L’opinion insoumise
Mauvaise passe pour le député des Bouches-du-Rhône, Jean-Luc Mélenchon. La mayonnaise sociale qu’il espérait voir monter en ces temps automnaux, ne prend pas. Pas assez de moutarde sans doute pour agacer le nez de l’opinion publique. Le leader des Insoumis avait choisi de battre le pavé à Marseille avec un scénario parfaitement huilé pour attirer à lui les médias. Il devait s’insérer dans le cortège de ce jeudi protestataire, pendant la manifestation. Sauf que le chat était maigre et que la cabane a failli tomber sur le chien. En d’autres termes malgré la présence de Jean-Claude Mailly secrétaire général de FO et l’amalgame iconoclaste de toutes les revendications du moment, le défilé marseillais a eu la puissance d’un pétard mouillé malgré deux ou trois fumigènes plus roses que rouges. Du coup Mélenchon, plus grincheux que jamais, a tempêté dans le verre à moitié vide que l’actualité lui servait. On allait voir ce qu’on allait voir, lui et ses troupes désormais quitteraient les arènes peopolitiques pour militer à l’ancienne. Que les Marseillaises et les Marseillais se le disent, ils vont le croiser dans « les cages d’escalier ». Le tract avant d’entrer à nouveau en scène.
Attention à la marche
Un Provençal à la tête du parti, formation, mouvement le plus puissant de France. Christophe Castaner a été adoubé par le Premier ministre, Edouard Philippe, avec des mots flatteurs : « Je ne sais pas s’il sera un bon délégué mais je peux vous garantir que ce sera un excellent général. » L’ancien maire de Forcalquier, candidat malheureux mais chevaleresque des dernières régionales (il a renoncé au second tour pour faire barrage à la lepéniste Marion Maréchal), sait que le plus dur est à venir et comme on le dit dans le milieu politique, c’est lorsqu’on prend le pouvoir que « les emmerdes commencent ». Jacques Chirac qui n’est pas simplement un amoureux des arts primitifs ajouterait qu’elles « volent en escadrilles ». Il va falloir donc à « Casta » atterrir après le sacre de Lyon et regarder dans cet OPNI (objet politique non identifié) ce qui marche et ce qui ne marche pas. Certes, on a passé, avec l’élection d’Emmanuel Macron, un cap inédit. Certes encore, les formations traditionnelles ont explosé ou implosé. Certes enfin, les contestataires se raréfient manif après manif. Mais En Marche peut-il sérieusement affronter les scrutins à venir sans s’être enraciné profondément dans les opinions publiques locales et régionales. Si l’on feuillette une revue de presse, on trouvera plus de place consacrée à la villégiature estivale des Macron à Marseille qu’aux initiatives des parlementaires du mouvement dont a charge désormais Christophe Castaner. Les Marcheurs devraient s’en inquiéter. Ils sont un peu comme les vins nouveaux. Ils ont du mal à vieillir.
Commémorer mais avec quelle mémoire ?
Ils étaient bien maigres les rassemblements censés commémorer, à Aix Marseille et les autres villes et villages, la mémoire de ceux qui sont morts pour la France et plus récemment celles des victimes de la barbarie terroriste. Olivier Mazerolle qui œuvra, un temps, aux commandes de La Provence expliquait sur un plateau de télévision la difficulté, notamment, d’inciter au devoir de mémoire les enfants des quartiers. Il racontait qu’il avait visité des écoles de ces périmètres qualifiés de « difficiles » voire de zones de « non-droit ». « Le problème, témoignait le journaliste, c’est que ces jeunes ne connaissent pas notre histoire comme on ignore tout de la leur ». Le constat fait, il serait facile de pointer du doigt, à l’instar d’une partie de la classe politique, les carences de l’éducation nationale incapable de combler le vide mémoriel. Il y a fort à parier que ces enfants oubliés de la République connaissent mieux l’histoire de l’OM que celle du pays d’origine de leurs parents ou celle du pays dont ils sont désormais des citoyens de plein droit. Il est curieux, dans une ville et un département, où une partie de la population vient d’au-delà des mers, qu’aucun lieu ne soit consacré à l’histoire riche et tellurique des peuples de Méditerranée. La Villa Méditerranée accueillera peut-être dans deux ans la réplique de la grotte Cosquer. On y parlera d’hommes et de femmes qui ont survécu il y a plus de 20 000 ans. Quand parlera-t-on de ceux qui ont suivi ?
