La question des urgences a souvent focalisé l’actualité, est-ce un problème en soi ou est-ce le révélateur d’une chaîne de soins défaillants ?
Bruno Ventelou : Les urgences étaient passablement encombrées en partie parce que la médecine de ville n’assumait pas totalement son rôle de permanence de soin, c’est un défaut de la médecine libérale que de négliger les fonctions de service public général. Les médecins libéraux sont payés à l’acte, pour un service privatif. C’est une tradition qu’il faut sans doute revoir. Les Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) du plan “Ma santé 2022” ont été lancées pour créer des plateformes de soins urgentes basées sur l’exercice libéral avec des financements pour répondre en partie aux urgences. Mais cela ne suffira certainement pas pour absorber la suractivité des urgences dans certaines zones de France. Il y a une question de bonne allocation des moyens avec des situations très différentes selon les territoires.
Les contraintes du confinement ont amené un choc numérique qui a facilité la télémédecine. Cette évolution, qui semblait impossible, va-t-elle perdurer et changer les pratiques médicales ?
Bruno Ventelou : Oui très fortement. D’autant que ce choc imposé vient dans l’année qui suit la libéralisation des consultations de télémédecine qui sont devenues éligibles à un forfait de rémunération, en mars 2019. Les médecins étaient intéressés par la technologie, mais les contraintes quotidiennes, sans doute, avaient fait que la pratique ne s’est pas développée. Les patients n’étaient pas motivés pour supprimer le lien présentiel avec le médecin, surtout je pense les personnes âgées. La crise sanitaire a levé les obstacles de façon brutale ; mais une fois que le pas est franchi, cela va booster le recours à la téléconsultation.
(*) N.D.L.R. : Pour le Haut conseil de la santé publique, une maladie chronique est un état pathologique de nature physique, psychologique et/ou cognitive appelé à durer avec un retentissement majeur sur la vie quotidienne du patient. Elle s’oppose aux maladies aiguës qui induisent une altération de l’état général de santé avec des symptômes identifiés, une évolution puis une guérison.