Les confidences de la députée Cathy Racon-Bouzon

Par Narjasse Kerboua.

Les réunions de concertation se multiplient dans le pays pour dessiner les modèles de demain dans l’audiovisuel. La députée Cathy Racon-Bouzon LREM qui siège à la mission d’information nous livre quelques pistes de réflexion.

Lors de ses vœux à la presse le 3 janvier dernier, Emmanuel Macron avait indiqué qu’un projet de loi serait présenté en conseil des ministres d’ici à la fin de l’année. « Il importe de revoir en profondeur et de manière très dépassionnée la grammaire et les règles de l’audiovisuel public », avait déclaré le chef de l’Etat, s’appuyant dans son propos sur les grandes transformations qui traversent les médias ces dernières années. Si les propositions qui devaient être présentées à la fin du premier trimestre 2018 tardent, les réunions de concertations, elles, se multiplient. A Marseille, la dernière en date était organisée le 19 avril, au Musée d’histoire (photo). Un débat sur le thème « Télévision, radio, culture : quels modèles pour demain ? », à l’initiative de la députée Cathy Racon-Bouzon et en présence de son homologue, Aurore Bergé, députée des Yvelines et co-rapporteur de la mission d’information sur l’audiovisuel.

La députée LaRem des Bouches-du Rhône siège au sein de deux groupes de réflexions liés à cette réforme. L’un informel, composé d’autres députés LaRem. Ils se réunissent depuis le début de l’année et livreront prochainement une recommandation. L’autre est la mission d’information officielle de l’Assemblée nationale, qui regroupe des personnes de la Commission interculturelle et éducation de différents bords politiques.

Etablir de nouvelles règles du jeu conformes aux nouveaux usages

« Nous travaillons sur la régulation de la communication de l’audiovisuel à l’heure du numérique. Nous menons une réflexion plus globale sur la manière de s’adapter aux nouveaux acteurs du marché ». La mission vise à proposer de nouvelles règles du jeu pour répondre à de nouveaux usages et de nouvelles pratiques, afin de mieux s’adapter à la manière dont le public s’approprie aujourd’hui les contenus. « Il y a la nécessité d’une nouvelle régulation, assure Cathy Racon-Bouzon. D’une part, parce que les groupes audiovisuels traditionnels ont été fortement fragilisés par la concurrence des acteurs numériques et d’autre part, les nouveaux acteurs (musique, cinéma..) ont créé de nouveaux usages chez les consommateurs. La télévision linéaire ne se regarde plus à heure fixe, mais plutôt en live, en replay… L’enjeu est de renforcer les groupes audiovisuels et de pouvoir avoir une meilleure régulation pour un meilleur partage de la valeur. » Les réflexions en cours ont mis en évidence différentes interrogations. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) aura-t-il le pouvoir de réguler les contenus diffusés sur internet ? Doit-on refondre la chronologie des médias ? Ou encore doit-on imposer aux acteurs numériques une contribution à la création ? « Aujourd’hui, par exemple, Youtube est considéré comme un hébergeur et non comme un éditeur. Par conséquent, il n’est pas soumis à une participation pour la création, donc il y a une vraie distorsion de concurrence par rapport aux groupes audiovisuels français. »

Une nécessaire régulation

Concernant la chronologie des médias (c’est-à-dire les fenêtres d’accès données à une œuvre cinématographique pour être diffusée), là-encore les délais imposés par la loi doivent être revus. En effet, l’oeuvre a un temps à respecter pour être projetée au cinéma, puis un temps où elle est diffusée sur des chaînes payantes privées comme Canal +, et enfin des fenêtres d’accès publics… Pour Cathy-Racon Bouzon, ces délais sont devenus un « peu obsolètes car rien n’empêche un producteur, aujourd’hui, d’aller vendre son œuvre à Netflix par exemple, et de la proposer en même temps que la diffusion au cinéma. Tout est bouleversés et notre rôle à nous c’est de réguler tout ça ».

