Après avoir investi 10 millions d’euros ces deux dernières années, la cimenterie Lafarge de La Malle (Bouc-Bel-Air) annonce dans un communiqué en date du 9 mai avoir atteint ses objectifs en termes d’émissions de soufre. Selon l’entreprise, ces rejets spécifiques ont été divisés par deux depuis 2018.
L’usine rentre « dans les clous » et s’émancipe de la dérogation préfectorale qui lui était accordée depuis son ouverture en 1958. Cette autorisation permettait jusqu’alors à la cimenterie de dépasser largement le seuil fixé par l’Europe en matière d’émissions d’oxyde de soufre.
« L’exploitation de l’usine sans dérogation administrative marque une étape majeure pour la cimenterie, dans sa prise en compte des enjeux sociétaux et environnementaux du territoire », se félicite Pascal Baudoin, le directeur du site.
Une nouvelle qui devrait rassurer les riverains et travailleurs des communes alentours, dont une partie se plaint depuis plusieurs années des nuisances, principalement olfactives, générées par l’activité du site. Le soufre peut dégager une odeur très désagréable.
Un plan d’action pour diminuer le soufre
En avril 2022, Lafarge inaugurait à Bouc-Bel-Air son nouveau filtre à manches sur le four n°2. Une installation chiffrée à cinq millions d’euros, dont l’objectif principal est de réduire les émissions de poussières et de dioxyde de soufre.
Les derniers résultats s’expliquent également par le fait que l’usine substitue aujourd’hui une partie des argiles à forte teneur en soufre par des matériaux moins soufrés. Et par l’intégration de fines de bois dans le mix combustible.
Lafarge La Malle veut sortir de la tourmente
Filiale de la multinationale Holcim, Lafarge espère également apaiser les tensions. Ces dernières années, la cimenterie de La Malle a souvent fait l’objet de protestations : dépôts de plaintes, courriers des maires, mises en demeure de la préfecture…
En décembre dernier, l’usine de Bouc-Bel-Air a même été envahie et sabotée par près de 200 militants écologistes. Ces activistes dénonçaient une « course délirante au profit, au mépris de toutes les conséquences écologiques et sociales engendrées ».
Ce samedi 10 décembre, 200 personnes ont envahi et desarmé par surprise l’usine Lafarge de la Malle a Bouc-Bel-Air, près de Marseille 💥
— Les Soulèvements de la Terre (@lessoulevements) December 11, 2022
Les militant-e-s ont saboté les infrastructures de l’incinérateur, éventré les palettes de ciment et mis hors d’état de nuire les machines
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Malgré le plan d’investissements en cours, l’usine de Bouc-Bel-Air fait partie de la liste, dévoilée en novembre 2022 par l’État, des 50 sites industriels les plus polluants de France. Le chemin vers la neutralité carbone, prévue en 2050, est donc encore long pour le cimentier.
À l’échelle mondiale, et selon un rapport international (ONU), le secteur de la construction serait responsable de 39% des émissions de CO². Un chiffre vertigineux lié principalement à l’énergie requise et aux procédés de construction.
L’usine travaille sa « performance environnementale »
Lafarge poursuit donc la transformation de ses pratiques vers des méthodes moins émettrices. L’usine de Bouc-Bel-Air n’utilise d’ailleurs plus de ciments traditionnels (CEM1), composés à 95% de “clinker” – une poudre de calcaire cuite à 1400-1500°c.
En novembre dernier, Pascal Baudoin nous annonçait dans l’émission Planète locale la mise en place d’une station permanente pour un suivi des émissions. Cette structure publique-privée vise à déterminer l’impact environnemental réel de la cimenterie, au regard des autres sources d’émissions sur cette zone industrielle et commerciale où le trafic routier est dense.
L’usine Lafarge La Malle produit chaque année près de 700 000 tonnes de ciments qu’elle revendique « bas carbone ». Leur production offrirait une réduction de 35% à 65% des émissions de CO² par rapport à un ciment classique. La centrale emploie actuellement 145 personnes (dont 125 salariés à temps plein) et génère environ 400 emplois indirects.
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