Après 35 ans de carrière au sein de grands groupes de prêt-à-porter français, Asics, Kering puis Lacoste, Didier Lalance est devenu directeur général à 59 ans de l’entreprise marseillaise Just Over The Top (JOTT). Sa prise de fonction en mars 2021 fait suite au rachat de la marque de doudounes iconiques en janvier 2021 par le fonds d’investissement L Catterton, cofondé par LVMH. Depuis ce rachat, la marque imaginée par deux cousins marseillais, Nicolas et Mathieu Gourdikian, ne cesse de se développer avec plus de 200 magasins en Europe et en Asie.
Didier Lalance a conservé le siège social à Marseille, dans de nouveaux locauxboulevard François Arago(5e arrondissement), à quelques pas du siège historique. Le directeur nous a reçu dans un show-room de 200 m2, lumineux et design, dont la variété des produits donnent le ton d’une ascension haute en couleurs.
En octobre, vous avez emménagé dans des locaux spacieux à Marseille. Pourquoi avoir fait le choix de rester ici alors que la marque se déploie à l’international ?
Didier Lalance : Ce projet méritait un lieu pour incarner la marque. Nous avons 45 personnes qui travaillaient à Marseille dansl’entrepôt historique du chemin Saint-Jean-du-désert (5e arrondissement) donc cette décision a été très pragmatique. Quand j’ai pris mes fonctions, j’avais déjà dans la tête d’aller très vite. Je ne voulais pas déménager les équipes qui n’allaient pas me suivre. Aujourd’hui, notre conviction c’est d’assumer notre ADN d’être né à Marseille, sur le littoral méditerranéen.
Pour soutenir votre développement, vous avez doublé vos effectifs en deux ans. De quelles compétences aviez-vous besoin ?
D. L : Nous avons recruté 45 personnes expertes dans le digital et le développement international. Deux expertises que Jott n’avait pas puisque l’on faisait la majorité de nos ventes en « retail » (vente en magasin) et en « wholesale » (vente en gros). En fait, il n’y a rien de génial dans ce qu’on a fait. Ce qui est stupéfiant, c’est la vitesse à laquelle on l’a fait ! Nous sommes passés de 45 à 90 personnes, de 70 à 150 millions de chiffre d’affaires, notre site internet enregistrait 2% des ventes alors qu’aujourd’hui il en fait 12%, de 80 magasins à plus de 200… Je vous assure que ce cycle est certainement le plus complexe que Jott aura connu.
Depuis votre arrivée, 50 boutiques Jott en France et 70 à l’international ont été ouvertes. Expliquez-nous votre stratégie internationale.
D. L : L’internationalisation c’est déjà 23 magasins en Chine, 20 en Espagne, 20 sur le Benelux, deux à Londres. Nous avons aussi ouvert en Suisse, en République Tchèque, en Slovénie, en Autriche, au Portugal… Mais nous n’avons pas vocation à ouvrir 100 magasins par pays. L’important pour nous c’est d’avoir une vitrine. Nous sommes aussi en discussions avec le Brésil et l’Argentine mais nous n’avons pas vocation à vendre en propre ni en franchise en Amérique du Sud. En ce qui concerne les États-Unis, nous allons adresser le marché d’ici deux ans. En revanche, nous devons y aller de manière compacte car il nous faut une forte visibilité de la marque. C’est une forme de débarquement à l’envers. (rires)
Comment avez-vous adressé le marché chinois ?
D. L : La communauté familiale est essentielle pour aborder le marché chinois. La famille en Chine c’est un homme, une femme et un enfant unique. L’enfant a une importance incroyable, il est au centre de la famille. Donc nous avons misé là-dessus. Quand on s’internationalise, on doit jouer avec les mêmes armes qu’en France, avec des choses à estomper, d’autres sur lesquelles insister. Mais il ne faut pas inventer de nouvelles choses.
Vous connaissiez déjà bien ce pays car vous y avez installé votre production…
D. L : Nous produisons nos doudounes en Chine, au Vietnam et au Cambodge. En France, il n’y a pas le savoir-faire pour produire des doudounes. Le duvet que nous achetonsest également sourcé en Chine, mais il est certifié RDS (Responsible Down Standard), c’est à dire qu’il provient uniquement de canards voués à l’alimentation.
L’internationalisation de Jott augmentent les flux de marchandises. Pouvez-vous nous apporter des précisions sur l’ouverture en 2023 de votre plateforme logistique de 15 000 m2 à Fos-sur-mer ?
D. L : Avec 150 millions de chiffre d’affaires, nous avons besoin d’un outil beaucoup plus international puisqu’on est déjà à 35% de nos ventes à l’étranger.Notre plateforme était historiquement basée à Besançon, sauf qu’à l’époque nous réalisions 70 millions d’euros de chiffre d’affaires. Nous avons donc fait le choix de mutualiser les stocks pour gérer les commandes des clients en B to C, des clients franchisés B to B et celles de nos magasins. Le site doit ouvrir en avril 2023 sur 15 000 m2. On va livrer l’ensemble de nos activités sur cette plateforme hormis le marché asiatique. Auparavant, 90% de nos flux arrivaient au Havre. Maintenant, 90% de nos flux arriveront à Fos-sur-Mer.
Allez-vous gérer cette plateforme ?
D. L : La plupart des sociétés qui progressent très vite ne créent pas leur logistique. Nous allons la confier à un prestataire italien Movimoda sur la base d’un cahier des charges partagé. Nous avons recruté les équipes avec eux. Nous nous devons de déléguer car notre métier est gérer la marque, le digital, le sourcing…
Quels sont vos objectifs économiques d’ici trois ans ?
D. L : Nous fixons le développement du digital à 30% qui nécessite un gros investissement avec 10 personnes qui travaillent à temps plein sur le site. Au niveau des boutiques, nous devons pouvoir doubler le nombre de magasins en passant de 200 à 400, et donc doubler le chiffre d’affaires pour arriver à 350-400 millions. En parallèle, nous souhaitons accélérer la diversification. Néanmoins, s’il y’a bien une chose que nous voulons faire comprendre, c’est que Jott n’est pas une marque de mode. C’est une marque de basiques, confortables et urbains faite pour tout le monde.
Liens utiles :
> Le site de la marque Jott