Quant aux missions du CSA, Cathy Racon-Bouzon plaide pour conserver « le rôle fondamental de l’instance en terme de contrôle des contenus audiovisuels plus que jamais nécessaire », ouvrant cette réflexion sur le contrôle des contenus diffusés sur le net. A titre personnel, elle estime que le CSA doit être « repensé et réformé », l’attribution d’une fréquence télé, radio ou encore la nomination des patrons de chaînes de télévision publique ne devant plus être de son ressort.

Vers une mutualisation des contenus du service public ?

Considérant qu’Emmanuel Macron a qualifié l’audiovisuel public « de honte de la République » (en décembre 2016 en recevant la commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale), Cathy Racon-Bouzon explique que ces propos ont été sujets à mauvaise interprétation. « Il a qualifié la manière non-acceptable dont l’audiovisuel public peut ne plus remplir la mission qui lui a été donnée au départ. S’il ne réalise que des programmes qui ne concernent et ne sont compris que par les plus de 65 ans, il y a des questions à se poser, surtout au regard du budget de l’Etat (4,5 milliards d’euros) ». Sur la table, là encore, des pistes à l’étude qui vont de la création de synergie entre les différentes chaînes, avec la mutualisation des contenus ou au contraire le repositionnement de chaque chaîne avec une mission bien précise. « Au travers des auditions, nous nous sommes rendu compte que TV5 Monde produisait certains contenus qui n’étaient jamais envisagés comme pouvant être récupérés, distribués ou diffusés par France 2, donc il y certaines aberrations qui justifient qu’on se mette autour de la table ».

« Il y a toute sa place pour une radio métropolitaine »

Autre réflexion : laisser à France 2 une couverture nationale pour que France 3 se concentre sur son rôle de « proximité totale extrêmement régionalisée». Dans cette hypothèse, se pose la question des chaînes de télévision locale. Quel avenir ? Cathy Racon-Bouzon avoue qu’elles ne font pas l’objet de la réflexion, d’autant que pour elle, leur existence « n’a pas toujours de sens, à part dans certaines régions avec un ancrage régional très fort comme en Corse ou Bretagne où cela fait sens, ailleurs l’expérience prend assez peu. Elles ont objectivement du mal à trouver leur vitesse de croisière… » Elle trouve d’ailleurs plus de « légitimité et de raison d’être » à la création d’une radio métropolitaine qu’en l’existence d’une télévision locale. « Quand je vois la force de France Bleu, ici, avec une vraie ligne éditoriale de proximité et de fortes audiences, je me dis qu’il y a toute sa place pour une radio métropolitaine. »

Un guichet unique pour les sites d’information 100% numérique

Si le service public a commencé à adapter son offre aux nouvelles attentes du public, en proposant des contenus web ou en mutualisant ses supports médias (radio et télévision), l’idée est d’aller encore plus loin « peut-être sur certaines plages horaires une matinale faite par France Bleu à France 3 par exemple… » Restent dans l’équation les sites d’information 100% numérique. Si cette catégorie n’a pas (encore) été incluse dans les réflexions, une piste a néanmoins été avancée : celle d’un guichet unique via la box internet. « Les gens aujourd’hui ne sont plus prêts à s’abonner au coup par coup à différents supports et par conséquent c’est compliqué d’avoir un auditoire régulier. Or ils sont prêts à s’abonner à une box, qui interviendrait dans ce cas comme un guichet unique. On pourrait envisager d’intégrer un abonnement presse ou une redistribution de ces moyens-là récoltés par la box au support de presse… » Au stade embryonnaire, la piste n’inclut pas la gestion de la publicité. « Mais de manière globale, là aussi, il faudra redéfinir les règles du jeu, et mieux accorder les pratiques en matière de publicité ».

Les premières annonces concernant la réforme de l’audiovisuel devaient intervenir avant l’été, avant des orientations concrètes annoncées pour la fin de l’année 2018.

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