais peut-être pas mais…
La rénovation du Centre Bourse arrive à terme. Déjà les architectes Moatti et Rivière ont été couronnés par le Prix Versailles, pour la façade du bâtiment dont les « vagues » ont adouci le choc frontal, que proposait naguère ce lieu de chalandise. Promise pour juillet, la fin des travaux intérieurs n’est pas au rendez-vous. Mais on peut d’ores et déjà goûter aux améliorations qui devraient permettre à ce carrefour très couru, de rivaliser avec les Docks et les Terrasses du Port. Il y a de jolies trouvailles notamment les toutes fringantes nouvelles toilettes. Certes, il en coûte désormais 50 centimes d’euro, pour faire ce détour, mais comparé aux files d’attentes et aux parfums des lieux d’aisance précédents, il serait mal venu de se plaindre.
Le solde après les soldes
Mme Margarita Dreyfus veut urgemment se débarrasser de l’OM. Elle a nommé des liquidateurs de confiance, qui ne semble pas avoir d’état d’âme pour le club le plus mythique de France. Un rafistolage est en cours, pour composer rapidement une équipe qui tienne le choc le temps de la vente. Cela fait penser à ces propriétaires qui mettent une couche de peinture sur leur façade, avant de donner à visiter leur bien. Mais Mme Dreyfus peut-elle tromper son monde, dans un milieu où les coquins sont plus nombreux que les saints. Seul un sursaut des politiques locaux, qui ont lourdement investi dans le stade Vélodrome pourrait sans doute bousculer les données du problème. Las, le premier d’entre eux, Jean-Claude Gaudin, n’a pour le sport et le foot qu’un intérêt très subalterne. Et il n’y a pas dans notre bonne ville un Aulas, pour opposer un « holà » et provoquer une ola des virages. Nombreux sont les visiteurs qui font le détour à Marseille, pour voir le Vel’. Si ça continue ils pourront dire que dans le sud, ils ont vu une antiquité.
Y a plus de papier…
Une utilisatrice de la navette maritime, entre la Pointe Rouge et le Vieux-Port, s’adresse à un garçon de café, avant de s’embarquer pour sa traversée : « vous savez où il y a une presse ? » « A Marseilleveyre ! ». Soit à plus d’un kilomètre. C’est une triste réalité, les kiosques à journaux sont fermés à Marseille, définitivement ou pour plusieurs semaines. La presse écrite n’est plus malade (de ses coûts, de ses grèves, de la concurrence du Web), elle est à l’agonie. Il ne faut pas s’en réjouir, car c’est ainsi un atout du vivre et communiquer ensemble qui disparait. Aux Etats-Unis, où elle souffre aussi, elle résiste mieux, notamment – ce qui n’a pas marché ici, faute d’annonceurs suffisants- grâce à ses gratuits, d’une qualité souvent égale à celle des payants. Mais on trouve aussi des distributeurs à chaque coin de rue ou d’avenue. Ici on ne trouve que des garçons de café navrés, qui vous renvoient à votre solitude.
Il ne fera plus son cinéma
Marseille a perdu un de ses grands noms. Jacques Rouffio, réalisateur vient de disparaître à 87 ans. On a moins évoqué ses racines qu’on ne l’a fait pour Pagnol, Verneuil ou Guédiguian. Pourtant son œuvre honore la ville pour ne citer que «7 morts sur ordonnance », « Le sucre » ou encore « La passante du sans souci ». C’est l’œil de Rouffio qui capta dans ce dernier film l’ultime regard pathétique de Romy Schneider et son sourire aussi mélancolique que dévastateur. C’est un grand Marseillais qui est parti avec un clap de fin aussi discret que son talent était grand.