Huit mois après le drame de la rue d’Aubagne, le ministre de la Ville et du Logement, Julien Denormandie, est revenu à Marseille pour lancer le projet partenarial d’aménagement (PPA), le nouveau dispositif des pouvoirs publics contre l’habitat indigne.
Le 5 novembre dernier, la mort de huit personnes dans l’effondrement de deux immeubles de la rue d’Aubagne a jeté le trouble sur l’action publique en matière d’habitat : « Le drame a signalé l’urgence à agir encore plus et a imposé d’accélérer pour remédier aux phénomènes de dégradations du bâti privé ancien, en particulier dans le centre-ville de Marseille », a avoué Jean-Claude Gaudin, le maire de Marseille à l’occasion de la visite du ministre de la Ville et du Logement. Julien Denormandie a dévoilé lundi 15 juillet à la tour La Marseillaise le fameux projet partenarial d’aménagement (PPA) qui doit permettre à la ville d’en finir avec l’habitat indigne. « Nous avons signé pour une vision, la mise en œuvre d’un chemin au long cours pour réhabiliter le centre-ville », explique le ministre. « Le PPA n’est en rien un nouvel outil technique. C’est un cadre de discussion inédit pour mener à bien cette mission », assure -t-il.
Une première phase à 217 millions d’euros pour près de 2 000 logements
Premier instrument issu de la loi Elan, le PPA réunit dix partenaires pour mettre en œuvre un grand programme de réhabilitation urbaine : les collectivités (Ville de Marseille, Métropole Aix-Marseille Provence, Conseil Départemental des Bouches-du-Rhône), les grandes agences publiques (Agence nationale de l’habitat (Anah), Agence nationale de la rénovation urbaine (Anru)), l’association régionale des HLM Paca Corse, l’établissement public foncier (EPF) Paca, Euroméditerranée et la Banques des Territoires. Si la répartition exacte de leurs participations reste à définir, ils mettront tous au pot pour financer la première phase dont le budget est estimé à 217 millions d’euros. « Et ce n’est qu’un début », prévient la présidente de la Métropole, Martine Vassal. Un périmètre de 1 000 hectares délimité par la mer, le boulevard Plombières, le Jarret, le boulevard Baille et une le 7ème arrondissement a été retenu. Il rassemble 200 000 habitants. Et dans cette zone, le ministre a choisi quatre îlots d’immeubles prioritaires qui vont profiter des premières opérations de réhabilitation : Noailles-Ventre (1er), Noailles-Delacroix (1er), Clovis Hugues/Belle de Mai (3e) et Hoche-Versailles (3e). Ces quatre zones regroupent un total de 1 927 logements dans 317 immeubles. Pour les rénover, le PPA va se doter d’une société d’aménagement, la SPLA-IN (société publique locale d’aménagement – d’intérêt national) « pour pouvoir acheter, réhabiliter et remettre les logements sur le marché », explique le ministre. L’État sera actionnaire minoritaire aux côtés de la Métropole et de la Ville dans cette nouvelle structure dont les statuts juridiques « seront votés avant la fin de l’année », promet Julien Denormandie.
Les associations vigilantes sur le risque de « gentrification »
Comme à chacune de ses visites marseillaises, le ministre de la ville et du logement a donné la primeur aux acteurs associatifs. Le matin de sa visite, Julien Denormandie a donc passé une heure avec les représentants, du collectif du 5 novembre, d’Emmaus, de la fondation Abbé Pierre ou encore de l’association Un centre ville pour tous. « Il y aura un comité de pilotage impliquant les associations qui pourront participer directement au projet », promet le ministre. Seulement, des voix s’élèvent déjà pour remettre en doute la méthode : « On nous parle de concertation alors que les élus ont aujourd’hui signé un document sur leuel nous n’avons même pas été consultés », dénonce Fathi Bouaroua, membre du collectif du 5 novembre et ex-directeur régional Paca de la Fondation Abbé Pierre. Il craint également que les grandes opérations d’aménagement ne servent de prétexte « pour remplacer les pauvres du centre-ville par des plus riches ». La charte de relogement signée par les élus, l’Etat et l’ensemble des associations est censée assurer aux personnes évacuées un logement dans le même quartier. « Mais cela ne sera pas possible sans l’application et l’extension du permis de louer et l’encadrement des loyers », insiste Fathi Bouaroua.
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