Il n’y a plus de barrage, plus de front républicain, plus de retenues, plus d’hésitation, le Rassemblement national fait des Bouches-du-Rhône un bastion avec des chiffres qui font trembler les élus locaux comme les chefs de parti.
Dans cet espace métropolitain, le Rassemblement national accentue l’avance qu’il avait prise lors des derniers scrutins. Le résultat global à Marseille fait illusion le Rassemblement national y fait à peu près son score national avec 30,14% des voix, la liste LFI en sort très honorablement avec 21,54% des voix, les socialistes font 11,49 % des voix et la liste Renaissance s’effondre avec un petit 10,32 %.
Renaissance : le sort d’un parti centriste
Le score de Renaissance qui oscille autour des 10%, qui descend à 7% dans certaines communes comme Les Pennes Mirabeau ou Sénas est le sort que le public provençal réserve depuis longtemps aux partis centristes. Le midi semble plutôt manichéen et n’a jamais réservé un bon accueil aux listes du Modem par exemple, conduites par François Bayrou. Le centre y est vécu comme un appoint et non comme un point de rassemblement, il est sommé de choisir son camp, il n’a jamais réussi dans les Bouches-du-Rhône une réelle percée. Donc Renaissance capte 1/10 des votants ce qui est plus que léger pour un parti de gouvernement.
Les Verts “groupusculisés”
Les Verts, qui sont présents dans un certain nombre de mouvements sur le terrain, qui ont maintenant des élus dans nombre de collectivités locales, sont revenus à l’état d’un groupuscule d’extrême gauche, enfoncé dans le wokisme, ne représentant aucune alternative. Les résultats sont à peu près constants autour des 5 % , ils font du parti Vert une éventuelle force d’appoint, mais certainement pas un parti qui pose les questions fondamentales de la transition écologique et énergétique.
Zemmour et Maréchal s’implantent
Troisième réalité sur tout le territoire : la percée, modeste mais enracinée, de Marion Maréchal et de Éric Zemmour avec 6,72 %. Certes, ce binôme tourne autour des 6 %, mais avec beaucoup de constance et il a un enracinement réel dans toutes les communes y compris Marseille, Aix-en-Provence et tout le territoire. Ont-ils capté un vote de droite orphelin ou jumeau avec un Ciotti qui a endossé les habits de l’extrême droite ? Ce pourrait être le cas pour une frange de l’électorat, puisque l’effondrement intégral de la droite traditionnelle est patent. Dans un scrutin à deux tours, ces 5 % à 6 % auront du poids pour faire élire des députés Rassemblement national qui n’ont pas d’autres réserves de voix ou d’autres…
La France insoumise renvoyée dans les cordes
LFI qui avait fait des Bouches-du-Rhône un tremplin, chute à 13,43%, mais avec des baisses à 7,94 % à La Ciotat, à 6,03 % aux Pennes Mirabeau, 6,92 à Sénas, 6,67 à Chateauneuf-les-Martigues. Les scores restent dans la moyenne départementale à Aubagne, à Tarascon, à Port-Saint-Louis, à Arles ou Aix-en-Provence. Loin d’un Front populaire !
Bellamy en rade
La droite tient le haut du pavé dans nombre de collectivités territoriales du 13, elle s’est divisée, mais n’a pas trouvé dans le candidat Bellamy, un refuge ou une expression. Dans nombre de communes, le député européen sortant dépasse à peine les 5 % comme Plan-de-Cuques, 5,28% à Aubagne, 5,45% à Allauch, 5,62 % à Fuveau ; mais passe sous la ligne de flottaison avec 4,65% à Saint-Martin de Crau, 4,86 % à La Ciotat, 3,92% aux Pennes Mirabeau ou 3,59 % à Châteauneuf-les-Martigues. On cherche ici « le nouvel élan pour Bellamy » annoncé sur toutes les radios par Éric Ciotti dimanche soir.
