Douze associations de l’économie circulaire et acteurs industriels appellent le gouvernement « à lancer rapidement une concertation des différentes parties prenantes pour définir collectivement, au cours de l’année 2025, les contours d’un dispositif de consigne pour réemploi et recyclage » des emballages de boissons en France.
L’entrée en vigueur, le 12 février 2025, du règlement européen sur les emballages et déchets d’emballages, dit PPWR, pour la période 2025-2040, fixe en effet des objectifs d’au moins 90% de collecte séparée des bouteilles en plastique à usage unique et des canettes en aluminium en 2029 (et de 10% d’emballages réemployables en 2030), avec un seuil dérogatoire de 80% de taux de collecte séparée dès 2026.
Les douze signataires
Reloop, Citeo, Réseau Vrac et Réemploi, EC2027, Syndicat des boissons sans alcool, Maison des eaux minérales naturelles, La Boîte Boisson, Lemon Tri, Constellium, Aluminium France, Tomra, Association MerTerre
Or, la France est encore loin des objectifs européens, selon les douze signataires, qui jugent « peu probable avec le système actuel de collecte des emballages ménagers » d’atteindre ces objectifs, qui lui permettraient d’être exempté de la mise en place de la consigne. Et ce, malgré les engagements des collectivités territoriales, vent debout contre cette mesure (lire plus bas) et derrière qui le gouvernement s’était rangé, en 2023, en échange de la mise en place de 14 mesures pour atteindre l’objectif de collecte européen sans consigne.
Consigne : seuls 60% des bouteilles sont collectées pour être recyclées
Moins d’une canette sur deux (45% en 2022) et à peine plus d’une bouteille sur deux (60% en 2022) sont collectées pour être recyclées aujourd’hui dans l’Hexagone, et moins de 3% des bouteilles sont réemployées, avancent les signataires pour qui ces chiffres « ne laissent plus la place à aucun doute : la consigne va devenir obligatoire. »
Et d’appeler sans plus tarder à un système de consigne mixte des emballages de boisson, pour recyclage et pour réemploi, qui constituerait « le point d’entrée indispensable pour une économie circulaire des emballages de boissons » et permettrait « d’atteindre rapidement un taux de collecte élevé, d’au moins 90% ». Un système qui garantirait à la fois aux recycleurs l’accès à des matériaux de qualité, les emballages n’étant pas contaminés par d’autres emballages ; aux opérateurs du réemploi la viabilité économique de leurs investissements et la capacité d’atteindre l’objectif de 10% d’emballages réemployables à 2030 ; enfin, aux producteurs de boissons la capacité d’atteindre leurs obligations d’incorporation de plastique recyclé sans avoir à aller chercher la matière recyclée en dehors de nos frontières, ce qui est le cas actuellement.
Les collectivités territoriales montent au créneau
C’est peu dire que les collectivités territoriales, et avec elles nombre d’associations environnementales, se sont montrées hostiles à l’installation d’une consigne, lors d’un premier tour de table sur la question, en 2023.
Ces dernières mettaient alors en avant le coût engendré par une telle disposition, qu’elles évaluaient « entre 750 millions et un milliard d’euros d’investissement » pour équiper la France de 30 000 à 100 000 automates de collecte. Autre crainte soulevée, celle de voir le service public de tri des déchets recyclables démantelé, la consigne revenant à sortir du bac jaune les emballages recyclables les mieux valorisables. Avec, en filigrane, autant de manque à gagner pour les communes, au profit du privé…
Et de mettre en avant 14 mesures permettant d’atteindre l’objectif européen de collecte séparée de 90% des bouteilles en plastiques en 2029. Parmi elles, mobiliser les Français autour du geste de tri, développer des collectes plus performantes en augmentant leur fréquence et la taille des bacs et en densifiant les points d’apport volontaire, contraindre les éco-organismes, en appliquant les sanctions prévues pour la non-atteinte des objectifs et en augmentant le niveau de couverture des coûts du service public, ou encore sanctionner automatiquement le non-respect des règles de tri.
A l’époque, Christophe Béchu, ministre de la Transition économique, les avait entendues. Et aujourd’hui ? Une chose est sûre, pour les douze signataires de l’appel, le compte n’y est (toujours) pas.
« Avec l’entrée en vigueur du règlement européen PPWR, cette opportunité devient une obligation. La France pourra ainsi rejoindre les 17 pays européens ayant déjà mis en place un système de consigne (tels que l’Allemagne, l’Irlande, la Suède, la Finlande, l’Autriche, la Hongrie, la Roumanie, les pays Baltes etc.) et ceux qui ont d’ores et déjà prévu de l’instaurer d’ici 2027 (l’Espagne, la Pologne, le Portugal, et le Royaume-Uni). Dans les pays ayant mis en place la consigne, on observe un bond des performances de collecte permettant d’atteindre voire de dépasser aisément les 90 % de collecte des emballages de boissons », soulignent encore les douze signataires.
Lesquels rappellent opportunément qu’une telle mesure permettrait par ailleurs de faire baisser le montant de la « taxe plastique » que la France paie chaque année à l’Union européenne en raison de ses mauvaises performances en la matière, soit quelque 1,5 milliard d’euros, la plus élevée de toute l’Union européenne. Tout en prévenant : « Les exemples étrangers nous montrent qu’il faut entre deux à trois ans pour définir les contours d’un tel dispositif et le mettre en place. Il est donc urgent que l’État se saisisse à nouveau du sujet et concerte les différentes parties prenantes sur la construction d’un système de consigne pour réemploi et recyclage en France. »
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