Le sondage Ipsos-Sopra-Steria de mi-mandat réalisé par nos confrères de France 3 Provence Alpes, France Bleu Provence et La Provence, met à nu à la fois la politique municipale et la situation des leaders politiques phocéens.
Première appréciation celle sur la politique conduite depuis trois ans par les équipes de Benoît Payan et du Printemps marseillais. La majorité des habitants de Marseille voit la situation de la ville se dégrader et souhaite un changement profond de l’action municipale, notamment sur le logement et la sécurité. Près des deux tiers des habitants de Marseille éprouvent un sentiment de dégradation de la situation de leur ville. Pour 64 % des personnes interrogées, la situation s’est plutôt détériorée au cours des dernières années. Relativisons cet item le pessimisme français est une spécialité mondiale. Selon Ipsos, lorsque les Français pensent à l’avenir de la France, ils ont tendance à être pessimistes à 70 % (29 % sont optimistes, 70 % sont pessimistes, 1 % ne se sont pas prononcés).
Cependant le bilan à mi-mandat est sévère, le sentiment de dégradation est patent avec 64 % alors que même parmi les troupes du Printemps 49 % des sondés considèrent qu’il y a dégradation à Marseille, seule consolation dans le 1er secteur (1er et 7e arrondissements), où 41 % des habitants seulement ressentent ce sentiment de détérioration. Le pic de désespérance est atteint avec 76 % dans le 5e secteur (9e et 10e arrondissements). Dans la majorité présidentielle et malgré l’investissement personnel d’Emmanuel Macron, 59 % sont pessimistes quasiment comme les Républicains (60 %) . Le mécontentement culmine naturellement dans l’électorat du Rassemblement national avec 87 % des sondés qui affirment avoir le sentiment que la situation empire à Marseille.
Le bilan très insuffisant du maire
Le maire Benoît Payan depuis son élection au conseil municipal en décembre 2020, après la démission de Michèle Rubirola, n’a pas su convaincre les Marseillais. Deux sur cinq soit 43 % seulement approuvent son bilan. L’action erratique de l’équipe municipale ne convainc pas. Pour être objectif comparons avec son homologue de Lyon, élu comme lui en 2020 et comme lui, élu d’opposition de faible notoriété. Les Lyonnais sont plutôt habitués à un management notabilisé de la cité (comme avec Raymond Barre ou Gérard Collomb) pourtant l’écologiste Grégory Doucet comptabilise dans un sondage Ifop-Fiducial 53 % de sondés satisfaits du travail accompli par la majorité écologiste et de gauche au pouvoir à Lyon depuis juin 2020. Dix points de différence avec Payan ! Mais l’équipe municipale lyonnaise a su s’atteler aux problèmes de fond et surtout mettre en sourdine les conflits politiques avec les autres institutions de la région. À tel point que si un scrutin municipal avait lieu cette année, Grégory Doucet bénéficierait du renouvellement de la confiance de 74 % de ses électeurs de 2020, et de 70 % de ceux de la candidate de La France Insoumise. Notons qu’en général les maires en place bénéficient de trois quarts d’opinions favorables sur leur action !
C’est l’inverse à Marseille : les trois quarts des personnes interrogées se déclarent en faveur d’un changement en profondeur de l’action municipale. 69% chez les sympathisants LR, 94 % pour les proches du RN. Les électeurs du Printemps affichent un modeste 54% en faveur de la poursuite de la politique menée.
