Façonéo semble omniprésent dans la politique dʼaménagement de Sylvia Barthélémy. Son rôle est-il encore appelé à évoluer ?
Philippe Barrau : Cʼest vrai que nous sommes devenus bien plus quʼune simple société dʼéconomie mixte pour le territoire. En août dernier, Façonéo est, par exemple, devenu le nouvel opérateur des transports publics du territoire en partenariat avec la RTM. Jusquʼalors, nous nous contentions de conseiller, dʼaccompagner la réalisation des projets. Maintenant, nous souhaitons porter nous-mêmes les projets. Nous avons intégré de nouvelles compétences, remis à plat les procédures afin dʼadresser des dossiers plus importants. Sylvia Barthélémy a une politique ambitieuse de développement du territoire et nous avons les solutions pour la mettre en pratique.
Vous êtes notamment maître dʼouvrage pour le Valʼtram. Comment envisagez-vous sa réalisation ?
P. B : Nous venons de proposer à la Métropole un montage audacieux pour réaliser les travaux du ValʼTram en un minimum de temps pour un minimum de risque financier. Tout dʼabord, si la Métropole réalise le chantier en assistance à maîtrise dʼouvrage en direct, elle ne pourra pas livrer avant le 1er semestre 2021 au mieux. Façonéo peut aller beaucoup plus vite. On peut commencer en septembre prochain et terminer en août 2020. Il faudrait terminer le plus gros du chantier avant les élections municipales de 2020 pour ne pas cristalliser le mécontentement du public. Ensuite, nous proposons de réaliser le Valʼtram en concession sur 25 ans afin de lisser les dépenses sur une plus longue durée et ainsi rendre lʼeffort financier le plus indolore possible pour la Métropole. Cette dernière doit actuellement emprunter 92 millions dʼeuros sur 15 ans, ce qui revient à un remboursement de 6,6 millions dʼeuros par an sur 25 ans avec les taux dʼintérêt. Avec la concession, Façonéo réduit la facture à 4,7 millions dʼeuros par an. Cette différence sʼexplique notamment par la durée des travaux plus long envisagés par la Métropole qui souhaite faire un phasage du chantier. Ainsi, Façonéo nʼaurait besoin dʼemprunter que 82 millions dʼeuros. On se propose de supporter entièrement lʼemprunt. Dʼailleurs, nous avons déjà contacté des partenaires bancaires comme La Banque postale et la Caisse des dépôts qui veulent absolument participer au projet. Ce nouveau montage est présenté au comité de pilotage du 29 janvier qui donnera ou non son feu vert pour cette option. Pour moi, cʼest la meilleure solution car la Métropole ne dispose que dʼune capacité dʼinvestissement limitée, environ 50 millions dʼeuros jusquʼà la fin du mandat, pour les transports. Il faut envisager de nouvelles solutions comme elle lʼa fait avec la société du tunnel Prado Carénage à Marseille qui sʼest vu prolongé la concession des tunnels contre la réalisation du souterrain sur Schloesing. Notre proposition va dans le même sens.
Dans la continuité du Valʼtram, il y a le projet de bus à haut niveau de service (BHNS) qui doit desservir la zone des Paluds. Comment envisagez-vous cet autre chantier ?
P. B : Il est indissociable du Valʼtram car il reliera la zone des Paluds à la ligne de tramway, permettant ainsi à des milliers de salariés de se rendre au bureau en transports en commun. Nous souhaitons donc coupler la concession du Valʼtram avec celle du BHNS dont les travaux commenceront dans la foulée. Le lancement du chantier est prévu pour début 2020 et une mise en service courant 2021 pour un budget de 24 millions dʼeuros. Ce sont environ 10 000 salariés qui se trouveront sur le tracé du futur BHNS qui apportera enfin une alternative au tout voiture sur la zone des Paluds qui commence à être réellement paralysée par la circulation automobile.
Façonéo travaille également sur le réaménagement de la zone des Paluds, notamment la construction de nouveaux bureaux ?
P. B : Oui, nous sommes par exemple assistant à maîtrise dʼouvrage sur le centre dʼaffaires Alta Rocca porté par Foncière GM. Situé en entrée de ville et à la sortie de lʼautoroute, cet ensemble de 15 000 m² de bureaux répond parfaitement au besoin dʼespaces des entreprises du territoire et dʼautres acteurs très intéressés par une implantation aubagnaise. Nous participons également à la commercialisation des lots, ce qui est nouveau pour nous. Le développement du foncier économique est une question cruciale pour le territoire, nous devons donc nous en emparer. On veut bien travailler avec des opérateurs privés à condition quʼils restent à lʼécoute des besoins de nos administrés. Avec Foncière GM, ça se passe merveilleusement bien mais ce ne sera peut-être pas toujours le cas. Nous souhaitons donc développer encore nos compétences sur la promotion de lʼimmobilier dʼentreprises pour, à terme, pouvoir réaliser une opération de A à Z. Par exemple, Façonéo est propriétaire dʼune petite parcelle de 2 500 m² sur la zone de Camp de Sarlier, de lʼautre côté de la route de Gémenos face à lʼAta Rocca. On veut développer de nouveaux espaces sur ce terrain de plus de 10 hectares. Il faut débloquer du foncier pour permettre aux entreprises de la zone des Paluds de se développer. Certaines menacent de quitter Aubagne si elles ne trouvent pas de bureaux dʼune taille suffisante pour absorber leur croissance.
La pression foncière commence à être forte. Comment faire pour éviter une envolée des prix des terrains surtout ceux qui seront sur le trajet du Valʼtram ?
P. B Pour une fois, on fait les transports avant de faire les logements et les zones dʼactivités, ce qui est une bonne chose mais il est vrai que lʼon est vite dans la spéculation. Quand on a parlé de développement sur la zone de Napollon, les prix ont flambé jusquʼà parfois plus de 400 euros le m²! Si lʼon veut pouvoir réaliser des logements et des services à prix raisonnable, il faut se donner les moyens de tempérer le marché. Le Pays dʼAubagne et la Ville ont signé une convention avec lʼétablissement public foncier (EPF) pour pouvoir mettre la main sur le foncier. LʼEPF a un pouvoir de préemption qui permet dʼacheter au prix des domaines et de revendre ensuite les parcelles à des acteurs qui ont un projet réfléchi à lʼéchelle du territoire. Cela va nous permettre de maîtriser lʼévolution des prix mais aussi de participer à une remise à plat de certaines zones. Aux Paluds, par exemple, le développement sʼest fait de manière un peu anarchique pendant plus de vingt ans. Aujourdʼhui, il fait remettre de la cohérence en regroupant les activités en fonction de leur besoins. Il faut séparer le commerce, de la logistique, les bureaux des industriels… Cela va déjà réorganiser les flux pour une meilleure circulation avant lʼarrivée du BHNS et du Valʼtram.