Gomet : Est-ce important que la Région montre son implication dans la F1, notamment à l’occasion de la Foire internationale de Marseille ?
Stéphane Clair. Nous sommes à l’orée de cinq années de Formule 1 avec son retour dans la région. Il était normal avec l’implication de la Région Paca qu’elle mette cette année son stand aux couleurs de la F1, à la Foire internationale de Marseille. Pour nous, c’est formidable de voir que l’automobile a repris sa place, la France a repris sa place à l’échelle du monde dans la Formule 1. On constate, aujourd’hui, que le sport mécanique et tout ce qui est lié à l’automobile et à cette passion reviennent sur le devant de la scène et ça fait très plaisir à un directeur de circuit de voir que finalement on n’a pas oublié que l’on était un pays d’automobile : on a de grands champions, on a des marques et maintenant s’il y a l’engouement populaire, c’est formidable.
Ce n’est pas seulement le retour de la F1 en tant que course… C’est un projet global qui inclut un centre de formation notamment…
S.C. Effectivement, le retour de la Formule 1, ce n’est pas seulement le retour d’une course. C’est un vaste programme sur cinq années, qui incluent tout un volet formation à destination des jeunes. Des formations qui n’existent pas dans notre pays. Aujourd’hui, les jeunes français qui veulent devenir ingénieurs, spécialistes du composite ou d’une autre discipline sont souvent obligés de terminer leurs études à l’étranger. L’idée c’est donc de pouvoir offrir la panoplie complète d’outils de formation ici, à la fois pour les jeunes mais également pour les professionnels en reconversion.
Ce programme va nécessairement avoir un fort impact économique…
S.C. C’est du développement économique, bien sûr, puisque l’on sait qu’un grand-prix de Formule 1 attire les grandes entreprises. Ça commence déjà dans la zone du Plateau de Signes qui jouxte le circuit. On voit des entreprises qui s’implantent parce que la dynamique fait que c’est l’endroit où l’on va parler de sport auto en France et qu’il est bon, quand on travaille dans ce secteur de venir s’installer près du circuit qui devient emblématique.
Ces entreprises sont-elles directement en lien avec le sport automobile ?
S.C. Nous avons les deux cas : celles qui savent que cet endroit va devenir un point formidable pour être exposées et donc elles ont envie de bénéficier de l’image Formule 1. Et puis, il y en a d’autres : des sous-traitants du monde de la F1 ou du monde de la compétition automobile, qui donc tout naturellement viennent rejoindre les professionnels déjà implantés. Cela va permettre à la Région, de devenir le premier pôle en matière d’industrie de sports mécaniques. Et puis c’est également pour toutes nos infrastructures routières, hôtelières… un grand bond en avant avec ce marché qui s’ouvre. Il va nécessairement y avoir des investissements pour améliorer nos infrastructures et ça profitera à tout le monde toute l’année.
Quel est le calendrier ?
S.C. Le calendrier du circuit, lui, est rempli. C’est 300 jours d’activités par an et une vingtaine de compétitions. Aujourd’hui, l’heure est à la préparation des travaux parce qu’à partir du mois de décembre, on aura deux mois et demi pour transformer le circuit et le mettre au niveau de ce que la Formule 1 moderne attend. Et ensuite, tout le travail autour de la mise en place du centre de formation. Dès le début 2018, un peu plus de 20 hectares vont être consacrés et ouverts à la commercialisation pour des entreprises liées aux sports mécaniques avec un accès direct au circuit.
En quoi consiste exactement ces travaux de modernisation ?
S.C. On a décidé pour accueillir la F1 de se remettre à neuf. On va changer l’enrobé de la piste, c’est plus de 90 000 m2 d’enrobé à modifier ; on va changer également quelques virages du circuit pour les rendre plus rapides de façon à favoriser les dépassements. L’idée c’est que le Grand Prix de France devienne un modèle en termes de tracés pour qu’on comprenne que la Formule 1 est un spectacle et qu’on a vraiment beaucoup de chance de l’accueillir dans notre pays. On veut que les pilotes apprécient le tracé, mais surtout que les spectateurs voient des dépassements spectaculaires, donc on va travailler sur ce point. Et puis il y a également toutes les infrastructures d’accueil du public. On attend plus de 60 000 spectateurs et pour ça il faut être prêt.