85% des Marseillais inquiets par la sécurité
Le bilan sécurité a été sondé par Ipsos-Sopra-Steria et avec 45 morts en 2023, les Marseillais sont légitimement inquiets. À la question « De manière générale, diriez-vous que vous éprouvez un sentiment d’insécurité à Marseille ? » 85 % des Marseillais répondent « oui ». Un chiffre à relativiser selon La Provence : « Dans l’étude « Fractures françaises » de 2023 menée par Ipsos et Sopra-Stéria pour Le Monde, la fondation Jean Jaurès, le Cevipof et l’institut Montaigne, 91 % des sondés estiment vivre dans une « société violente ». Marseille n’est donc pas un cas à part et les chiffres de la délinquance n’y sont pas plus élevés que dans des villes de taille comparable. »
Des personnalités qui n’impriment pas
La partie people politique du sondage laisse perplexe. L’Institut Ipsos a choisi d’interroger non sur un vote potentiel (comme à Lyon avec l’Ifop) mais sur une adéquation au profil de maire ce qui en général favorise le personnel en place. (Quelle personnalité ferait un bon maire pour Marseille en 2026 ?)
Benoît Payan est naturellement en tête mais avec un chiffre très modeste de 39% d’opinions positives contre 45% de négatives ! Dans un sondage publié en juin dernier réalisé par Ipsos et publié par La Tribune et Public Sénat, le maire de Marseille obtenait 53% d’opinions favorables… Samia Ghali malgré ses multiples invitations sur les plateaux de télévisions, ne perce pas comme leader naturelle de la Cité phocéenne ou de ses quartiers, elle plafonne à 21 % d’opinions favorables, mais surtout elle a contre elle, 58 % d’opinions négatives.
Dans le peloton de tête notons la persistance de Stéphane Ravier, les Marseillais n’ont pas capté son passage au très minoritaire parti Reconquête et avec son opposition tonitruante en haut des gradins du conseil municipal il reste le leader incontesté de la mouvance d’extrême droite, des héritiers de Le Pen. Son challenger, Franck Allisio est un illustre inconnu pour trois Marseillais sur cinq.
La remontada de Renaud Muselier
Renaud Muselier avec ses sorties contre Payan, sa volonté de reconstituer la droite locale derrière lui, son ambition subliminale d’aller vers la mairie devient le deuxième personnage politique phocéen avec 32% d’opinions favorables. Mais il reste clivant et aura du mal à rassembler s’il ne lisse pas son personnage, puisque 46% des sondés le voient encore négativement. Martine Vassal, autre personnalité de la majorité, présidente de la Métropole et du Département demeure en embuscade à 28% d’opinions favorables même si elle décroche par rapport au sondage de juin (39%).
Les « petits élus » restent petits ! La moitié du tableau est occupée par des personnalités que 50 % des Marseillais ne connaissent pas suffisamment pour juger de leur avenir politique. Le pendulaire Manuel Bompard, porte-parole canal historique de Mélenchon, culmine à 14 % d’avis positifs (44 % de négatifs), Lionel Royer Perreaut est un inconnu pour 53 % des habitants et n’a que 17 % d’avis favorable pour occuper le fauteuil du maire. Le cardiologue Frédéric Collart (DVD), seul candidat déclaré souffre aussi d’un déficit de notoriété. Quant à Sabrina Agresti-Roubache qui a bénéficié des projecteurs médiatiques de son entrée au gouvernement, de son suivi de Marseille en grand, de ses amitiés, de Jean-Claude Gaudin à Brigitte Macron, n’atteint que 16 % d’opinions positives : la mairie est encore loin ! Sébastien Barles prépare toujours les prochaines municipales et ne capitalise que 9% de supporters ! Il y a des marges de progrès.
Les Marseillais et Marseillaises globalement ne sont pas enthousiastes sur leurs édiles. Pas un seul qu’ils considèrent à plus de 40 % comme étant potentiellement un bon maire. La crise de représentation politique est patente et les chicayas permanentes et improductives entre les institutions et les clans à deux ans du prochain scrutin ne délivrent pas de messages encourageants.
Méthodologie : l’enquête Ipsos Sopra Steria pour France Bleu, France 3 et La Provence a été réalisée auprès d’un échantillon de 813 personnes de 18 ans et plus constituant un échantillon national représentatif de la population marseillaise âgée de 18 ans et plus, interrogé par internet du 28 novembre au 11 décembre 2023.
Lien utile :
[En bref] Sondage politique : un Marseillais sur deux convaincu par la méthode Payan