Le débat public consacré à la transformation industrielle de la zone Fos Berre qui s’ouvre ce soir à Fos-sur-Mer (à 18h salle Parsemain) est une première en France. Organisée par la Commission nationale du débat public (CNDP), l’opération qui se déroule durant plus de trois mois (du 2 avril au 12 juillet) sera scrutée au niveau national et pourrait faire école sur d’autres territoires comme l’a souligné Marc Papinutti, président de la CNDP lors de la conférence de presse de lancement qui se déroulait à Marseille mardi 1er avril en présence du préfet Georges-François Leclerc et d’Audrey Richard-Ferroudji, présidente du débat public « Fos Berre Provence – un avenir industriel en débat ».
Débat public Fos Berre : la raison d’être
Pourquoi un tel débat global de territoire, qui ne porte pas sur un projet industriel isolé, mais sur l’ensemble des dynamiques de réindustrialisation et de décarbona- tion d’un même territoire ? Plus de quarante dossiers concernant l’industrie (hydrogène, acier, chimie ou pétrochimie, aéronautique, etc.) et les infrastructures (réseaux d’électricité, transport, logistique, etc.) sont actuellement déjà engagés ou en projets pour faire du golfe de Fos et de l’Étang de Berre un moteur de croissance économique décarbonée, en soutenant activement la modernisation des sites existants et l’implantation de nouvelles filières industrielles tournées vers la transition environnementale.
Pour les réussir, les défis sont considérables. Il s’agit tout à la fois de renforcer les infrastructures portuaires et logistiques, de garantir un développement industriel en harmonie avec l’environnement et le cadre de vie des habitants, avec des actions concrètes en matière de réduction des impacts environnementaux et de mettre en place une gouvernance agile et proactive, garantissant l’attractivité du territoire, la coopération entre acteurs publics et privés et une concertation efficace avec la population.
Débat public de zone : une disposition de la loi industrie verte de 2023
La loi industrie verte La loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023, dite « loi Industrie verte », introduit des dispositions visant à renforcer la participation du public dans les projets industriels à travers l’organisation de débats publics globaux ou de concertations préalables globales. Elle prévoit la possibilité d’organiser un débat public ou une concertation préalable global(e) lorsque plusieurs projets d’aménagement susceptibles de relever de l’obligation de saisine de la Commission nationale du débat public sont envisagés dans les huit ans à venir sur un même territoire délimité et homogène. Les projets faisant l’objet de ce débat ou de cette concertation global(e) sont dispensés de débat public ou de concertation préalable spécifique (voir la liste dans le document source en bas d’article). Il en est de même « des projets envisagés ultérieurement sur ce même territoire et qui sont cohérents avec sa vocation », explique le ministère, avec la possibilité toutefois donnée à la CNDP de rattraper certains projets. En somme, la loi Industrie verte facilite une planification industrielle plus intégrée et participative, en permettant la tenue de débats publics globaux qui couvrent plusieurs projets sur un même territoire, renforçant ainsi la transparence et l’efficacité des processus décisionnels. Source : CNDP
Le débat public veut donc être à la hauteur de tous ces enjeux en offrant un cadre d’information et de discussion sur les multiples transitions en cours : industrielle et de décarbonation, de transition énergétique, de préservation de l’environnement, de risques naturels et technologiques, de santé et de qualité de vie, d’emplois et de formation, d’aménagement du territoire, de mobilités et enfin de financements et gouvernance.
Il s’agit de débattre avec tout un chacun des modalités mais aussi pourquoi pas du bien-fondé des projets. Il faut « permettre de débattre non seulement des caractéristiques et des impacts d’une politique publique ou d’un projet, mais aussi de leur pertinence et de leur opportunité, c’est-à-dire si oui ou non ils doivent être mis en place ou réalisés, et à quelles conditions » souligne la CNDP. L’approche globale permet également de mesurer les effets cumulés (l’addition des opérations envisagées) des projets pour bien évaluer l’impact d’ensemble sur le territoire.