Ces travaux sont financés par Paul Ricard ?
S.C. C’est le circuit qui fait les investissements puisque c’est un circuit privé que j’ai la chance de diriger et qui assure donc ses propres investissements. Le Groupement d’intérêt public, qui est le promoteur de la F1, lui, va « fabriquer » autour de ça, toutes les conditions d’accueils pour que le public soit heureux d’assister à ce Grand Prix, donc il va à la fois communiquer, vendre les billets, et s’occuper de la construction des tribunes, et des installations éphémères nécessaires à ce type d’événement.
Quel est le coût de cet investissement ?
S.C. Le coût d’investissement pour le circuit est d’un peu plus de 4 millions d’euros, après avoir investi dans les dix dernières années près de 60 millions. C’est un investissement lourd évidemment mais à la hauteur des exigences de la Formule 1.
Et vous attendez des retombées économiques supérieures ?
S.C. C’est ce que l’entrepreneur que je suis espère. Mais il faut regarder le long terme. Par exemple la piste a été refaite il y a 17 ans, donc on va dire que 17 ans d’activité sur un circuit ça nous permet d’amortir et de voir venir, mais on ne peut pas s’arrêter d’investir car on est dans un domaine où les choses progressent et évoluent chaque année. Si on n’investit pas, on reste à la traîne et on nous oublie. On nous avait un peu oublié ces dernières années même si les professionnels eux, continuaient à fréquenter le circuit, le grand public était moins au rendez-vous. Désormais le retour de la Formule 1, du Bol d’Or… avec toutes ces compétitions, on a retrouvé notre place de premier circuit en France et certainement un des plus beaux en Europe.
Le Plateau de Signes, une zone à fort potentiel d’exploitation
Le circuit Paul Ricard est situé sur le Plateau de Signes, au cœur d’un vaste ensemble économique d’intérêt régional de près de 1000 hectares, intégrant une zone d’activité de 240 ha en expansion, l’aéroport international du Castellet et plusieurs infrastructures hôtelières et de loisirs. Plus de la moitié de cet espace devrait être dédiée au développement des axes stratégiques des industries du futur, dont la mécanique et la mobilité durable. Les récentes labellisations des projets Hynovar (Mobilité durable et sport mécanique autour de la filière innovante et prometteuse de l’hydrogène) et Flexgrid (développement d’un smart parc d’activités autour des énergies renouvelables) démontrent l’attractivité du secteur pour l’implantation et le développement de ces filières à haut potentiel.
Il existe un écosystème régional favorable : une cinquantaine d’entreprises, avec en tête, la société Oreca à Signes et le circuit Paul Ricard du Castellet ainsi que l’entreprise Solution F à Venelles. Par ailleurs, des adhérents importants, ST Microelectronics, Visteon, Gemalto, du pôle SCS ont une position affichée sur l’automobile. De nombreuses PME ont des technologies et des savoir-faire qui peuvent intéresser le secteur automobile : RFID, IoT industriel, Applications mobiles et télécoms, Cloud/big data, Sécurité des logiciels embarqués et des systèmes d’identification/authentification.
En terme de positionnement différencié en Provence-Alpes-Côte d’Azur, il existe de forts atouts autour des composants électroniques (Rousset), de la sécurité/cybersécurité des systèmes embarqués et de l’identification, des technologies RFID et IoT, des composants et des briques logicielles pour télécoms. De plus, des entreprises du pôle de compétitivité Optitec proposent des applications pour le secteur automobile : l’entreprise Savimex (Grasse) par exemple qui conçoit et fabrique des afficheurs « tête haute ». Les activités liées aux véhicules électriques (gestion de flotte de véhicules électriques, bornes de recharge) pourraient enfin être rattachées à cette filière.