Le retour modeste des socialistes
Soyons clairs dans un département qui fut un bastion de la gauche et des socialistes en particulier, le score reste très modeste avec 11,03 % . Mais il est vrai que Place publique et le Parti socialiste conduits par Raphaël Glucksmann ont à peu près partout stabilisé un électorat de 10 % qui était orphelin d’un leader. Avec des variations à la baisse à 6,68% à Sénas, 6,25% à Tarascon, 7,97% à Plan de Cuques, 3,52% à Port-Saint-Louis, 9,17 % Aubagne, 7,20 % à Châteauneuf-les-Martigues, mais des petites percées à Trets à 11,45 %, à Saint-Rémy à 11,68 %, Venelles à 17,30 %, à la Roque-d’Anthéron avec 15,54 %, à Arles avec 12,22 %, à La Ciotat avec 11,16 % , 13,73 % à Velaux, 15,19 % à Eguilles, 11,68 % à Saint-Rémy et 11,45 % à Trets
La carte des Bouches-du-Rhône fait apparaître au-delà de ces constats sur des petits partis ou des grands partis devenus petits, trois zones distinctes.
Le Rassemblement national avait déjà une implantation puissante dans les anciens bastions du Parti communiste autour de l’étang de Berre, dans l’est et le nord du département. Cet enracinement se confirme avec des scores qui dépassent les 50% à Châteauneuf-les-Martigues, aux Pennes-Mirabeau, à Fos-sur-Mer avec 53,81 %, à Plan-de-Cuques, aux Saintes-Maries de la mer avec 54,34 %, à Sénas 54,34 % .
Jordan Bardella caracole au-dessus des 45% à Martigues avec 47,97 %, à Istres avec 45,10 %, à Lançon-de-Provence avec 48,7 %, à Tarascon avec 46,3 % , Port-Saint-Louis avec 46,31 %, Allauch avec 47,97 %.
Dans une série de petites villes autour du pays d’Aix, le leader du Rassemblement national fait toujours mieux que son score national de 31 %. Mais il se maintient en dessous des 40%. On peut citer Fontvieille avec 38,81 %, Lambesc avec 33,88 %, Fuveau avec 33,26 %, Velaux à 39,58 % et Éguilles à 28,7 %.
Trois exceptions : de Port-de-Bouc à Aix en passant par Marseille
Enfin notons trois exceptions aux courants puissants qui ont traversé le département
Port-de-Bouc est la seule ville à donner un score honorable au Parti communiste avec 19,33 % .
Mais les configurations différentes significatives sont celles d’Aix-en-Provence et Marseille.
Aix est la seule ville où le Rassemblement national fait moins que son score national avec 22,69 %, Valérie Hayer y fait un honorable 17,27 %, tandis que les socialistes sont à un point avec 16,47%, LFI réalise 11,84 % et les Verts sauvent la mise à 6,53 %. C’est une base électorale hétéroclite et étriquée pour la maire d’Aix, Sophie Joissains, et peut-être un espoir pour les députés sortants du pays d’Aix : Anne-Laurence Petel et Mohamed Laqhila.
Marseille partagée entre gauche et extrême-droite
Benoît Payan a appelé à « un printemps marseillais au plan national ». Bizarre car le calcul de ses soutiens à Marseille est fragile. Le Rassemblement national y fait plus de 30%. Marion Maréchal 6,92 % et Bellamy est laminé à 2,73 %. ; cela fait néanmoins un total d’opposants de 40%.
La France insoumise fait un beau score comme deuxième parti de la ville à 21,54 % des voix, mais rappelons-le, ne fait pas partie du Printemps marseillais !
La liste socialiste et Place publique, que Benoît Payan a fortement soutenue, fait un petit résultat à 11,49 %, les Verts disparaissent à 2,73 % et les communistes alignent 2,12 % . La base électorale de Benoît Payan est donc de 16%. Plus que celle de la majorité présidentielle qui même alliée à la droite ferait 13%. L’un et l’autre sont bien faibles face au 37% de l’extrême droite. L’analyse par arrondissement permettra d’affiner les leçons de ces résultats.
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