Mauvaise conduite générale
Un récent classement en atteste. Marseille est la ville française où on conduit le plus mal et où, cela va ensemble, on se conduit le plus mal. C’est entendu. Les blagues les plus anciennes rappellent que certains marseillais se targuent de cette singularité. C’est celui-là qui se défend devant un policier qui l’accuse d’être passé au rouge et qui répond « orange sanguine ». Ou encore cet autre à qui un étranger reproche de rouler à gauche et qui lance « non monsieur, ici on roule à l’ombre ! » On peut en rire ou en pleurer. Les responsables de la santé publique rappellent régulièrement le nombre d’éclopés de la route qui sont en rééducation dans les établissements phocéens. Comme d’autres mettent le doigt sur une constante : l’impossibilité de pratiquer le vélo dans nos rues. Sans oublier ces piétons qui régulièrement sont pris pour cible par des fadas motorisés. La municipalité sous la pression des riverains met peu à peu en place les chicanes ou dos d’âne qui peuvent, si ce n’est stopper le flux, au moins le ralentir. Il est urgent de généraliser ces mesures et de rappeler les règles élémentaires du savoir conduire. Donc du savoir-vivre.
Merci la RTM
Des amis venus d’ailleurs me collent au mur ce vendredi. « Bien, tes explications pour venir chez toi depuis la gare, sauf que tu ne nous avais pas dit que les transports en commun étaient en grève » et les taxis aussi rares qu’un sentiment de peur chez les All Black pendant le Aka. Bref un sermon pour saluer nos retrouvailles. Et puis l’un d’eux décline son parcours « J’ai descendu la Canebière. Jamais je n’avais vu une telle lumière dans une ville. Puis j’ai pris la navette (le ferry-boat), c’est délicieux cette traversée au milieu des barques. Au palais du Pharo j’ai halluciné devant le panorama. J’ai retraversé et tu ne sais pas, je me suis endormi au fort Saint Jean au milieu des touristes qui profitaient du beau temps. Quand j’ai rouvert les yeux j’ai assisté à un coucher de soleil comme rarement j’en ai vu, et puis en revenant sur le Vieux-Port encore cette lumière sur les immeubles blancs… » Et pour tout ça, à qui on dit merci ?
Le ballon d’ogre
Les réseaux sociaux sont désormais au centre de toutes les polémiques. Délation, lynchage, voyeurisme, atteinte à la vie privée, exhibitionnisme, abêtissement de masse… le champ lexicologique est infini. On pourra rétorquer que ces outils qui ont prospéré au début de ce nouveau siècle, avec l’avènement du numérique, n’ont de dangereux que l’usage qu’on en fait. Comme on pourra nous opposer le fait que tout le monde n’est pas à armes égales dans l’utilisation de ces nouveaux canaux de communication. Le débat ne fait que commencer. Pourtant, cette information quotidienne a des vertus que l’on ne saurait ignorer. Nous pensons par exemple à cet élu départemental et régional qui inlassablement met en ligne – tout en gardant miraculeusement la ligne – les menus que jour après jour il affronte pour se préoccuper ici d’un club du troisième âge, participer là aux agapes d’une fédération de chasseurs, s’impliquer plus loin encore dans quelque action caritative. Au total ce sont des crêpes, une paella, un aïoli… que du roboratif à ébranler le moindre taux de cholestérol. Toute cela, nous le suivons, sur nos petits portables avec des commentaires et des images à l’appui. Notre élu n’est pas le seul et du coup on se dit que plutôt que de conspuer les réseaux sociaux on devrait s’en servir une fois l’an pour décerner le « ballon d’ogre ».