par Géraldine Garcin-Peiffert, avocat, directeur associé, et Julie Semperboni, avocat, directeur de mission, droit fiscal chez EY Société d’Avocats.
- Rappel : le “pacte Dutreil”, quèsaco ?
Le dispositif fiscal prévu aux articles 787 B et 787 C du code général des impôts, plus connu sous la dénomination « pacte Dutreil », consiste en une exonération de 75% des droits de donation ou de succession dus lors de la transmission d’une entreprise sous réserve que les parties (donateurs/donataires ou défunt/héritiers) s’engagent à poursuivre l’activité de l’entreprise durant une période minimale de six ans. En cas de donation, cette exonération est cumulable, sous certaines conditions, avec celle prévue par l’article 790 du code général des impôts, ce qui permet de bénéficier, toutes conditions étant remplies, d’une exonération globale pouvant aller jusqu’à 87,5% des droits.
- Quelles sont les formes d’entreprise visées ?
Cette exonération s’applique que l’activité professionnelle soit exercée sous forme d’entreprise individuelle (article 787 C) ou de société (article 787 B).
Seront ainsi éligibles à l’exonération partielle de 75% tant les titres d’une société opérationnelle que les titres d’une société holding « animatrice » définie, depuis la loi de finances pour 2024, à l’article 787 B comme une société qui « outre la gestion d’un portefeuille de participations, a pour activité principale la participation active à la conduite de la politique de son groupe constitué de sociétés contrôlées directement ou indirectement, exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, et auxquelles elle rend, le cas échéant et à titre purement interne, des services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers ».
A noter que, compte tenu de l’intention affichée du législateur de se rallier à la définition de la holding animatrice initialement dégagée par les juges, l’activité d’animation devrait être considérée comme l’activité principale, « lorsque que la valeur vénale, au jour de du fait générateur de l’imposition [ndlr : la donation ou la succession], des actifs de la société holding affectés à son activité d’animation de groupe, parmi lesquels les titres des filiales animées, les biens mis à leur disposition ou affectés aux prestations de service délivrés au sein du groupe et la trésorerie affectée à l’activité du groupe, représente plus de la moitié de son actif total », comme l’avait retenu la Cour de cassation (Cass. com., 11 octobre 2023, n° 21-24.762).
- Toutes les activités professionnelles sont-elles visées ?
Seules sont visées les entreprises dont l’activité principale est industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale.
Les activités de location de logements meublés étant mentionnées aux termes de l’article 35 du code général des impôts et étant donc fiscalement considérées comme commerciales, la question de leur éligibilité à l’exonération « Dutreil » a fait l’objet de nombreuses jurisprudences dont une décision notable de la Cour de cassation ouvrant la porte, sous certaines conditions, à un possible bénéfice de l’exonération (Cass. com., 1er juin 2023, n° 22-15.152).
Voyant d’un mauvais œil cette ouverture jurisprudentielle, le législateur, aux termes de la loi de finance pour 2024, est venu recentrer les activités éligibles et expressément exclure l’« activité de gestion de son propre patrimoine mobilier ou immobilier », excluant ainsi les activités de location meublée.
- Quel est le formalisme à respecter pour bénéficier de cette exonération ?
L’engagement de poursuite d’activité et de conservation des titres (lorsque l’activité est exercée en société) se matérialise, en principe, par la conclusion de deux types d’engagement : collectif puis individuels.
A ce titre, l’intervention d’un professionnel qualifié pour la rédaction de ces engagements et, plus généralement, pour vérifier la satisfaction des conditions d’éligibilité est fortement recommandée pour éviter une remise en cause de l’exonération a posteriori par l’Administration fiscale.
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Loi de finances 2024 : la check-list fiscale et sociale de Géraldine Garcin-Peiffert (EY)