Débat public Fos-Berre : quelles modalités ?
Comment va s’organiser le débat ? Les modalités proposées permettront au public de prendre connaissance et d’approfondir les sujets. Diverses formes de participation sont proposées, incluant des ateliers, des réunions publiques et des débats en ligne, afin de toucher un large public et d’assurer une participation inclusive et active, à compter du 2 avril 2025.
L’équipe du débat (voir ci-dessous) a organisé les échanges autour de neuf grandes thématiques 1. Transition industrielle et décarbonation 2. Énergie et électricité 3. Risques naturels et technologiques 4. Emplois et formation 5. Environnement (eaux, sols, milieux naturels) 6. Santé et qualité de vie 7. Mobilités et transports 8. Aménagement du territoire 9. Financement et gouvernance.
Une commission et un secrétariat général
Pour assurer l’animation de ce débat public, la CNDP a désigné une commission de huit membres indépendants : Étienne Ballan, Jacques Finetti, Michel Gairaud, Anne Laporte, Corinne Larrue, Ken Novellas, et Émilie Varraud, sous la présidence de Audrey Richard-Ferroudji. Mathias Bourrissoux et Valérie Sakakini, désigné.e.s garant.e.s des concertations préalables sur les projets Distriport (GPMM) et Elyfos (Air Liquide), contribuent à la préparation de modalités du débat communes à leurs concertations. Cette équipe est appuyée par un secrétariat général, constitué de Sébastien Fourmy, Magalie Martin et Iona Rocci, chargé de la mise en œuvre et du suivi du débat public
Le débat public de territoire vient s’inscrire dans un cadre déjà bien établi d’échanges et de dialogues observe la CNDP. Depuis plusieurs années, des concertations régulières sont menées autour des projets de réindustrialisation, de décarbonation et d’infrastructures, permettant de recueillir les avis et préoccupations des citoyens, de débattre, de favoriser l’expression de solutions alternatives. Ainsi entre 2023 et 2025, sept concertations préalables et continues ont eu lieu sur des projets industriels (Carbon, H2V, Gravithy, Deos, Medhyterra, Neocarb). Afin d’en favoriser le suivi, la CNDP a créé un site internet de coordination de ces différentes procédures.
Le débat public « Fos Berre Provence – un avenir industriel en débat » ne se substitue pas à ces concertations dont certaines sont encore en cours (Rhône décarbonation, …), mais les complète en permettant une réflexion collective sur de nouveaux projets d’envergure, en offrant un espace commun de discussion et en garantissant une écoute des intérêts et des préoccupations de l’ensemble des acteurs concernés. De même, de nombreuses démarches collaboratives existent à l’initiative de plusieurs acteurs du territoire : Provence Fabrique des possibles, programme Syrius, Le Lab territorial industrie Fos Berre, l’observatoire citoyen de l’environnement VOCE (Institut Eco-citoyen), Carnet Citoyen du CPIE Rhône-Pays d’Arles, le dispositif Réponses sur la qualité de l’air, etc. Ces démarches sont porteuses d’enseignement et de ressources pour le débat public « Fos Berre Provence – un avenir industriel en débat » et des possibilités d’articulations et de synergies existent à travers des temps communs ou par le versement de leurs conclusions au débat public souligne la CNDP.
Attention, le débat public n’est ni un référendum ni un sondage d’opinion avertit la CNDP, il permet l’expression par l’ensemble des participants de points de vue argumentés et leur prise en compte exhaustive.
Des recommandations adressées à l’issue du débat
À l’issue d’un débat public, la Commission nationale du débat public publie un compte rendu qui restitue la parole du public. Ce compte rendu présente l’en- semble des observations et propositions du public et les enseignements du débat. Il comprend également des recommandations adressées au responsable du projet, qui doit y répondre dans les trois mois suivant sa publication. « Plus de 63 % des projets soumis à débat public ont été modifiés par leurs responsables à l’issue du débat » affirme la CNDP.
Document source : le dossier de saisine de la CNDP porté par les préfets
Liens utiles :
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