Le garde des Sceaux était en visite à Marseille en fin de matinée pour présenter officiellement le nouveau procureur de Marseille Nicolas Bessone. À l’issue de cette présentation, Éric Dupond-Moretti a répondu à la question qui brûle les lèvres des mondes économique et judiciaire ces derniers mois : oui, la future cité judiciaire marseillaise sera bien implantée à Euromediterranée, a annoncé le ministre, confirmant ainsi les informations obtenues par Gomet’ plus tôt dans la matinée, et sa préférence depuis le début du projet.
« L’hypothèse du centre-ville, dans un périmètre urbain très dense, conjugué aux probables travaux du tramway (vers la place du 4 septembre, ndlr), sans compter la relocalisation des juridictions durant la période forcément longue des dits travaux. Une cité judiciaire nécessite de regrouper l’ensemble des juridictions sur un même site. Sinon, ce n’est plus une cité judiciaire. Donc la construction d’un tel édifice nécessite une emprise foncière colossale impossible à avoir en centre-ville et Dieu sait que nous avons cherché », explique le ministre de la Justice pour justifier son choix.
Le budget consacré à ce projet se chiffre à 350 millions d’euros. Si le ministre assure qu’il doit voir le jour en 2030 – contre 2028 initialement annoncé -, il ne précise pas la date du début des travaux. Selon des sources concordantes, la future cité judiciaire se projetterait précisément sur un site entre la tour CMA-CGM et la zone logistique Sogaris, en face de la future Cité scolaire internationale (îlots d’Anthoine et foncier sous l’autoroute du littoral), des parcelles propriétés de l’Etablissement public d’aménagement Euroméditerranée. L’Agence publique pour l’immobilier de la justice (Apij) est à la manoeuvre. Le futur bâtiment s’étalerait et s’élèverait ainsi sur une superficie comprise entre 40 000 et 50 000 m².
Dupond-Moretti exhorte à mettre en œuvre des mesures pour préserver le centre-ville
Ce choix d’Euroméditerranée va à l’encontre des attentes des mondes judiciaire et économique, qui espéraient un maintien de l’activité en centre-ville et craignent de voir le commerce s’y effondrer. Face à ces inquiétudes, le ministre se veut rassurant : « Je prends la ferme résolution de revitaliser le centre ville et souhaite que l’ensemble des parties prenantes soient étroitement associées à la définition de mesures d’accompagnement », affirme ainsi le garde des Sceaux. Parmi les mesures envisagées par Eric Dupond-Moretti, la relocalisation dans les palais Monthyon et Autran d’une antenne de l’Ecole nationale de la magistrature, de l’école des avocats du Sud-Est (Edase) et de l’école des greffiers. Il envisage aussi l’implantation « d’une maison du droit ou des services du ministère. »
« Je missionnerai à nouveau le préfet pour mener une concertation qui permettra de trouver une activité pour les palais Autran et Fortia d’ici le printemps 2024 », poursuit le ministre.
Eric Dupond-Moretti
Interrogé à l’issue de la prise de parole ministérielle, au cours d’une réception donnée dans le palais Monthyon, le bâtonnier de Marseille Mathieu Jacquier confie n’être pas rassuré pour autant : « Nous estimons qu’il s’agit d’une erreur financière que d’aller construire là-bas, sur un terrain inondable (ruisseau des Aygalades, ndlr). Il va falloir traiter le terrain avant de construire, ce qui va prendre du temps. Construire dans ces conditions, ce n’est pas raisonnable. Mais maintenant que nous avons connaissance de ce choix, nous allons faire en sorte de peser de tout notre poids dans les décisions à venir », estime-t-il. Interrogé sur ce point par Gomet’, le ministre de la Justice s’insurge : « Je vous rassure, on ne va pas construire ça sur pilotis et le terrain n’est pas inondable. Vous ne croyez quand même pas qu’on va emmener le justiciable marseillais en gilet de sauvetage ! »
Le président du tribunal de commerce, Jean-Marc Latreille, ne se montre pas plus satisfait de ce choix : « Petite déception car je caressais l’espoir que le tribunal de commerce soit logé au palais Monthyon avec le conseil des prud’hommes pour conserver une activité judiciaire au sein de la ville, comme cela avait été envisagé un temps », soupire-t-il.
Actuellement situé rue Emile Pollak (6e), le tribunal de commerce devrait lui aussi déménager sur Euroméditerranée avec l’ensemble des juridictions. Côté politique, le maire de Marseille Benoît Payan, présent ce matin, n’a pas souhaité commenter le choix du garde des Sceaux. La cité judiciaire n’a pas fini de faire parler d’elle…
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