Les députés Jean-Marc Zulesi (LREM), Pierre Dharréville (PCF) et Eric Diard (LR) ont dévoilé les résultats de leur mission parlementaire lancée il y a un an sur la réhabilitation de l’étang de Berre. Ils attaquent principalement la centrale EDF de Saint-Chamas et réclament une clarification de la gouvernance.
L’étang de Berre, deuxième étendue d’eau salée d’Europe, souffre d’une mauvaise réputation depuis des dizaines d’années notamment à cause de son paysage industrielle. Pourtant, « ce n’est plus une problématique de rejets de polluants industrielles. Le problème est réglé depuis longtemps. D’ailleurs, on peut maintenant se baigner sans danger », assure Jean-Marc Zulesi, le député de Salon-de-Provence et rapporteur de la mission parlementaire présentée mercredi 23 septembre à l’assemblée nationale. La problématique environnementale reste pour autant entière avec une dégradation avérée de la faune et la flore locale. Le rapport des députés fait un état des lieux et propose plusieurs solutions.
La centrale EDF de Saint-Chamas au cœur du problème
En analysant les eaux de l’étang de Berre, force est de constater que la salinité est bien en dessous de son taux naturel. La modification de son état naturel impact directement sa vie sauvage avec comme en 2018, des épisodes d’anoxie, un manque d’oxygène dans l’eau, qui tuent certains poissons, palourdes et les plantes comme les zostères, ces algues témoins de la bonne santé de l’étang. « Véritables prairies sous-marines formant au lac une ceinture verte et luxuriante d’une surface de 6 000 hectares au début du siècle, les zostères ne couvraient plus dans les années 2000 que quelques hectares », relève le rapport. Pour les députés, le principal coupable est la centrale hydroélectrique EDF de Saint-Chamas. « L’entrée en service de l’usine de Saint-Chamas en 1966 et les rejets induits d’eau douce et de limons dans l’étang de Berre ont considérablement modifié son écosystème », écrivent-ils. La salinité était constante avant 1966 à environ 32 ‰. Après 1966, cette valeur a fortement varié, entre 11 ‰ et 30 ‰. Ces rejets erratiques d’eau douce dans l’étang induisaient des variations fortes de la salinité de ce dernier. En 2006, l’Europe a condamné la France sur ces rejets d’eau douce poussant EDF a réduire de moitié son débit. Désormais, l’usine rejette chaque année plus de 1,2 milliard de mètre cube d’eau douce dans l’étang. « C’est encore trop », tranche Pierre Dharréville. Avec ses collègues députés, ils proposent de diviser encore par deux ce débit. « En aucun cas, nous ne souhaitons fermer la centrale », prévient Jean-Marc Zulesi. Un avis qui n’est pas forcément partager par tous les élus du pourtour de l’étang. Le maire de Berre, Mario Martinet se demande si « cette centrale de Saint-Chamas est vraiment utile ? Ne pourrait-on pas arrêter la chaîne hydroélectrique Durance-Verdon à Mallemort pour rejeter l’eau douce dans la Durance ? ».
Pour EDF, « circulez, y a rien à voir »
Contacté par Gomet, EDF ne se prononce pas pour l’instant sur le sujet. « Nous préférons prendre connaissance du rapport avant de répondre », nous indique la communication du groupe. Auditionné par les parlementaires pendant la mission, « EDF a répondu à toutes nos questions », souligne Jean-Marc Zulesi. Cependant, il avoue leur manque de volonté face au problème : « A les écouter, il n’y a pas de problème. C’est circulez, il n’ya rien à voir ». Pour réduire le débit de la centrale, les députés propose par exemple à EDF de créer plusieurs micro-centrales plus haut sur la Durance afin d’utiliser le surplus. « Elle pourrait aussi être utiliser pour irriguer des terres agricoles », avance le député LREM. Le rapport évoque également la création d’une dérivation pour rejeter les eaux de la centrale dans le Rhône. Ce projet soutenu par le maire de Berre « reste à l’étude », indique Pierre Dharréville. Il nécessiterait cependant un chantier pharaonique dont le coût était estimé à plus d’un milliard d’euros dans les années 2000.
Outre les rejets d’eau douce trop abondants, la centrale EDF déverse également plus de 60 000 tonnes par de limons dans l’étang « augmentant sa turbidité » et perturbant la croissance et la diffusion des herbiers de zostères. Les députés proposent ainsi de valoriser cette matière qui « pourrait être utiliser pour les cultures agricoles ou encore la création de remblais », estime Jean-Marc Zulesi. Il demande donc à l’Etat de créer une nouvelle filière de valorisation de ces limons pour permettre à EDF de les revendre. « On veut les obliger à décanter l’eau de leurs bassins pour éviter le rejet de limons. Soit. A nous, maintenant, de leur trouver un débouché », explique-t-il.